Procès du dentiste de l’horreur: «Je suis entrée pour un plombage, il m’a enlevé deux dents !»
ENTRETIEN•Nicole Martin préside le collectif des victimes du docteur Van Nierop, surnommé le « dentiste de l’horreur » et dont le procès pour « mutilations » s’ouvre, ce mardi, à Nevers (Nièvre)…Vincent Vanthighem
«Violences sur personnes vulnérables », « escroqueries », « faux en écriture » et surtout « mutilations ». Ce mardi, le Néerlandais Jacobus Marinus – dit Mark – Van Nierop doit être jugé par le tribunal correctionnel de Nevers (Nièvre). Surnommé le « dentiste de l’horreur », cet homme à la carrure de rugbyman est accusé d’avoir charcuté 120 patients autour de Château-Chinon.
Ils se sont tous rassemblés à l’initiative de Nicole Martin. Il a fallu plus d’un an à cette retraitée de l’enseignement pour comprendre qu’elle n’était pas tout seule à vivre un cauchemar en allant chez le dentiste. Elle raconte son histoire à 20 Minutes.
Comment vous êtes-vous retrouvée dans le cabinet du docteur Van Nierop ?
Tout a débuté en février 2011. A l’époque, mon dentiste était en vacances. Je suis donc allée chez le docteur Van Nierop parce qu’un petit plombage était parti d’une molaire. Arrivée chez lui, je me souviens d’un endroit grandiose. Tout était beau. C’était le luxe. On a commencé par me faire une radio panoramique et remplir un dossier médical. Cela semblait sérieux.
Comment se sont déroulés les soins ?
Il a commencé par me dire ‘’petit piqûre’’. Il parlait très mal français. Le temps que la piqûre fasse effet, il est allé s’occuper d’un autre patient. Et finalement, il est revenu. Sans me demander mon avis, il a dévitalisé la dent plombée. Et puis celle d’à-côté aussi qui était saine en me disant qu’il faudrait poser une couronne.
Vous y êtes donc retournée ?
Oui. Il a recommencé avec sa ‘’petite piqûre’’. C’était son expression favorite. Mon visage était endormi pendant cinq à six heures. Mais cette fois-là, quand ça s’est réveillé, j’avais des douleurs à me taper la tête sur les murs. La couronne posée était trop grande. Vous avez déjà porté des chaussures trop petites ? Imaginez. C’était le week-end de Pâques… J’ai dû attendre pour retourner le voir.
Que lui avez-vous dit ?
Je l’ai traité de tous les noms. Il a fini par enlever la couronne et la dent d’à-côté. Je suis entrée pour un plombage. Il m’a enlevé deux dents ! C’était une brute.
Pourquoi n’avez-vous pas cessé de le voir ?
Parce qu’il m’avait pris 900 euros pour cette couronne trop grande. Je voulais donc qu’il me rembourse. Ce jour-là, il m’a demandé ma carte vitale. Je n’ai appris qu’après qu’il avait réclamé 1.400 euros à ma mutuelle lors de l’opération. Pareil pour la Sécurité sociale, il a prétendu m’avoir administré 19 soins lors de la première visite qui avait duré 10 minutes… Comme j’ai râlé, il a proposé de m’offrir un dentier en dédommagement.
Vous en aviez besoin ?
Non. Mais j’y suis tout de même retourné. Il a commencé par me poser la pâte pour prendre l’empreinte de mes dents et il est allé s’occuper d’un autre patient. Je voyais bien que cela durait trop longtemps. Quand il est revenu, il était quasi impossible de m’enlever la pâte qui avait durci. En l’arrachant, il m’a déchaussé les dents du fond !
Comment les autres victimes se sont-elles réunies autour de vous ?
Un jour, j’ai posé la question à l’une des assistantes du docteur Van Nierop. ‘’Je suis la seule à qui il arrive des problèmes ?’’ Comme elle était intègre, elle m’a expliqué que non. Rapidement, on s’est retrouvés à cinq victimes. Et puis, nous avons fait passer une annonce dans le journal local. Cela a eu de l’effet. En quelques jours, 120 personnes se sont manifestées.
Qu’attendent-elles de ce procès ?
De pouvoir commencer à se reconstruire. Certaines ont la phobie du dentiste depuis et n’osent pas aller voir un professionnel pour corriger les bêtises du docteur Van Nierop. Et puis, il y a de vrais drames derrière cette affaire.Certains clients – et je dis bien ‘’clients’’ et non ‘’patients’’ – ont souscrit un emprunt pour payer le docteur Van Nierop. Et ont dû en souscrire un second pour faire les opérations de réparation.
Plus généralement, cela serait bien que les hautes sphères fassent désormais attention avec les déserts médicaux. Ce n’est pas parce que c’est le désert qu’il faut installer le premier venu. Parfois, il est préférable de faire vingt ou trente kilomètres en voiture pour consulter que de connaître des années d’enfer.