Non, l'arabe ne va pas devenir obligatoire à l'école primaire

Non, l'arabe ne va pas devenir obligatoire à l'école primaire

FAKE OFFLa proposition de « relancer l'apprentissage de la langue arabe » faite par l'Institut Montaigne a suscité un torrent d'approximations...
Mathilde Cousin

Mathilde Cousin

L'essentiel

  • L’Institut Montaigne a proposé de « relancer l’apprentissage de la langue arabe » au sein de l’Education nationale.
  • Une piste de réflexion qui a soulevé un tollé à droite et à l’extrême-droite.
  • Seuls 0,20 % des collégiens et des lycéens apprenaient l’arabe en 2016-2017.

Une simple proposition qui a déclenché un torrent d’indignation et d’approximations. Lundi, l’Institut Montaigne, un groupe de réflexion consacré aux politiques publiques, a proposé de « relancer l’apprentissage de la langue arabe ». « Le nombre d’élèves qui apprennent l’arabe au collège et au lycée a été divisé par deux », a avancé Hakim El Karoui, l’auteur du rapport, alors que ce nombre a « été multiplié par dix dans les mosquées ».

Interrogé à ce sujet sur BFMTV, Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Education nationale, a souligné « qu’il faut donner du prestige » à l’arabe, tout comme d’autres langues comme le chinois ou le russe. L’arabe « est une très grande langue littéraire, qui ne doit pas être apprise seulement par les personnes d’origine maghrébine ou de pays de langue arabe. »

A droite et à l’extrême-droite, il n’en fallait pas plus pour soulever un tollé. Xavier Bertrand, président des Hauts-de-France, a dénoncé « l’arabe obligatoire en primaire ». Pour Eric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes, « favoriser l’enseignement de l’arabe à l’école c’est fracturer la France et renforcer le communautarisme », tandis que Louis Aliot, député RN des Pyrénées-Orientales, dénonce un « gadget à destination d’un communautarisme que ne voulons pas ».

FAKE OFF

« Je n’ai jamais dit que l’arabe devait être obligatoire à l’école primaire », s’est défendu Jean-Michel Blanquer lundi soir sur LCI. Actuellement, l’apprentissage de cette langue n’est nullement obligatoire au primaire et dans le secondaire.

Au primaire, 40.000 élèves suivent des cours d’arabe. L’arabe est enseigné à travers des enseignements internationaux de langues étrangères, un enseignement facultatif, en dehors des heures de classe, par des professeurs originaires d’Algérie, de Tunisie et du Maroc et rémunérés par leur pays. « Le suivi administratif et pédagogique est assuré conjointement par les inspections académiques françaises et les responsables pédagogiques des consulats concernés », soulignait en avril Rachida Dumas, inspectrice d’académie. Le dispositif est ouvert « à tous les élèves ».

0,20 % des élèves apprennent l’arabe dans le secondaire

Dans le secondaire, 0,20 % des élèves, hors Mayotte, ont choisi d’étudier l’arabe en LV1, LV2 ou LV3, pendant l’année scolaire 2016-2017. Cela représente 11.174 élèves, explique l’Education nationale à 20 Minutes. Dix ans plus tôt, ils étaient 6.512, soit 0,12 % des effectifs. L’arabe est majoritairement enseigné dans des collèges se trouvant dans des zones d’éducation prioritaire, tandis que le profil des lycées « est plus varié », précise Rachida Dumas. 183 professeurs titulaires enseignent cette langue.

Au CNED, les effectifs sont aussi faibles : le centre d’enseignement à distance recense 2.535 collégiens et lycéens inscrits à sa formation d’arabe littéraire.

Un nombre d’élèves difficile à évaluer dans les mosquées

Quid de l’enseignement dans les mosquées, évoqué par Hakim El Karoui ? Le nombre d’élèves est difficile à évoluer. Ils seraient 80.000 selon des statistiques du ministère de l’Intérieur à apprendre l’arabe dans des mosquées, des associations cultuelles ou caritatives ou des instituts liés à des centres religieux. Mais cette statistique est « déjà ancienne » et est « difficile à vérifier », bien que « corroborée par des appréciations qualitatives et des témoignages », soulignait dans un précédent rapport publié en 2016 Hakim El Karoui. Sollicité par l’intermédiaire de son président, le Conseil français du culte musulman n’a pas donné suite à notre demande à ce sujet.

L’arabe littéraire, langue d’échanges

Quel arabe est enseigné dans l’Education nationale ? Il s’agit de l’arabe littéraire, « la langue de la presse, des romans, des institutions internationales, des rencontres institutionnelles », précise à 20 Minutes Pierre-Louis Reymond, professeur d’arabe en classes préparatoires au lycée du Parc à Lyon. Sont évaluées la compréhension orale, la compréhension écrite, l’expression écrite et l’expression orale, « comme l’anglais, comme l’espagnol. »

Loin du « communautarisme » évoqué par plusieurs élus, la langue arabe « est pour tout le monde, avance le professeur. Il faut absolument que la langue arabe soit traitée comme une langue d’avenir. La langue arabe est une langue qui permet de posséder des cordes supplémentaires à son arc pour le monde du travail. » L’arabe est la quatrième langue la plus parlée dans le monde. En France, trois à quatre millions de personnes parlent l'arabe dialectal, selon le ministère de la Culture.

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