EDF et Areva avertis dès 2005 sur les dysfonctionnements du constructeur de la cuve de l’EPR de Flamanville
DYSFONCTIONNEMENT•Selon des documents que «Franceinfo» a pu consulter, Areva et EDF étaient au courant depuis 2005…Manon Aublanc
Franceinfo révèle ce vendredi qu’EDF et Areva connaissaient, avant la fabrication de la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche), les problèmes de qualité de l’usine Creusot Forge (Bourgogne) où a été fabriquée cette cuve. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avait déjà mis en garde les deux entreprises, qui avaient ignoré ces avertissements.
Le manque de solidité de la cuve démontrée
Fabriquée entre septembre 2006 et décembre 2007, la cuve a été installée dans le bâtiment réacteur en 2014. Pourtant, l’alerte a été donnée par l’ASN en 2005, soit un an avant la commande de la cuve. Dans un document, publié par Franceinfo, daté du 16 décembre 2005, l’ASN explique avoir constaté « de nombreux écarts concernant le forgeron Creusot Forge ». Une inspection fait suite à ce courrier, en avril 2006, durant laquelle l’ASN constate 16 irrégularités.
Ce courrier sera suivi d’une inspection du site en avril 2006 au cours de laquelle l’ASN dresse 16 constats d’écarts et irrégularités. Le 16 mai 2006, un nouveau courrier de l’ASN met en garde EDF sur « de nombreux incidents » qui entraînent « un nombre de rebuts importants » et demande des tests.
Areva n’a effectué ces tests qu’en 2014, lors de l’installation de la cuve dans le bâtiment réacteur. Les résultats tombent et le doute est confirmé : l’acier contient 0,3 % de carbone, alors que la limite tolérée se situe à 0,2 %. Une différence qui peut sembler minime mais qui suffit à rendre l’acier cassant. Sauf qu’un scénario d’une rupture de la cuve d’une centrale n’existe pas. Il n’y a pas pas de plan de secours.
Des falsifications dans les dossiers de fabrication
Areva, qui a racheté l’usine de fabrication de Creusot Forge en 2006, a interrompu la production de cette dernière en 2016. Cet arrêt fait suite à la découverte de certaines irrégularités dans les dossiers de suivi de fabrication, qui s’apparenteraient à des falsifications, selon l’ASN.
Cette année, le groupe a annoncé qu’il allait investir plus de 8 millions d’euros dans l’usine du Creusot. L’ASN a pourtant estimé fin janvier,à la suite d’une inspection du site, que les mesures de contrôle devaient être améliorées. L’ASN devra également se prononcer en septembre sur la cuve de l’EPR et dire si, malgré ses défauts, la pièce est bonne pour le service. Le parquet de Paris a ouvert une enquête en décembre.