Education positive: Comment devenir un parent bienveillant?
EDUCATION•Des experts de la parentalité positive délivrent quelques conseils pour y parvenir…
Delphine Bancaud
Débat sur l’interdiction de la fessée, parents déboussolés par leurs difficultés relationnelles avec leurs enfants… L’éducation bienveillante et la parentalité positive ont le vent en poupe. 20 Minutes a interrogé quelques experts du sujet pour savoir quel est le chemin à emprunter lorsque l’on veut rompre avec une forme d’éducation traditionnelle, fondée sur l’autoritarisme.
Etablir des règles en impliquant l’enfant positivement
Definir des règles de la vie familiale et les formuler clairement est essentiel pour aider l’enfant à se construire et à apprendre le respect des autres. « Il faut avant tout veiller à avoir un discours cohérent avec son conjoint et éviter d’avoir des attentes contradictoires à l’égard de l’enfant », explique Arnaud Riou, auteur de Pour une parentalité bienveillante*. L’idéal étant de « donner des consignes plutôt que des ordres et de les formuler de manière positive, plutôt que lister les interdits », indique la psychologue, Isabelle Filliozat, auteur de J’ai tout essayé**. Un avis partagé par Arnaud Riou : « Il faut autant que possible passer par le plaisir, en faisant comprendre à l’enfant quel est son intérêt secondaire de respecter une règle fixée ».
Exemple : au lieu d’ordonner à un enfant de se brosser les dents, sous peine d’être privé d’histoire, il vaut mieux formuler les choses de manière positive, en lui disant « si tu te brosses les dents, on aura le temps de lire une histoire », conseille Charlotte Ducharme dans son ouvrage Cool parents make happy kids***.
Si les règles ne sont pas négociables avec l’enfant, il ne faut pas hésiter à lui donner le choix dans les modalités d’application, si cela est possible. Exemple : « Il est important pour toi de te reposer après le déjeuner, mais préfères-tu faire la sieste maintenant ou après avoir lu une histoire ? ». Et quand un enfant contrevient aux règles, « il vaut mieux lui dire stop plutôt que non », conseille Isabelle Filliozat. Et la bienveillance ne doit pas rimer avec laxisme : « Il faut être cohérent et ne pas revenir sur une règle que l’on a édictée sous prétexte que son enfant insiste pour ne pas la respecter », souligne Arnaud Riou. Dans la même logique, le parent doit lui-même montrer l’exemple. Car « le pouvoir de l’imitation est surpuissant », affirme Charlotte Ducharme.
Etre à l’écoute de son enfant
« Je recommande toujours aux parents qui travaillent, de se constituer une sorte de sas après le boulot, afin de vérifier qu’ils sont bien disponibles pour leurs enfants », conseille Arnaud Riou. Car être un parent bienveillant requiert des trésors de patience que l’on n’est pas toujours capable de trouver immédiatement.
Et même si le quotidien est lourd à gérer, il faut se ménager de bons moments familiaux, insiste Isabelle Filliozat : « Consacrer, ne serait-ce que dix minutes par jour de pleine disponibilité à votre enfant, pour le nourrir d’affection et de tendresse, vous assurera des soirées plus tranquilles », écrit-elle dans son livre.
Eviter les vexations
La base de la communication non violente est que le parent peut évidemment critiquer le comportement de son enfant, mais pas sa personnalité. En lui jetant par exemple, un « tu es méchant », quand il a commis une bêtise, qu’il pourrait interpréter comme un jugement définitif. Car de telles vexations vont finir par éroder sa confiance en lui. « On évite les mots blessants qui utilisent le jugement, comme "encore", "trop", "toujours". On évite aussi de s’attaquer à sa personnalité en utilisant le "tu" accusateur », insiste d’ailleurs Charlotte Ducharme dans son livre.
Autre conseil : ne pas jouer sur les peurs de l’enfant pour l’inciter à respecter une consigne. Exemple : au lieu de lui dire « dépêche toi, sinon je pars sans toi », mieux vaut lui expliquer que ses amis l’attendent à l’école.
Lâcher du lest sur ce qui n’est pas si important
Parfois, en tant que parent, on focalise sur des détails, on reprend son enfant pour des broutilles… Quitte à perdre de vue l’essentiel. « Il faut toujours se poser la question "en quoi cela me concerne ?", avant d’intervenir. Exemple : si un enfant met une chaussette jaune avec une rouge, est-ce bien la peine de le contraindre à en changer une ? », interroge Arnaud Riou. « Par ailleurs, il faut autant que possible, s’interroger pour déterminer si notre réaction est bien proportionnelle à l’action de l’enfant. Et si l’on réagirait pareil avec un adulte », ajoute-t-il.
Il faut aussi parfois arrêter de se battre pour le bien de l’enfant : « au lieu de lieu répéter dix fois à ma fille de mettre son blouson, il m’est parfois arrivé de la laisser expérimenter le froid par elle-même. Et elle a toujours fini par demander son vêtement », raconte Charlotte Ducharme.
Ne pas se braquer en cas de crise de l’enfant
« La plupart des transgressions d’un enfant sont liés à un stress. Le gronder avec véhémence va contribuer à augmenter son taux de cortisol. En revanche, parler avec lui, lui redonner de l’attachement, va l’apaiser et lui permettre d’exprimer la source de son malaise », explique Isabelle Filliozat. Un avis partagé par Arnaud Riou : « un caprice, ça n’existe pas. Si un enfant tape une crise, c’est parce qu’il est à bout de ressources pour s’exprimer. Derrière cela, se cache toujours un besoin de lien qu’il faut savoir décrypter ».
D’où l’importance d’inviter l’enfant à parler, quitte à reformuler son problème pour être sûr de l’avoir bien cerné. Et si l’enfant continue à réclamer une chose que l’on ne peut pas lui donner « il faut tenter de lui proposer une alternative », conseille Charlotte Ducharme.
aPrivilégier la réparation plutôt que la punition en cas de bêtise
« Il est important de laisser l’enfant observer les conséquences de son acte, de le laisser ressentir, par empathie, la douleur ou la tristesse qu’il a provoqué, plutôt que de lui faire payer sa faute par la punition », indique Charlotte Ducharme dans son livre.
« Il faut inciter l’enfant à réparer, en lui demandant de proposer une solution s’il le peut », ajoute Arnaud. Au lieu de se concentrer sur l’étendue de la tâche qu’il a faite sur le mur avec son feutre par exemple, il vaut mieux l’inviter à le nettoyer ou accepter son idée de faire un beau dessin pour la cacher.
Et si on s’énerve contre eux, ne pas laisser cette colère sans suite
Pas facile d’appliquer au quotidien les préceptes de l’éducation positive, surtout après une journée de boulot, lorsque l’on est fatigué ou contrarié. « Si l’on a crié ou dit des choses désobligeantes à l’enfant, il ne faut pas hésiter à lui dire pardon et à expliquer les raisons pour lesquelles on a eu une réaction vive », indique Charlotte Ducharme. Car qui dit parent bienveillant ne signifie pas parent parfait. « Mais un parent qui se pose des questions, qui se trompe parfois, mais qui essaye toujours de s’améliorer », insiste Arnaud Riou.