EDUCATIONPourquoi les écoles alternatives séduisent de plus en plus de parents

Montessori, Steiner, Freinet... Pourquoi les écoles alternatives séduisent de plus en plus de parents

EDUCATIONCes dernières années, les ouvertures de ce type d’établissements se multiplient car les parents sont de plus en plus enclins à faire ce choix éducatif pour leurs enfants…
Delphine Bancaud

Delphine Bancaud

L’école, oui, mais autrement. A la rentrée, l’ouvrage de Céline Alvarez qui vante une nouvelle approche éducative, inspirée de Montessori a remis un coup de projecteur sur les pédagogies alternatives et son succès a encore démontré l’intérêt des parents pour elles. Montessori, Freinet, Steinert-Waldorf, Decroly, écoles d’inspiration écologique, écoles démocratiques… Il existe une multiplicité d’établissements proposant une autre façon d’apprendre. S’ils brassent quantitativement peu d’élèves, force est de constater qu’ils sont de plus en plus demandés par les familles.

La preuve : pour répondre à la demande des parents, « à la rentrée 2016, 67 écoles alternatives hors contrat se sont ouvertes, la plupart étant des écoles Montessori et des écoles d’inspiration écologique », explique Constance Prazel, porte-parole de la Fondation pour l’école, qui promeut la liberté scolaire. Et la tendance ne date pas d’hier, comme l’observe Danièle Duvivier, administratrice de l’association Montessori France : « Depuis 5 ans, 10 à 20 écoles Montessori se créent chaque année ». Dans les grandes villes, comme à Paris, certaines de ces écoles pas comme les autres ont même des listes d’attentes.

Déçus du système scolaire traditionnel

« Ces écoles profitent du discrédit à l’égard des établissements traditionnels à qui l’on reproche des problèmes de discipline, des effectifs surchargés, une incapacité à prendre en compte le rythme de chaque enfant, la mise en place d’une concurrence anxiogène… », énumère Constance Prazel. Un avis partagé par Nicolas Go, maître de conférences en Sciences de l’éducation à l’université de Rennes-II : « Les parents prennent de plus en plus au sérieux le fait que leurs enfants ne vivent pas bien l’école traditionnelle. Ils estiment que le système est trop violent et veulent les en protéger », explique-t-il. « L’Education nationale leur apparaît comme un monstre froid où les enfants ne sont pas regardés dans leur spécificité. D’où leur engouement pour les écoles assurant un suivi personnalisé des élèves, ce qui n’existe pas dans les établissements publics traditionnels », ajoute Phlippe Meirieu, professeur en sciences de l’éducation.

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Outre le développement de la parentalité positive ces dernières années, qui explique cette aspiration croissante des parents de trouver des solutions pédagogiques personnalisées pour leurs enfants, plusieurs autres facteurs ont favorisé l’intérêt pour les pédagogies alternatives, souligne aussi Marie-Laure Viaud, maître de conférences en Sciences de l’éducation à l’université d’Artois : « Céline Alvarez a fait bouger les lignes. Elle a montré qu’on peut enseigner autrement en maternelle et obtenir des résultats. Les films comme Etre et devenir et Alphabet ont aussi remis en question un système éducatif axé uniquement sur les notes et la compétition ». Mais ce n’est pas tout : « Ces écoles répondent aussi à la demande des parents dont les enfants sont en difficulté dans les écoles traditionnelles et qui cherchent une solution pour qu’ils reprennent confiance en eux », constate Peter Gumbel, auteur de Ces écoles pas comme les autres*. « Nous accueillons par exemple de 10 à 20 % d’enfants handicapés dans nos classes », explique Danièle Duvivier qui est également directrice d’une école Montessori à Maurepas (Yvelines).

Un va-et-vient entre les différents types d’établissements

Et s’il y a quelques années, les parents hésitaient à inscrire leurs enfants dans une école différente, de peur qu’ils ne soient pas capables de s’adapter à un autre système ensuite, cela ne semble plus être le cas aujourd’hui : « il y a désormais une certaine porosité entre le public et le privé. Les parents n’hésitent plus à passer de l’un à l’autre », observe Constance Prazel. Les enfants inscrits dans une école Montessori par exemple, y reste généralement jusqu’à 6 ans, avant de basculer dans le public. Un passage d’un système à l’autre qui ne semble pas poser de problème à long terme : « Plusieurs chercheurs se sont intéressés au devenir des élèves qui étaient entrés au collège classique, après avoir été inscrits dans une école alternative. Et les résultats de ces études montrent qu’ils mettent quelques mois à s’adapter. Mais après cette phase de démarrage, ils parviennent à bien s’integrer, car ils sont outillés par faire face à des situations déroutantes.. Au final, les élèves des écoles alternatives ont des acquis scolaires aussi bons, voire meilleurs, que ceux des écoles standard, notamment grâce à leurs méthodes de travail (savoir s’organiser, être autonome, savoir rechercher des informations…)», indique Marie-Laure Viaud.



Écoles alternatives : une voie à suivre ?

Même son de cloche chez Peter Gumbel : « Lorsqu’ils arrivent dans le système scolaire classique, ils connaissent généralement des débuts compliqués, car ils sont habitués à être libres de leurs mouvements et à choisir leurs activités, ce qui n’est plus possible dans une école classique. Mais ils ont davantage confiance en eux et ont une facilité à communiquer qui leur permet de trouver leur place rapidement. Et ceux qui ont des failles dans certains domaines académiques, rattrapent vite leur retard ». Si l’on regarde encore plus loin, les anciens élèves des écoles différentes ne réussissent pas moins bien que les autres dans l’enseignement supérieur. C’est ce que montrait la thèse de Rebecca Shankland, soulignant que leur autonomie, leur facilité relationnelle et leur confiance en soi étaient de précieux atouts pour leurs études.

Une tentation qui n’est parfois pas suivie de passage à l’acte

Mais si cet engouement pour ces écoles alternatives est bien réel, certains parents renoncent quand même à sauter le pas pour y inscrire leurs enfants. Notamment pour des raisons financières, car la majorité de ces écoles étant hors contrat, les frais de scolarité y sont très élevés. « Il faut compter 300 euros par mois en province et 600 euros à Paris », indique ainsi Marie-Laure Viaud. « Pour favoriser la mixité sociale, certains établissements proposent des tarifs en fonction du quotient familial », tempère Danièle Duvivier.

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Par ailleurs, bien que séduits par la pédagogie proposée, des parents redoutent l’effet « cocon », comme le souligne Philippe Meirieu : « Un certain nombre de ces écoles peuvent devenir des ghettos idéologiques et sociaux, ce qui ne rend pas service à terme aux enfants », indique le pédagogue. Enfin, la plupart de ces écoles étant hors contrat et s’autofinançant, leur viabilité à long terme n’est pas garantie, ce qui peut inquiéter certaines familles.

* Peter Gumbel, Ces écoles pas comme les autres, La librairie Vuibert, 2015, 19,90 euros.