Photos barbares de Daesh sur Twitter : Que risque Marine le Pen ?
DROIT•La présidente du Front National avait diffusé mercredi trois clichés illustrant la barbarie du groupe de Daesh sur son compte Twitter...R.S.
Un char d’assaut roulant sur un prisonnier. Un homme brûlé vif dans une cage. Et le corps d’un journaliste, James Foley, décapité. Ces cliché insoutenables ont été publié mercredi sur la timeline du compte Twitter de Marine Le Pen. La patronne du FN répondait à sa manière à Jean-Jacques Bourdin, l'animateur de BFM TV, qui avait fait un lien entre Daesh et le FN lors d'un entretien avec Gilles Kepel, évoquant un «repli identitaire» et une «communauté d’esprit». 24h après, seule la dernière image a été retirée par la patronne du FN, sous le coup d’une enquête du parquet de Nanterre pour « diffusion d’images violentes ».
Alors qu'elle avait contacté le service juridique de son parti, la candidate frontiste des régionales dans le Nord-Pas-de-Calais s’interrogeait mercredi sur les sanctions encourues pour avoir relayé ces photos. « Monsieur Cazeneuve va venir me mettre les menottes ? » En théorie, non. Mais selon Maître Viviane Gelles, avocate spécialiste en droit numérique, ces agissements dépendent de « plusieurs dispositions du code pénal ».
« Il y a la disposition de l’article 222-33-3 du code pénal qui interdit la diffusion d’images qui représentent des scènes de tortures ou de meurtre », témoigne l’avocate. Pour cela, elle encourt au maximum 5 ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende. La photo atroce de James Foley peut être concernée par cet article. La famille avait d’ailleurs indiqué son indignation et demandé le retrait du cliché, ce que Marine Le Pen a fait.
« Est-ce que @BCazeneuve va me poursuivre pour diffamation contre #Daech ? MLP — Marine Le Pen (@MLP_officiel) 16 Décembre 2015 »
« Une autre disposition du code pénal peut être invoquée. Elle concerne le fait de diffuser des messages violents auprès de mineurs. C’est l’article 227-24 du code pénal. » Pour cela la patronne du FN risque 3 ans de prison et encore 75.000 euros d’amende. Son message n’était pas expressément destiné à un public mineur mais à partir du moment où son compte est public, un public jeune a pu voir les images de barbarie diffusées.
« On est plutôt sur du sursis, des amendes »
Enfin, cette affaire peut potentiellement avoir un volet civil si la famille du journaliste monte au créneau. « On peut envisager quelque chose sur le plan du droit à l’image. Il y a une protection qui peut être invoquée par les parents, notamment si les clichés portent atteinte à la dignité de la personne. » Ce qui ne fait pas vraiment de doute dans le cas présent puisque l’image montrait le corps du journaliste désolidarisé de sa tête, posée sur son ventre.
L’avocate spécialisée précise enfin que les peines encourues sont des peines maximales, donc rarement appliquées. Devant un juge, son casier judiciaire, sa personnalité, peut être pris en compte. Dans ce genre de cas, « on est plutôt sur du sursis, des amendes. » Par ailleurs, l’intention réelle de la personne qui poste les photos sur les réseaux sociaux (dénonciation ou apologie de la barbarie) est un autre volet qui doit être dissocié des dispositions des articles de loi en question.