Terrorisme: «Cette cérémonie crée une cohésion entre les victimes et avec la nation toute entière»
REPORTAGE•«20 Minutes» a assisté ce lundi à la cérémonie d'hommage national aux victimes du terrorismes qui s'est déroulée aux Invalides à Paris...Laure Cometti
Deux cents trente noms égrenés un à un. Dans un silence solennel, les victimes d’attentats ont été nommées par leurs proches dans le jardin des Invalides arrosé d’une pluie fine mais persistante, lors de la cérémonie d’hommage national aux victimes du terrorisme qui s’est déroulée ce lundi à Paris.
230 noms de victimes lus dans le jardin des Invalides
Cette cérémonie, organisée depuis 1998 par des associations, a cette année un écho différent. Les années 2015 et 2016 ont été de l’histoire de la France en matière de terrorisme. Conséquence concrète et poignante : la lecture des noms des victimes assassinées entre le 19 septembre 2015 et ce lundi n’aura jamais été aussi longue.
Il a fallu un peu moins d’une demi-heure pour égrener les noms des citoyens français ou étrangers tués sur le sol français (lors le 13 novembre 2015, de , de le 14 juillet 2016 et de l’attaque de le 26 juillet dernier) et des ressortissants de l’Hexagone tués à l’étranger (lors des attaques terroristes de Ouagadougou le 15 janvier 2016, Grand-Bassam le 13 mars 2016, Gao le 31 mai 2016).
Auparavant, des proches de victimes, des rescapés et des membres d’associations se sont succédés à la tribune et ont livré des discours personnels, évoquant le souvenir des disparus, la condition de victime ou la lutte contre le terrorisme. D’abord , tuée au Bataclan, et président de l’association 13 novembre : fraternité et vérité, puis Arthur Denouveaux, rescapé du Bataclan et vice-président de l’association Life for Paris, Maverick Touati, président de l’association des victimes de Ouagadougou (Burkina Faso), Chloé Arnaud, pour les victimes de Grand Bassam (Côte d’Ivoire).
Un rescapé français de l’attentat de Gao (Mali) a également pris la parole.
Le a particulièrement frappé l’assistance. La jeune femme de 21 ans, qui a perdu trois membres de sa famille le 14 juillet dernier à Nice, a rendu hommage à sa famille et à sa ville d’une voix émue, avant d’appeler à « éviter les amalgames » et d’interpeller le chef de l’Etat : « Soyons une seule communauté dans nos valeurs communes, comme dans nos différences. »
Une tonalité politique ?
L’assemblée était quelque peu clairsemée. Les équipes techniques retiraient d’ailleurs quelques chaises juste avant le début de la cérémonie. Pierre-Étienne Denis, président de la Fédération nationale des victimes d’attentats et d’accidents collectifs (Fenvac, qui co-organisait l’événement), a d’ailleurs eu quelques mots pour les « absents » : « les blessés, ceux qui n’ont pas pu venir aujourd’hui, ou qui n’ont pas voulu venir. »
Si les organisateurs attendaient environ 700 personnes, seules quelque 300 à 400 étaient présentes, y compris des journalistes, les membres du gouvernement et les associations ainsi que quelques personnalités politiques de l’opposition, parmi lesquelles Nicolas Sarkozy, au premier rang à côté du Premier ministre Manuel Valls, Alain Juppé, François Fillon et François Bayrou.
François Hollande, qui avait déjà assisté à cet hommage annuel en 2012, année des tueries de Mohamed Merah, a d’ailleurs conclu la cérémonie par un discours empreint de compassion pour les victimes mais également riches en promesses de répression contre le terrorisme. Il a souligné la création, sous son mandat, du Secrétariat d’Etat chargé de l’aide aux victimes et a également annoncé des victimes, répondant à une requête formulée de longue date par les associations.
« La cérémonie était sobre, comme il fallait »
A la fin de la cérémonie, alors que résonnaient les premières notes de l’hymne international aux victimes du terrorisme (composé après les attentats de Madrid en 2004), les victimes ont quitté par grappes la place Vauban, l’air ému et presque soulagé. « C’était très dur, en particulier la lecture des 230 noms », note Alexis Lebrun rescapé du Bataclan. « Les discours étaient beaux et différents. La cérémonie était sobre, comme il fallait », estime-t-il.
« Ces noms, on a l’impression de les connaître. C’est important de les égrener, ça donne une identité aux victimes », dit Catherine Orsenne, la gorge nouée. « Cette cérémonie est très importante, elle crée une cohésion entre les victimes, mais aussi avec toute la nation », poursuit cette femme blessée près du Stade de France le 13 novembre 2015, qui a appris le 14 juillet dernier qu’elle ne serait pas indemnisée malgré trois mois d’arrêt du travail. « L’hommage national permet aussi de faire bouger les choses pour les victimes. » Comme d’autres victimes, elle espère que l’Etat et la nation sauront mieux entendre sa voix.