Double meurtre de Montigny-lès-Metz: Les «probabilités» et l'absence de preuves du procès Heaulme
PROCES•Après trois semaines d'audience, la cour d'assises de la Moselle va entendre cette semaine les plaidoiries et les réquisitions avant de rendre son verdict, jeudi...Vincent Vanthighem
L'essentiel
- Francis Heaulme est jugé pour le double meurtre de Montigny.
- Le verdict doit être rendu, jeudi 18 mai, après un mois de procès.
- Le tueur en série encourt une nouvelle peine de prison à perpétuité.
De notre envoyé spécial à Metz
Francis Heaulme est un excellent joueur d’échecs. Un de ses anciens codétenus l’a confié, jeudi, à la cour d’assises de la Moselle qui le juge pour le meurtre de deux enfants, commis à Montigny-lès-Metz en septembre 1986. Blême, tremblotant dans son box vitré, le « Routard du crime » n’en est pas moins lucide sur ses forces et faiblesses dans cette partie judiciaire qui a débuté le 25 avril.
Sa principale force est connue depuis longtemps. Les faits remontent à plus de 30 ans. Il n’existe donc plus aucune preuve matérielle dans cette affaire irrésolue. Le gendarme Laurent Iltis a ainsi raconté, près de quatre heures à la barre, comment il avait recherché le wagon sur lequel figurait une trace de main ensanglantée, les vêtements des enfants tués et même le bocal contenant des excréments découverts sur la scène de crime. « J’ai fait chou blanc ! »
« Il ne fait pas bon croiser sa route cette année-là. »
Mais, bien assis face au box, les six jurés ont aussi eu, la semaine dernière, un aperçu des faiblesses de celui qui l’occupe. Évoquant sa « marque comportementale », son « répertoire », sa « quasi-signature criminelle », les « Experts Montigny » ont expliqué, à tour de rôle, que cette scène de crime sentait quand même le Francis Heaulme à plein nez.
L’un des enfants était déshabillé comme l’étaient la plupart de ses neuf victimes connues. Surtout, les deux victimes ont été massacrées dans un déchaînement de violence dont le « Routard du crime » était, à l’époque, coutumier. « Cette année-là, Heaulme est livré à l’alcool et à ses démons. L’histoire est en marche. Et il ne fait pas bon croiser sa route », résume le gendarme Francis Hans.
Le tueur en série a bien croisé la route des enfants
La cour d’assises sait bien que Francis Heaulme a « croisé la route » de Cyril Beining et d’Alexandre Beckrich, ce dimanche de 1986 où, d’après un témoin, il « faisait joli ». C’est le seul point que le tueur en série admet. « Montigny, c’est pas moi ! », répète-t-il comme un mantra, tout en reconnaissant être passé sur place le jour du drame et même avoir vu les cadavres des enfants.
« Est-ce que Francis Heaulme a le profil du tueur ? Oui. Mais doit-on le condamner sur la base de ses seules déclarations fantaisistes ? Non », a déjà commencé à plaider Alexandre Bouthier, l’un de ses avocats, sur les marches du palais de justice de Metz. Les aveux passés -ceux de Patrick Dils ou d’Henri Leclaire- ne valent plus rien. Il n’y a aucune certitude. Seules de nombreuses « probabilités ». C’est là-dessus que les jurés devront donc se fonder, jeudi, à l’heure de rendre leur verdict. En droit, on appelle cela « l’intime conviction ».
Suivez la suite du procès en direct cette semaine sur le compte Twitter @vvantighem