EDUCATIONPourquoi les rythmes scolaires à la sauce Macron seront un casse-tête

Pourquoi les rythmes scolaires à la sauce Macron risquent de tourner au casse-tête

EDUCATIONLe projet Macron prévoit de laisser à chaque commune le soin de décider pour ses écoles..
Delphine Bancaud

Delphine Bancaud

L'essentiel

  • Les communes qui garderont les quatre jours et demi et les activités périscolaires pourraient se retrouver face à des difficultés de financement après 2019.
  • Celles conserveront les quatre jours et demi sans les activités périscolaires vont mécontenter les parents si elles ne proposent que de la garderie après la classe.
  • Celles qui reviendront à la semaine à quatre jours vont être taxées de ne pas prendre en compte le bien être des élèves.

C’est l’un des premiers dossiers épineux que va devoir gérer le nouveau ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer. Retoucher la réforme des rythmes scolaires, mise en place sous le quinquennat Hollande, pour « laisser aux communes, en lien étroit avec les écoles de leur territoire, le soin d’organiser le temps périscolaire sans contrainte », selon le programme électoral d’Emmanuel Macron. Lors de son discours de passation des pouvoirs ce mercredi, Jean-Michel Blanquer a indiqué qu’il voulait « redonner de la liberté aux acteurs ». Un décret le permettant devrait être publié cet été.

Une carte blanche qui pourrait poser des problèmes concrets. 20 Minutes analyse les conséquences de ces différents scénarios.

1) Les hics à terme pour les communes qui garderont les quatre jours et demi et les activités périscolaires

« Cela devrait être le cas de la majorité des communes, au moins jusqu’à la rentrée 2018, voire celle de 2019. Car la rentrée 2017 est déjà préparée, les animateurs ont déjà été embauchés et les budgets sont déjà provisionnés », explique Agnès Le Brun, vice-présidente de l’Association de maires de France. « Les mairies qui ont trouvé un fonctionnement ne changeront pas de principe pour le moment. D’autant que les rythmes scolaires ne sont plus un sujet. Les maires sont actuellement plus préoccupés par la question de l’exonération de la taxe d’habitation pour de nombreux contribuables promise par Emmanuel Macron », renchérit Vanick Berberian, président de l’association des maires ruraux.

Reste que les maires qui veulent garder les rythmes tels quels vont devoir se poser rapidement des questions, car Emmanuel Macron a laissé entendre que le fond d’amorçage qui vient en aide aux communes pour financer les activités périscolaires, serait garanti jusqu’en 2019. Mais après cette date, il pourrait être maintenu uniquement pour les communes les plus pauvres. « Or, sans aide de l’Etat, les communes ne parviendront pas à proposer d’activités. D’autant qu’actuellement l’aide de l’Etat (50 euros par élève et par an et 90 pour les municipalités les plus pauvres) ne nous permet pas de couvrir tous les frais engagés (240 euros en moyenne par élève et par an). D’ailleurs, selon une enquête de l’AMF réalisée en 2016, une commune sur trois demande une participation financière aux familles », indique Agnès Le Brun.

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« On peut craindre qu’à terme, les communes riches garderont les nouveaux rythmes et les activités périscolaires, alors que les plus pauvres les supprimeront. Cela va encore accroître les disparités entre les territoires », s’inquiète Francette Popineau, porte-parole du SNUipp-FSU. Dans une lettre adressée vendredi à son successeur, l’ex ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, le mettait d’ailleurs en garde contre le « creusement d’inégalités » d’un territoire à l’autre, que pourrait entraîner ce projet.

2) La grogne prévisible des parents pour les villes qui choisiront les quatre jours et demi sans les activités périscolaires

Cela pourrait être la tentation des villes qui reconnaissent les bienfaits pédagogiques pour les élèves d’une demi-journée de classe en plus (le mercredi ou le samedi matin) pour apprendre, mais qui veulent ou doivent faire des économies.

« Cela aboutirait à détruire des emplois d’animateurs, ce qui aurait une incidence néfaste pour le climat social de la commune », souligne Francette Popineau. Par ailleurs, les enfants auraient forcément plus de temps « morts ». « Si c’est pour proposer de la garderie à partir de 15h jusqu’à 16h30, voir jusqu’à 18h pour les enfants qui restent à l’école après la classe, nous sommes totalement contre », s’indigne Liliana Moyano, présidente de la FCPE.

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3) Des critiques à prévoir pour les communes qui reviendront à la semaine à quatre jours

« Cette option pourrait être prise par les mairies les plus en difficultés qui veulent faire des économies de personnels, de chauffage et de transports scolaires », analyse Vanick Berberian. Cela pourrait être notamment le cas de certaines communes situées en montagne, ou en zone rurale.

Mais cette hypothèse fait bondir Stéphane Crochet, secrétaire général de l’Unsa : « Ce serait dommageable aux élèves les plus fragiles, car on sait qu’ils apprennent mieux le matin et qu’une matinée de classe en plus leur est bénéfique », affirme-t-il. « Cela conduirait à rallonger la journée d’école des enfants alors que depuis des années tous les chronobiologistes dénoncent ce rythme », renchérit Liliana Moyano.

Et il n’y a pas que les enfants qui en pâtiraient selon elle : « Les parents ont dû réorganiser leurs temps professionnels et personnels en 2013 pour s’adapter à la nouvelle organisation des temps scolaires. Et alors qu’ils ont trouvé un équilibre, on bouleverserait encore leur quotidien », poursuit la présidente de la FCPE.

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Autre conséquence, selon Agnès Le Brun : « on a demandé au réseau associatif qu’il se réorganise afin de déployer les activités proposées le mercredi matin avant 2013, sur les autres jours de la semaine. Et là on lui demanderait encore de faire machine arrière. Détricoter une réforme c’est aussi difficile que de la mettre en œuvre », insiste-t-elle.

Certaines communes pourraient aussi décider de conserver la semaine de quatre jours et demi en primaire, mais de revenir à celle de quatre jours en maternelle. « Car la sieste des petits a été tronquée avec la réforme des rythmes scolaires. Et les enseignants les trouvent fatigués et moins disponibles pour les apprentissages », note Francette Popineau. « Mais comment feront alors les parents qui ont un enfant en maternelle et un autre en primaire ? Ce sera un vrai casse-tête d’agenda pour eux », s’enflamme Liliana Moyano.

La FCPE a d’ailleurs prévenu dans une lettre adressée à Emmanuel Macron le 11 mai : « Si la semaine d’enseignement dans le 1er degré devait revenir à 4 jours, nous appellerons les parents à se mobiliser sur l’ensemble du territoire dans l’intérêt de leurs enfants ».