Nord: Pourquoi l'Urssaf réclame 82.000 euros à la communauté Emmaüs de Cambrai
SOCIETE•L’organisme de recouvrement des cotisations sociales reproche à l’association d’avoir versé une dizaine d'euros en liquide par jour à ses compagnons…Mikaël Libert
L'essentiel
- Un redressement fiscal de plus de 80.000 euros pourrait mettre en péril la communauté Emmaüs de Cambrai.
- L’Urssaf estime que le pécule versé aux compagnons est un salaire.
- Un think tank dénonce une façon de « taxer la misère ».
Quand la loi défie la morale. Le 28 mars prochain, le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de Douai devra trancher dans un procès qui va opposer l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) et la communauté Emmaüs Cambrai-Fontaine Notre-Dame. En jeu, un recouvrement de cotisations d’un montant de 82.059 euros qui pourrait mettre en péril la survie de l’association.
C’est le Cercle Lafay, un think tank qui traque les excès de l’Urssaf, qui a révélé cette affaire. Tout est parti d’un banal contrôle de la communauté Emmaüs de Cambrai, entre août et octobre 2016. L’inspectrice en charge de ce dossier devait vérifier que la législation sur l’assurance chômage, la sécurité sociale et la garantie des salaires avait été respectée entre 2013 et 2015.
« Taxer la misère »
Dans la lettre d’observation de fin de contrôle envoyée par l’Urssaf, le 14 octobre 2016, l’inspectrice a relevé plusieurs anomalies, notamment concernant le versement de « pécules » aux 38 compagnons de cette communauté Emmaüs. Pécules considérés comme des salaires pour lesquels l’Urssaf réclame donc le paiement de cotisations sociales à hauteur de 82.059 euros.
« C’est une manière scandaleuse de taxer la misère, affirme François Taquet, avocat à Cambrai et militant du Cercle Lafay. Emmaüs ne verse pas de salaire à ses compagnons. Ce pécule n’est qu’une aide ». Une aide dont le montant était d'environ 340 euros par mois seoln nos informations. Par ailleurs, toujours selon François Taquet, la somme réclamée « met en péril l’association qui risque de déposer le bilan ».
Egalité de traitement
Contactée par 20 Minutes, l’Urssaf n’en démord pas : « On ne fait pas de différence en fonction des entreprises, c’est le principe de l’égalité de traitement. La question est, doit-on appliquer la loi dans certains cas et pas dans d’autres ? La réponse est non », déclare l’organisme.
« Evidemment qu’ils vont avancer l’argument juridique. Et dans ce cas, c’est la loi qui pose problème et il revient aux politiques de la changer », persiste François Taquet. Le Cercle Lafay affirme que si de telles procédures étaient engagées contre toutes les communautés Emmaüs de France, ce sont plus de 25 millions qui pourraient ainsi être récupérés « en taxant la misère ».