Affaire Grégory: Cette nuit de 1984 où Murielle Bolle a subi un «recadrage en règle» par sa famille
JUSTICE•Témoin clé à l’époque des faits, la belle-sœur de Bernard Laroche a été mise en examen pour l’enlèvement suivi de la mort du petit Grégory, en 1984…Vincent Vanthighem
L'essentiel
- Murielle Bolle a été mise en examen pour l’enlèvement du petit Grégory
- En 1984, elle avait incriminé son beau-frère avant de se rétracter
- Elle aurait changé de version à cause de la pression de sa famille
Ce n’est pas un « enfant de chœur ». Et pour les enquêteurs, c’est ce qui rend son témoignage « plus crédible encore ». Ce sont donc notamment les propos d’un « vieux cousin » de la famille Bolle qui ont conduit, jeudi soir, la magistrate chargée de l’enquête sur la mort du petit Grégory à mettre en examen Murielle Bolle pour l’enlèvement suivi de la mort du garçonnet de 4 ans, découvert pieds et poings liés dans la Vologne (Vosges), le 16 octobre 1984.
En 1984, celle que l’on surnommait alors « Bouboule » avait commencé par raconter aux gendarmes que le petit Grégory avait été enlevé par son beau-frère, Bernard Laroche, avant de se rétracter. Pendant trente-deux ans, les enquêteurs ont pensé que la jeune fille qui avait 15 ans à l’époque avait été la cible de « pressions familiales » la forçant à changer de version.
« Un recadrage en règle durant la nuit »
Pour appuyer cette thèse, ils disposent désormais d’un nouveau témoignage depuis une quinzaine de jours. Selon nos informations, ce « vieux cousin » de la famille s’est présenté aux enquêteurs après avoir eu vent, par la presse, de l’arrestation des époux Jacob. Il a alors raconté qu’il était présent, le 5 novembre 1984, dans la maison jaune de Laveline-devant-Bruyères qui abritait la famille Bolle.
A peine revenue de la gendarmerie où elle venait d’incriminer son beau-frère, Murielle Bolle aurait, selon lui, subi « un recadrage en règle durant la nuit ». La jeune fille aurait été « violentée verbalement et physiquement » par sa famille qui lui aurait intimé l’ordre de revenir sur ses déclarations et d’innocenter son beau-frère.
Une scène si violente que Murielle Bolle aurait pensé à fuir ? C’est en tout cas ce que raconte Laurence Lacour, auteure du Bucher des innocents, un livre référence sur le sujet. « Elle est rattrapée en état de choc près de la voie ferrée (…) Sa mère dira plus tard qu’elle voulait se suicider. »
« Elle a marqué le coup mais n’a pas craqué »
Les gendarmes de la section de recherches de Dijon (Côte d’or) ont donc remis ce sujet sur le tapis, mercredi, quand ils ont placé Murielle Bolle en garde à vue, trente-deux ans après. Lorsqu’ils lui ont présenté le témoignage du vieux cousin, « elle a marqué le coup mais elle n’a pas craqué pour autant », raconte une source proche du dossier.
« C’est encore la même soupe indigeste qu’on lui ressert », dénonce Jean-Paul Teissonnière, son avocat, qui qualifie cette histoire de « ragots » quand les enquêteurs l’estiment, au contraire, « précise » et « circonstanciée ». « Ce vieux cousin est un homme qui a des difficultés médicales. Il a eu beaucoup d’ennuis dans sa vie. Il ne parle donc pas pour ne rien dire », poursuit notre source.
La magistrate en charge du dossier a, désormais, la possibilité d’organiser une confrontation entre les deux protagonistes, histoire de tenter d’y voir clair. Murielle Bolle, elle, a été placée en détention provisoire jusqu’à mardi, date à laquelle la chambre de l’instruction doit examiner l’intérêt de la maintenir derrière les barreaux, le temps que l’enquête se poursuive.