Attentat dans une église près de Rouen: Les catholiques choqués vont prier pour la paix
TERRORISME•L’assassinat ce mardi matin d’un prêtre dans l’église de Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime) a ébranlé la communauté des fidèles…Audrey Chauvet
«Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent ». Ce mardi, les paroles de l’Evangile ont résonné différemment aux oreilles des catholiques de France. Après l’attentat, revendiqué par Daesh, contre un prêtre et les fidèles de Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime), la communauté des croyants se serre les coudes et compte sur la prière et la solidarité pour surmonter le choc de cette attaque.
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Recueillement aux JMJ
Pierre-Hugues est arrivé à Cracovie pour les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) en début de semaine. La « très bonne ambiance » qui régnait entre les jeunes catholiques du monde entier a été ternie ce mardi matin par l’annonce de l’attaque en France : « Nous nous sommes tous agenouillés devant la statue de Jean-Paul II et nous avons prié pour la paix », raconte le jeune homme.
Ce mardi après-midi, les jeunes choqués assisteront à la grande messe d’ouverture des JMJ, au cours de laquelle le meurtre du père Jacques Hamel sera dans tous les esprits. Les portables et les télévisions seront réduits au silence. « Nous sommes là pour vivre un moment fraternel, pas pour se morfondre devant BFM TV », estime Pierre-Hugues.
Ne pas laisser la peur s’installer
Alors que des millions de jeunes catholiques sont réunis à Cracovie, l’inquiétude pour la sécurité de ce rassemblement ne gagne pas ses participants. « Je suis impressionné par les moyens de sécurité sur place : il y a trois hélicoptères, des policiers, l’armée partout… On ne se sent pas en insécurité, même après ce qui vient de se passer », commente Pierre-Hugues.
Pour le père Christian Venard, aumônier militaire, les fidèles ne doivent pas « céder à la peur » : « On sait que les lieux de culte et les symboles catholiques sont des cibles potentielles. Des mesures ont été prises dans quelques diocèses pour des grandes manifestations mais on ne peut pas mettre de la sécurité devant toutes les églises », estime-t-il.
« Si demain on doit demander à des paroissiens de vérifier les sacs à l’entrée des églises, c’est triste mais on le fera si c’est nécessaire », ajoute le prêtre qui balaie d’emblée l’argument de la protection systématique des synagogues « bien moins nombreuses que les églises en France et dont la communauté juive est beaucoup plus ciblée par les terroristes ».
Inquiétudes pour le « vivre-ensemble »
Le père Venard, bien que très ému par la mort du prêtre, reconnaît que sa principale inquiétude porte sur les conséquences au-delà de la communauté des fidèles. « Ce n’est pas ce pauvre prêtre, qui avait déjà fait don de sa vie pour l’Eglise, qui intéressait les terroristes mais le symbole qu’il représentait : toucher une petite paroisse de Normandie, un vieux prêtre devant une poignée de fidèles, c’est une image presque bucolique de la France qui a été prise pour cible. lls cherchent à toucher notre pays dans des symboles très forts et notre réponse ne pas être de nature à diviser encore la société française car c’est ce qu’ils recherchent », explique le prêtre.
Côme, 25 ans, catholique pratiquant, partage la vision du prêtre : « J’ai peur que les gens tombent dans l’explication religieuse de l’attaque, c’est-à-dire dans un sentiment anti-islam », explique le jeune homme, dont la plus crainte est que toute la société française entre dans une spirale de haine. « Lors des attentats de novembre, je m’étais beaucoup identifié aux victimes car il s’agissait de jeunes Parisiens comme moi. Aujourd’hui, je pense que ce sont plutôt des gens comme mes grands-parents qui jusque-là se disaient seulement "C’est terrible" qui doivent être maintenant sens dessus dessous. »
« Ni pacifisme béat, ni vengeance »
Comment, dès lors, réagir en tant que catholique ? Les réactions véhémentes n’ont pas tardé à circuler sur Twitter, rapidement douchées par les prêtres eux-mêmes.
aCertains fidèles ont déjà prévu de se retrouver ce mardi soir pour des messes dédiées à la mémoire des victimes de ce nouvel attentat et de tous les autres attentats. Mais il faudra aussi rester « réaliste », estime le père Venard : « Il faut éviter le pacifisme béat autant que la vengeance. On ne peut pas honorer la mémoire d’un prêtre en faisant le contraire de ce à quoi il a cru toute sa vie. Les seules armes que possède l’Eglise sont celles de la prière, et c’est bien heureux qu’après des siècles de guerres elle n’en ait pas d’autres. En revanche, les gendarmes et les militaires que je vois en tant qu’aumônier ne peuvent pas me dire qu’ils n’ont d’autres armes que la prière… »