SOCIETEComment financer l’islam de France?

Comment financer l’islam de France?

SOCIETEFrançois Hollande a balayé l’idée d’un financement public…
Audrey Chauvet

A.Ch.

Il n’y aura pas de fonds publics dans la future Fondation de l’islam de France qui devrait voir le jour. Destinée à mieux maîtriser le financement des mosquées en France, notamment la construction des lieux de culte musulmans, cette Fondation ne recevra pas d’argent public, a indiqué ce mardi François Hollande, allant ainsi à l’encontre de ce qu’avait laissé entendre Manuel Valls, mardi, dans Libération. Mais d’où pourront provenir les fonds qui seront alloués à cette fondation ?

Un financement public alternatif ?

Le financement public d’un culte est interdit par la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat. Mais le Premier ministre, qui souhaite interdire les financements étrangers de l’islam en France, semblait ouvert à l’examen « des possibilités » de financement public en restant dans le cadre de cette loi. « Toucher à la loi de 1905 ouvrirait un débat très périlleux mais nous devons passer en revue toutes les solutions, sans nous interdire une forme de financement public, et assurer à travers la Fondation [pour l’islam de France] une transparence totale des dons et financements privés », expliquait Manuel Valls.

Un exercice d’équilibriste qui a été vivement critiqué par les élus Républicains : « Nous avons hélas vécu des années de compromission où (…) des municipalités de gauche et de droite finançaient en réalité des lieux de culte. C’est au fond une sorte de reconnaissance d’une situation communautariste et l’abandon d’une exigence très forte d’intégration à la française », a réagi Hervé Mariton. « J’entends qu’il puisse y avoir la nécessité de se dire qu’un financement public permettrait de régler un certain nombre de choses (…). En même temps dans la situation financière dans laquelle est la France (…), ça me paraît une mauvaise idée », a estimé pour sa part Benoist Apparu. Les financements étrangers qui sont dans le viseur du gouvernement ne concerneraient qu'une vingtaine de mosquées en France, sur les quelque 2.500 que compte le pays, d'après l’Union des organisations islamiques de France.

Une taxe sur le halal

Parmi les idées qui ont émergé pour financer le culte musulman en France, une taxe sur les produits halal pourrait être envisagée. Il s’agirait de collecter une part des ventes de produits halal pour doter la Fondation pour l’islam de France. Julien Dray, conseiller régional PS d’Ile-de-France, ou François Bayrou, président du MoDem, ont notamment remis sur la table cette proposition qui avait été avancée pour la première fois par Nathalie Kosciusko-Morizet en décembre 2015.

Une « taxe halal » ne serait toutefois possible que s’il s’agit d’une « redevance, pour service rendu », mise en place par les « communautés » et le Conseil français du culte musulman (CFCM), c’est-à-dire les représentants du culte eux-mêmes, a estimé ce mardi sur RTL la sénatrice Nathalie Goulet, auteure d’un rapport sur l’organisation de l’islam en France.

Le financement par les fidèles

Forme de financement la plus classique, les dons des fidèles pourraient être la manière la plus simple de financer le culte musulman. Pour l’Eglise catholique, en France, ce sont les legs des paroissiens et le denier de l’Eglise qui représentent la principale source de financement. La quête lors des messes, les dons faits pour les enterrements, les mariages ou les baptêmes complètent le budget de l’Eglise qui, en France, a aussi une ressource non négligeable en cas de coup dur : la vente de biens immobiliers. L’islam de France pourrait s’inspirer de ces pratiques en demandant aux fidèles de contribuer à la construction de nouvelles mosquées. « Ce sont les fidèles qui doivent financer le culte, quel que soit le culte », a estimé Alexis Corbière, porte-parole de Jean-Luc Mélenchon.

D'après la mission d'information sénatoriale sur l'islam de France, les dons des fidèles musulmans représentent déjà 80% du financement des mosquées et atteignent un pic pendant le ramadan: certaines mosquées peuvent alors collecter jusqu'à un million d'euros.