Saint-Etienne-du-Rouvray: Le témoignage poignant d'un couple de rescapés
TERRORISME•Un an après l’attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray, deux paroissiens présents dans l’église racontent les événements…Thibaut Chevillard
L'essentiel
- Guy et Janine Coponet étaient dans l’église de Saint-Etienne-du-Rouvray il y a un an.
- Traumatisé, le couple d’octogénaires raconte ce qu’ils ont vécu.
Le 26 juillet 2016, Guy Coponet et son épouse, Janine, assistaient à la messe, à Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime). Soudain, « deux hommes entrent, criant en arabe, posant un sac sur l’autel d’où ils sortent, pour l’un un vêtement bigarré, pour l’autre une ceinture dont on ignore si elle est explosive ou non, leurs couteaux, ainsi qu’une arme », raconte le paroissien de 87 ans qui a couché par écrit le récit des événements, publié ce mercredi dans Le Parisien.
L’un des deux terroristes l’oblige « à tenir un téléphone portable pour enregistrer les scènes qui vont suivre. » « Père Jacques est mis à genoux et lardé de coups de couteau, puis balancé au bas des marches devant l’autel », poursuit Guy. « Le père, maintenant sur le dos, essaie de repousser à coups de pied l’agresseur. Maintenu par l’autre, je filme toujours. Le père dit alors : Va-t’en, satan ! puis une deuxième fois, comme un ordre sans réplique : Satan, va-t’en ! L’agresseur lui tranche la gorge. Un filet de sang, un râle, c’est fini. »
A son tour, Guy reçoit « des coups de couteau dans le bras, dans le dos » et a « la gorge tranchée ». « Je suis balancé sur le côté de l’autel et me retrouve allongé sur les pavés sur mon côté gauche. Je ne bouge plus, afin qu’ils ne m’achèvent pas, et j’appuie sur mon cou là où je sens le sang couler. » Son épouse, Janine, le croit mort, tout comme les assaillants. Elle est persuadée, écrit-elle, que « Guy ne connaîtra pas le dernier-né de nos arrière-petits-enfants, âgé de 4 semaines »
« Nous pourrons fêter nos soixante-cinq années de mariage »
Trois quarts d’heures plus tard, les policiers abattent les deux terroristes et pénètrent dans l’église. « Je sens qu’on me soulève, qu’on fait des pressions sur ma poitrine, et qu’on m’emmène », ajoute le vieil homme. Grièvement blessé, il est transporté à l’hôpital où il subira plusieurs opérations. Un policier prévient Janine que son mari va s’en sortir. « Quand j’ai réalisé, je me souviens avoir dit "Il va connaître son petit-fils et nous pourrons fêter nos soixante-cinq années de mariage" », écrit-elle.
Aujourd’hui, le couple est « traumatisé », explique à 20 Minutes leur avocat. « Ils ont constamment des flash-back de cette journée », indique Me Méhana Mouhou, qui défend plusieurs victimes d’attentats. « Désormais, quand ils vont prier à l’église, ils se mettent près de la sortie. C’est très difficile de prier car ils ne se sentent jamais véritablement en sécurité, même dans une église. Ils ont peur que cela recommence. »
Séquelles physiques
Guy a également de nombreuses séquelles physiques, notamment des « problèmes de fausse route alimentaire ». Ils sont particulièrement choqués « d’avoir vu le père Hamel, qu’il connaissait très bien depuis plusieurs décennies se faire égorger », poursuit Me Mouhou. « Il le voyait très souvent, ils le connaissaient depuis très longtemps, il faisait en quelque sorte partie de leur famille ».