Lyon: Des migrants abrités à l'université, la présidente de Lyon-II en appelle «à la responsabilité de l'Etat»
SOCIAL•Depuis cinq jours, une cinquantaine de migrants ont trouvé refuge, avec l’aide des étudiants, dans un amphi de l’université Lyon-II à Bron…Elisa Frisullo
L'essentiel
- Une cinquantaine de migrants sont abrités dans un amphi de Lyon-II depuis cinq jours.
- La présidente de Lyon-II a refusé de faire évacuer les lieux. Elle en appelle à la responsabilité des pouvoirs publics, l’hébergement des migrants sans domicile ne relevant pas des missions de l’université.
Dans un coin de l’amphithéâtre, des dizaines de matelas ont été entassées à côté d’une pile de vêtements et de couvertures apportés par des étudiants et du personnel de la fac. Un petit local technique a été reconverti dans l’urgence en une zone de stockage de nourriture. Depuis cinq jours, une cinquantaine de migrants sont abrités dans un amphithéâtre de l’université Lyon-II sur le campus de Bron-Parilly.
aCette occupation, organisée par des étudiants de l’université, a été imaginée à la hâte la semaine passée pour venir en aide à ces populations, évacuées par les forces de l’ordre des abords de la Part-Dieu, à Lyon, où elles s’étaient installées.
L’Université se refuse à faire évacuer les lieux
« Certains étudiants ont assisté à leur expulsion. Ils ont été choqués par la violence avec laquelle cela s’est déroulé. Nous n’avions pas prévu d’occuper un amphi de la faculté, mais nous ne pouvions pas les laisser errer encore dans la rue », explique Yassine, l’un des jeunes mobilisés pour venir en aide aux migrants.
« Mise devant le fait accompli », la présidente de Lyon-II a décidé de faire face à cette situation et de ne pas faire évacuer ces migrants, parmi lesquels figurent une mère et ses enfants, quelques mineurs et de nombreux adultes sans papiers. « L’Université devrait choisir entre mettre à la rue ces personnes et assurer ses missions d’enseignement. Nous ne voulons pas choisir », a expliqué ce mardi Nathalie Dompnier.
« Mais l’université n’est pas un lieu pour les accueillir. Cette situation n’est pas satisfaisante car l’université est en dehors de ses missions. Nous ne pouvons pas, nous ne savons pas loger des femmes et des hommes dignement », a ajouté la présidente de Lyon-II, soucieuse de voir les pouvoirs publics se saisirent de cette situation.
« Ce qui nous frappe, c’est l’incurie de l’Etat »
« Ce qui nous frappe, c’est l’incurie des autorités publiques. Il revient à l’Etat de trouver des solutions d’hébergement et d’assurer l’accueil et le suivi médico-social de ces personnes. Nous en appelons à la responsabilité des uns et des autres pour ne pas rester dans cette situation insupportable, dans laquelle nous ne sommes pas capables de respecter les droits humains les plus fondamentaux », a martelé Nathalie Dompnier.
Ses appels, presque quotidiens, à la préfecture du Rhône n’ont pour l’heure rien donné. Le 115, la métropole, les villes de Bron et de Lyon n’ont pas été en mesure de trouver des solutions d’hébergement pour ces migrants, les centres d’hébergement étant saturés, à la veille de l’hiver.
« Leurs dossiers ne passeront pas avant les autres »
Contactée par 20 Minutes, la préfecture du Rhône a indiqué que des solutions d’hébergement ne pourraient pas être proposées tant que ces personnes ne se seraient pas fait connaître des services de l’Etat. « Nous devons savoir s’ils sont demandeurs d’asile, réfugiés ou déboutés du droit d’asile pour pouvoir les orienter », indique-t-on à la préfecture. « Mais ce n’est pas parce qu’un amphi est occupé que leurs dossiers vont passer avant les autres », prévient-elle.
Pour l’un des migrants abrités à la fac, cette occupation est l’occasion de souffler et de se reposer après des mois passés dans la rue. « J’ai fui la Guinée puis je suis allé en Italie. Je suis ensuite venu en France parce que je parle la langue. Cela fait trois mois que je suis là et que je dors dans la rue. On peut dire merci aux étudiants pour l’aide qu’ils nous apportent », confie l’un des migrants, convoqué cette semaine à la préfecture pour faire une demande d’asile.
« On doit avoir une réponse dans six mois. D’ici là, on est sans papier, on ne peut rien faire, ni travailler, ni trouver un lieu pour vivre », explique ce réfugié, apeuré à l’idée de se voir un jour forcé par les autorités de retourner dans son pays, où il se dit menacé.