EDUCATIONLe dispositif «Devoirs faits» va-t-il enfin décoller à cette rentrée?

Collège: Le dispositif «Devoirs faits» va-t-il enfin décoller à cette rentrée?

EDUCATIONJean-Michel Blanquer a assisté ce mardi à une séquence de devoirs encadrés au collège et a rappelé sa volonté de voir cette mesure se déployer davantage...
Delphine Bancaud

Delphine Bancaud

L'essentiel

  • Selon le ministère de l’Education, en 2017-2018, seulement 20 % des collègiens ont profité de la mesure.
  • Fort de ce constat, le ministre a fixé de nouveaux objectifs pour cette année : que devoirs faits soit proposé 4 heures minimum par semaine dans chaque collège et qu’un nombre croissant d’élèves soient incités à en bénéficier.
  • Mais ces objectifs se heurtent à un manque de moyens humains pour assurer ces cessions d'aide aux devoirs et au fait que la mesure ne parvient pas à toucher la bonne cible.

Après une première année un peu décevante, le dispositif « devoirs faits » va-t-il prendre son envol ? C’est ce que croit le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, qui a assisté ce mardi à une séquence de devoirs encadrés au collège Louis Armand de Nancy avec un groupe d’élèves de 6e. Lors de sa conférence de presse de rentrée, il avait affirmé : « "Devoirs faits" va atteindre sa maturité cette année ».

Une manière de reconnaître que le dispositif n’a pas été à la hauteur des ambitions qui lui étaient fixées jusque-là. Car au départ, Jean-Michel Blanquer estimait que 25 % des élèves des 7.100 collèges de France, en bénéficieraient. Or, selon le ministère de l’Education, en 2017-2018, seulement 20 % des collégiens en ont profité et la mesure a été diversement appliquée sur tous le territoire. Ce que confirme le premier syndicat des enseignants du secondaire : « d’après nos calculs, 20 % des élèves en ont profité pendant 1,7 heure en moyenne par semaine », indique Valérie Sipahimalani, secrétaire générale du Snes.

Un manque de moyens humains

Fort de ce constat, le ministre a fixé de nouveaux objectifs pour cette année : que devoirs faits soit proposé 4 heures minimum par semaine dans chaque collège après les vacances d’automne et qu’un nombre croissant d’élèves soient incités à en bénéficier. Et le ministre ne cesse de répéter que cette mesure participe à une « dynamique pour l’élévation du niveau général et la justice sociale », comme il l’a fait encore ce mardi à Nancy. Pour mettre la pression aux chefs d’établissement, il leur a d’ailleurs envoyé une lettre avant la rentrée dans laquelle il rappelle ces objectifs.

Une injonction qui va cependant être difficile à suivre, faute de moyens. Car selon une enquête du premier syndicat des chefs d’établissement, le SNPDEN, seuls 54 % des principaux de collège disent que l’enveloppe allouée à cette rentrée pour la mesure couvre les besoins engendrés (principalement le financement d’heures supplémentaires du personnel encadrant). Pour 33 % d’entre eux, l’enveloppe reçue n’est pas suffisante et 13 % disent n’avoir rien reçu. « Cela a donné lieu à des négociations de marchands de tapis entre les principaux et les rectorats. Et ceux qui n’ont pas obtenu satisfaction ont renoncé à assurer certains créneaux de "devoirs faits" », explique Philippe Vincent, secrétaire général du SNPDEN.

Des problèmes d’intendance qui persiste

Les séances de devoirs faits étant assurées soit par des assistants d’éducation, soit par des professeurs, les principaux de collège ont aussi parfois du mal à trouver des bonnes volontés : « L’an dernier, il n’y a pas eu assez d’enseignants qui se sont lancés », constate Valérie Sipahimalani. « Et cette année, le fait que le ministère ait imposé 4 heures de "devoirs faits", a posé beaucoup de problèmes pour trouver les personnels encadrants », complète Christophe, professeur de français dans un collège de Seine Maritime.

Au-delà des moyens financiers, se posent également des questions pratiques : dans les collèges où les élèves sont dépendants des transports scolaires, comment organiser après les cours ces heures consacrées aux devoirs ? Le SNPDEN a d’ailleurs réclamé l’insertion de ces heures dans l’emploi du temps des collégiens.

Une nouvelle aide du Cned cette année

Autre souci : la mesure repose sur le volontariat des élèves. Or, comme l’a reconnu le ministre lors de sa conférence de presse de rentrée : « Ce n’est pas toujours les élèves qui en ont besoin qui le demandent ». Ce que confirme aussi Christophe : « L’an dernier, je n’ai constaté aucun progrès particulier des élèves dans leur travail et la raison est simple : les élèves qui se sont inscrits (ou plus exactement qui sont inscrits par leurs parents) ne sont pas ceux qui en avaient le plus besoin. Idem pour cette année car les deux élèves de ma 4e qui se sont inscrites sont les deux meilleures élèves. » Pour mieux cibler les participants, les chefs d’établissement ont demandé aux professeurs principaux de faire de la pédagogie sur le dispositif lors des réunions parents-professeurs de la rentrée. Et qu’ils n’hésitent pas à proposer cet accompagnement individuellement. Les créneaux pour proposer « Devoirs faits » ont aussi été revus dans certains établissements, afin de prévoir des sessions lors de la pause méridienne par exemple. Dans le collège de Christophe, on a bien lancé un appel à toutes les voitures : « mais à ce jour, les inscriptions pour "devoirs faits" vont de deux à 5 élèves par classe », observe-t-il.

Pour booster « devoirs faits », Jean-Michel Blanquer propose aussi une nouveauté à cette rentrée : le Centre national d’enseignement à distance (Cned) offrira en octobre un nouveau service numérique aux collégiens dans le cadre de « devoirs faits ». Ce service proposera une aide instantanée aux collégiens avec un appui méthodologique. Un argument de plus pour tenter d’attirer les élèves.