SECURITE ROUTIERELes opposants à la limitation à 80 km/h intensifient la bataille

Limitation à 80 km/h: Offensive judiciaire, guerre de chiffres... La bataille des opposants avant l'entrée en vigueur

SECURITE ROUTIEREAvant l'entrée en vigueur le 1er juillet de la limitation de vitesse à 80 km/h, les opposants jettent leurs dernières forces dans la bataille face à un gouvernement inflexible...
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Recours devant le Conseil d'Etat, refus de changer les panneaux, guerre de chiffres: avant l'entrée en vigueur le 1er juillet de la limitation de vitesse à 80 km/h, les opposants jettent leurs dernières forces dans la bataille face à un gouvernement inflexible.

«Passage en force»

Publié dimanche après des mois de controverse, un décret d'application a officialisé l'échéance du 1er juillet qui avait été fixée début janvier dans le cadre d'un plan gouvernemental visant à réduire le nombre de tués sur les routes.

Ces six derniers mois, l'association 40 millions d'automobilistes et la Fédération française des motards en colère (FFMC) avaient multiplié les manifestations pour dénoncer un «passage en force» de l'exécutif.Mais en publiant son décret, le gouvernement a scellé l'entrée en vigueur de cette nouvelle limitation de 90 à 80 km/h sur 400.00 kilomètres de routes à double sens sans séparateur central.

Après les associations qui ont contesté dans la rue une mesure «parisianiste», «impopulaire» et «inefficace», la colère a résonné au Parlement ces derniers jours. Le 14 juin, un groupe de travail sénatorial avait déjà préconisé une application «décentralisée et ciblée» de ce dispositif, avec des routes limitées à 80 km/h choisies dans chaque département en fonction de leur dangerosité. L'option a été «écartée» par le Premier ministre Edouard Philippe, intransigeant sur cette mesure dont il s'est toujours dit «prêt à assumer l'impopularité» (76% d'opposition selon un sondage en avril).

Les élus montent au créneau

Depuis dimanche, de nombreux élus sont montés au créneau. Le débat sur une proposition de loi du député (LR) du Cantal Vincent Descoeur, destinée à permettre aux pouvoirs publics locaux d'«adapter» la réglementation sur les limitations de vitesse, a donné lieu à de vifs débats à l'Assemblée jeudi.

Formant un front commun, des députés de droite comme de gauche ont accusé le gouvernement de mépriser les campagnes, où se situent l'essentiel des routes concernées par la nouvelle limitation. «Cette mesure ignore les difficultés de déplacement dans les territoires ruraux et de montagne», a affirmé Vincent Descoeur, s'en prenant à une majorité «qui préfère les cyclistes urbains connectés aux ruraux roulant au diesel». Le texte a finalement été rejeté à l'issue d'un vote.

«Que l'Etat se débrouille»

Une quinzaine de députés UDI-Agir et LR ont également déposé mardi un recours «en excès de pouvoir» devant le Conseil d'Etat. «Il n'y a pas eu de débat. (...) Donc on ouvre un débat devant le Conseil d'Etat, qui a la possibilité de censurer», explique le député (Agir) de Lozère, Pierre Morel-A-L'Huissier.

La présidente (LR) du conseil départemental de la Creuse, Valérie Simonet a, elle, annoncé que sa collectivité ne mettrait aucun moyen pour changer les panneaux, car cette mesure «va contribuer à l'enclavement du département». «En l'absence de concertation, que l'Etat se débrouille», a-t-elle lancé.

Le ministère de l'Intérieur évalue à 11.000 le nombre de panneaux de signalisation à changer, pour un coût global de 6 à 12 millions d'euros. Ces modifications sont à la charge des collectivités et doivent ensuite être remboursées par l'Etat. Face aux menaces, le gouvernement joue pour l'instant l'apaisement.

«Les départements l'ont déjà dit, par le biais de l'Association des départements de France: ce sont des républicains et ils respecteront les règles», rappelle le délégué interministériel à la sécurité routière, Emmanuel Barbe. «Nous regardons actuellement ce que nous ferions d'un point de vue juridique. Mais tant qu'on n'y est pas, ne faisons pas d'alarmisme», ajoute-t-il, en rappelant qu'«une mesure qui vise à épargner le maximum de vies dans les ruralités ne peut être une mesure anti-rurale».

Les opposants contestent aussi l'efficacité de la mesure sur la mortalité routière (3.684 tués en 2017, en baisse sur un an). Selon le gouvernement qui reprend notamment les travaux d'experts suédois, elle permettrait de sauver jusqu'à 400 vies par an. Pour convaincre une opinion publique globalement opposée à la mesure et répondre aux «idées reçues» des anti-80 km/h, la Sécurité routière a lancé une série de spots, avec chiffres et tests sur circuit à l'appui. Affichant leur opposition jusqu'au bout, 40 millions d'automobilistes et la FFMC manifesteront à Paris le samedi 30 juin, veille de l'entrée en vigueur.