Éducation sexuelle: Une rumeur sur les cours à l'école refait surface sur internet
FAKE OFF•Non, la masturbation n'est pas enseignée aux enfants en maternelle...Mathilde Cousin
L'essentiel
- Une vidéo diffusée par un pédopsychiatre et relayée par le professeur Joyeux, alerte sur un document de l’OMS, accusé de favoriser la « pédophilie. »
- Le pédopsychiatre s’inquiète de la diffusion de ce document dans les écoles françaises.
- Ce document n’est pas utilisé par l’Education nationale.
Edit : Des précisions sur le professeur Joyeux et sur une pétition ont été ajoutées en août 2018.
C’est une vidéo alarmante qui a été postée par le pédopsychiatre Maurice Berger. Titrée « alerte sur "l’éducation sexuelle" des enfants », elle a été vue près de 159.000 fois sur YouTube et a été reprise sur le site du professeur Joyeux, radié en 2016 de l’Ordre des médecins. Cette radiation a été annulée en appel en juin 2018.
Dans le viseur du professeur Joyeux et du pédopsychiatre, un document publié par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), intitulé « standards pour l’éducation sexuelle en Europe » et le site internet Onsexprime, que les deux scientifiques accusent de favoriser la pédophilie.
Qu’est-ce que le site onsexprime ?
Ce site a été bâti sous l’égide de Santé publique France, un établissement public sous tutelle du ministère chargé de la Santé. Ce site est destiné « à informer le grand public sur le thème de la sexualité (des adolescents) mais en aucun cas à remplacer le conseil d’un professionnel de santé. »
Il propose aux adolescents, sa cible, des limites claires pour leur sexualité et l'importance du consentement : « Si on a un peu peur de certaines (pratiques sexuelles) ou qu’on n’en a pas vraiment envie, il ne faut surtout pas se forcer. Savoir dire non », est-il écrit dans la section « Les pratiques sexuelles. »
Faut-il s’inquiéter des recommandations de l’OMS ?
Contrairement à ce qui est affirmé dans la vidéo, ce document, publié par le bureau européen de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), n’est pas « obligatoire. » Ces « standards pour l’éducation sexuelle en Europe » constituent un « cadre de référence » pour les décideurs politiques, les autorités compétentes en matière d’éducation et de santé et les spécialistes. Ce document n’est nullement une loi et ne peut donc pas être obligatoire en France.
Que contient-il ?
Les rédacteurs préconisent-ils d' « expliquer aux enfants âgés de zéro à quatre ans ce qu’est la masturbation infantile précoce et de leur proposer de jouer au docteur », comme le développe le pédopsychiatre ? Dès l’introduction, les rédacteurs de ces standards posent sirtout des garde-fous : l’éducation sexuelle doit être adaptée à l’âge. Ils donnent pour exemple la situation suivante : « si un enfant de quatre ans demande d’où viennent les enfants, la réponse "du ventre de maman" est une réponse suffisante et adéquate. » Il n’est donc nullement question d’employer un vocabulaire inadapté à l’âge de l’enfant.
L’OMS parle de l'éducation sexuelle au sens large, en insistant sur les notions de consentement et de responsabilité. « L’éducation sexuelle ne se résume pas à fournir des données factuelles sur la reproduction et la prévention des maladies. Elle doit aider l’enfant à développer ses sens et la perception/l’image de son corps, à renforcer sa confiance en soi et son autodétermination, à se comporter de manière responsable envers soi-même et envers autrui. »
Un document polémique depuis plusieurs années
Les affirmations du professeur ne sont pas nouvelles. En 2014, la rumeur d’un changement sur l’éducation sexuelle à l’école avait circulé par SMS. Un collectif incitait les parents à retirer leurs enfants de l’école pendant une journée, en signe de protestation.
En août 2018, une pétition lancée par un mouvement anti-avortement a relancé la polémique, affirmant, à tort, que le texte de l'OMS vise à « légaliser la pédophilie ».
Alors, quelle éducation sexuelle est enseignée aux élèves ?
« Il n’est évidemment pas question de parler de masturbation aux élèves de maternelle ! », précise une représentante de l’Education nationale à 20 Minutes. L’éducation à la sexualité ne constitue pas en soi un programme, mais s’inscrit dans un socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Aucun changement n’est prévu pour cette éducation, ajoute la représentante du ministère.
Cette éducation « prend la forme d’une éducation au dialogue et non d’un discours sur la sexualité. » Il ne s’agit pas d’imposer des cours, notamment aux plus petits,mais de créer un « dialogue ». Les intervenants doivent procéder par binôme et être formés. Ils doivent notamment veiller à « répondre de façon adaptée au niveau de maturité des élèves. »
L’éducation à la sexualité vise à répondre à des questions de santé publique (information sur les MST, sur l’accès à la contraception…) et à des problématiques ciblées : les relations entre les filles et les garçons, les violences sexuelles, la pornographie, la lutte contre les préjugés sexistes et homophobes…
Par ailleurs, les parents d’élèves sont associés à la mise en place de cette éducation à travers la participation de leurs représentants aux instances des établissements scolaires.
Pour aller plus loin sur ce sujet, le portail Education à la sexualité sur le site Eduscol recense les outils utilisés pour cette politique, ainsi que les textes officiels utilisés comme support.
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