Affaire Jacqueline Sauvage: La grâce présidentielle, qu'est-ce que c'est?
JUSTICE•François Hollande doit recevoir, ce vendredi à 16h30, les enfants de Jacqueline Sauvage, condamnée en appel à dix ans de prison pour avoir abattu son mari violent…Vincent Vanthighem
La grâce, c’est « quand même une autre conception du pouvoir ». Ainsi parlait François Hollande, en 2012, alors qu’il faisait campagne pour accéder à l’Elysée. Le chef de l’Etat se retrouve, ce vendredi, coincé entre ses déclarations d’alors et une histoire qui bouleverse la France aujourd’hui. Celle de Jacqueline Sauvage.
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Condamnée en appel le 3 décembre à dix ans de prison pour avoir abattu un mari qui la battait et violait depuis quarante-sept ans, cette sexagénaire espère obtenir une grâce présidentielle. Ses enfants et ses avocats doivent rencontrer, à 16h30, le président de la République qui a simplement promis de les « écouter ». A cette occasion, 20 Minutes décrypte la procédure pour obtenir une grâce présidentielle.
- A quoi correspond la grâce présidentielle ?
Droit régalien des anciens rois de France, la grâce peut-être aujourd’hui accordée à « titre individuel » par le Président, comme le stipule l’article 17 de la Constitution. Elle s’apparente à une réduction ou une suppression de peine. Contrairement à l’amnistie qui correspond à une forme « d’oubli », la condamnation d’une personne graciée reste inscrite à son casier judiciaire.
- Qui peut demander à bénéficier d’une grâce ?
Seules les personnes définitivement condamnées par la justice peuvent réclamer une grâce. Le recours peut être formé par la personne condamnée elle-même, un membre de sa famille, un ami ou même par le Parquet. Il doit être adressé au président de la République.
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Les autorités rappellent que peuvent faire l’objet d’une grâce les personnes visées par une « peine privative de liberté, une peine patrimoniale (amende) ou une peine particulière (travail d’intérêt général par exemple) ». Cela ne concerne par le retrait total ou partiel de points de permis de conduire car il s’agit d’une sanction administrative et non d’une peine.
Source : Service Public
- Quelle est la procédure à suivre pour l’obtenir ?
Le recours est instruit par le procureur ou le procureur général (en cas de procès en appel) du tribunal qui a prononcé la condamnation. Le dossier est ensuite transmis à la Direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice qui présente un projet de décret au chef de l’Etat. Ce dernier n’a aucune obligation d’y donner suite. S’il accorde la grâce, ce décret – contresigné par le Premier ministre et le garde des sceaux est alors notifié directement à la personne condamnée. Il ne fait pas l’objet d’une publication au Journal Officiel.
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Est-elle souvent accordée ?
L’Elysée a fait savoir que François Hollande n’avait accordé qu’une seule grâce présidentielle depuis son accession à l’Elysée. Le bénéficiaire est l’ancien braqueur Philippe El Shennawy. Détenu pendant 38 ans dans 26 prisons différentes, il a bénéficié, avec cette grâce, d’une libération conditionnelle.
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« Il y en a peut-être d’autres, précise un avocat pénaliste à 20 Minutes. La grâce étant notifiée de façon discrète, on peut imaginer que d’autres condamnés l’ont obtenu sans que leur cas soit médiatisé. »
Qui sont les plus célèbres graciés de France ?
Comme François Hollande, Nicolas Sarkozy n’était pas coutumier de la procédure de grâce. En 2009, l’ancien chef de l’Etat avait tout de même fait parler de lui en accordant des remises de peine à une trentaine de détenus, parmi lesquels l’ancien préfet Jean-Charles Marchiani.
Jacques Chirac, en son temps, en a accordé un peu plus. Notamment celle d’Omar Raddad, condamné pour le meurtre de Ghislaine Marchal. Au début du siècle, Alfred Dreyfus avait également été gracié avant d’être totalement réhabilité.
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