Infanticide de Berck: Le soir où Fabienne Kabou a abandonné Adélaïde à la marée montante
PROCÈS•La cour d’assises du Nord est revenue, ce lundi, sur les faits d’assassinat pour lesquels Fabienne Kabou est jugée en appel…Vincent Vanthighem
L'essentiel
- Fabienne Kabou est jugée en appel pour infanticide à Douai.
- Les débats se sont concentrés, ce lundi, sur l’examen des faits.
- L’accusée reconnaît les faits mais plaide « non-coupable ».
A la cour d’assises d’appel de Douai (Nord),
« C’était son jouet préféré… » Fabienne Kabou sanglote doucement à l’évocation de Sophie la girafe. Le dernier jouet avec lequel Adélaïde, 15 mois, s’est amusée. « Je m’en souviens parce qu’il faisait du bruit dans le train. » Ce 19 novembre 2013, le périple s’est achevé à Berck (Pas-de-Calais). Vers 21h, Fabienne Kabou a allaité une dernière fois sa fille avant de la déposer sur la plage alors que la marée, coefficient 84, montait.
Ce lundi, la cour d’assises du Nord, à Douai, est revenue sur les faits d’assassinat pour lesquels cette femme de 40 ans est jugée en appel. Elle prétend toujours avoir été « commandée par une force supérieure » mais Fabienne Kabou ne les nie pas. Comment le pourrait-elle ? En écoutant les témoins défiler à la barre, les jurés ont dû être surpris par le décalage entre l’horreur brute du meurtre et l’absence de précautions prises par l’accusée pour le dissimuler.
« Elle m’a dit qu’elle avait passé une excellente nuit. »
Fabienne Kabou a parlé à tout le monde durant son voyage. A Corinne qui, dans le bus, a trouvé « la petite très mignonne ». A Barbara qui, sur la plage, a jugé Fabienne Kabou « très sympathique ». Et surtout à Jürgen, gérant de l’hôtel Le Littoral, à qui elle a laissé sa véritable identité.
C’est lui qui a appelé la police, le 20 novembre. En consultant ses mails, il était tombé sur les dernières informations locales. Ce matin-là, un pêcheur de crevettes a découvert un bébé mort sur la plage, a-t-il lu. « J’ai tout de suite compris que c’était elle, se souvient l’hôtelier à la barre. Elle m’avait dit qu’elle avait passé une excellente nuit. »
« Quelque chose clochait… »
Sans ce déclic, « on n’en serait pas là aujourd’hui », estime Arnaud Crétel. En poste à la police judiciaire de Lille, il a d’abord pensé à « un accident sur un bateau », voire même « à un suicide collectif », en découvrant sur le sable cette petite en vêtements Cyrillus, « soignée jusqu’au bout des ongles ». Mais, à partir du renseignement donné par l’hôtelier, le policier remonte une piste en région parisienne.
Neuf jours plus tard, c’est Olivier Da Fonseca, son collègue de la Direction centrale de la police judiciaire qui toque à la porte d’un atelier de Saint-Mandé (Val-de-Marne). Les enquêteurs avaient téléphoné avant. Fabienne Kabou aurait pu fuir. Mais la jeune femme ouvre. Elle offre même le café avant de mentir de façon magistrale. « Mais quelque chose clochait. »
La poussette, les billets de train et les grains de sable
En garde à vue, « les aveux sont donc venus rapidement », témoigne, à son tour, Patrice Dancre. Fabienne Kabou raconte alors qu’elle « a déposé sa fille [sur la plage] après lui avoir fait un gros câlin. Et qu’elle s’est enfuie. » La poussette est restée dans le parc du minigolf de Berck. Les billets de train sont glissés derrière la tête de lit, à Saint-Mandé. Dans l’entrée, les policiers trouvent même des bottes dont les semelles sont encore constellées de grains de sable qu’elle n’a pas pris la peine d’épousseter.
« Pour moi, cette femme reste encore aujourd’hui un mystère… », poursuit Olivier Da Fonseca. Patrice Dancre, lui, tente une explication. « J’ai compris qu’Adélaïde était une entrave pour elle et Michel Lafon, son compagnon. Qu’ils allaient se déchirer [si elle ne la tuait pas]… » A cette évocation, Fabienne Kabou ne cille pas. Michel Lafon doit venir témoigner, mardi après-midi. Le verdict est attendu vendredi.