Attribution de HLM, mixité sociale des quartiers...Tout ce qui va changer avec le projet de loi égalité réelle
MIXITE SOCIALE•Le projet de loi égalité et citoyenneté, présenté au conseil des ministres ce mercredi, contient un volet logement ambitieux...Delphine Bancaud
Les quartiers de riches et de pauvres, des prioritaires Dalo (droit au logement opposable) qui n’obtiennent aucune offre de logement, des locataires du parc public qui restent alors qu’ils auraient les moyens désormais de se loger dans le privé. C’est à toutes ces situations que le volet sur le logement du projet de loi égalité et citoyenneté, présenté au conseil des ministres ce mercredi, veut s’attaquer. 20 minutes décortique ce qu’il pourrait changer, avec l’aide de Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre.
Les priorités d’attributions des logements sociaux mieux définies
Le texte vise à améliorer la transparence dans l’attribution des logements sociaux, avec l’obligation de rendre publics les critères de priorité (personnes en situation de handicap, mal logées, victimes de violences conjugales, chômeurs de longue durée, femmes menacées de mariage forcé). Ceux-ci seront désormais nationaux et imposeront que 25 % des attributions, hors des quartiers défavorisés, aillent aux 25 % des demandeurs de logements sociaux aux ressources les plus modestes - contre 19 %. Si les objectifs ne sont pas atteints, le maire se verra retirer le droit de choisir 25 % des familles entrant dans un logement social. C’est le préfet qui l’assumera à sa place. « L’intention de mieux assurer la priorisation des attributions est bonne, mais ces annonces ne garantissent pas pour autant que les ménages qui relèvent du Dalo soient mieux pris en compte, car les élus ont tendance à écarter leurs candidatures. C’est lors de la mise en œuvre concrète de cette mesure que l’on pourra en juger l’efficacité », estime Christophe Robert.
Les maires récalcitrants seront contraints de bâtir des HLM
Laloi SRU (Solidarité et rénovation urbaine) qui impose aux communes de plus de 3.500 habitants - 1.500 habitants en Ile-de-France -, de construire 20 % à 25 % de logements sociaux fera l’objet d’une application plus sévère. Les dispositions coercitives à l’égard des communes « carencées » en HLM sont durcies : leur contingent de logements sociaux sera automatiquement transféré au préfet et elles devront avoir 30 % de logements très abordables dans chaque opération de plus de 12 logements. Le préfet, qui usera de la préemption et délivrera des permis de construire, obligera la commune à financer toute opération de logement social qu’il aura décidée.
« J’applaudis des deux mains et le gouvernement est courageux d’avoir pris cette mesure », estime Christophe Robert. « Mais pour enfoncer le clou, il faudrait doubler le montant des pénalités financières pour les communes récalcitrantes », poursuit-il.
La liste des logements vacants devra être publiée
L’idée est de privilégier la « location choisie », permettant au demandeur de faire des demandes spécifiques pour les logements qui l’intéressent le plus. Pour ce faire, les bailleurs sociaux devront être plus transparents en publiant des données sur leurs immeubles et aussi, d’ici 2022, leurs logements vacants - afin que les demandeurs de logements puissent s’y porter candidats. « L’attribution et l’offre de logements sociaux sont jugées opaques par le grand public, donc renforcer la transparence est forcément souhaitable. Mais cet affichage ne résoudra pas la pénurie de logements sociaux et ne modifiera pas le volume d’offres disponibles » ; explique Christophe Robert. Par ailleurs, les personnes qui répondront ces offres de logements et qui ne verront pas leur dossier choisi risquent d’éprouver un fort sentiment de déception.
La mixité sociale dans un même immeuble sera favorisée
Pour éviter la concentration de populations pauvres dans des territoires déshérités, les bailleurs sociaux pourront au départ d’un locataire, baisser ou augmenter un loyer afin de « mixer les locataires dans les immeubles », suivant leurs niveaux de revenus. « L’objectif lutter contre la ségrégation spatiale est évidemment bon, mais reste à savoir si les bailleurs sociaux joueront le jeu. Dans les territoires accueillant peu de familles défavorisées, il faudrait aussi obliger les maires à capter des logements privés pour les louer à des tarifs sociaux », commente Christophe Robert.
Les locataires dépassant le plafond des revenus seront davantage incités à partir
Pour accroître le faible taux de rotation des logements HLM, alors que 1,8 million de ménages attendent un logement social en France, le surloyer demandé aux locataires dont les revenus ont augmenté au fil du temps, sera relevé.
Ceux dont les ressources dépassent de 150 % le plafond retenu pour l’attribution du logement HLM, contre 200 % aujourd’hui, devront partir dans les 18 mois et non plus 3 ans. « C’est une bonne chose que les bailleurs tentent d’intervenir sur les ménages qui se maintiennent dans le parc social alors qu’ils pourraient aller se loger dans le privé. Mais cette mesure aura un impact limité car en 2014, 0,3 % du parc social avaient des ressources dépassant de 100 % le plafond retenu pour l’attribution du logement. Soit 12.000 foyers », souligne Christophe Robert.