Sécurité sur les routes: Des entreprises privées vont-elles intervenir?
POLÉMIQUE•Bernard Cazeneuve a confirmé ce vendredi que des entreprises privées pourraient bientôt participer aux contrôles de vitesse...C.C.M
Va-t-on déléguer la surveillance des routes à des entreprises privées ? Manuel Valls avait lancé le dispositif début octobre dans le cadre du comité interministériel sur la sécurité routière. Bernard Cazeneuve l’a remis sur la table ce vendredi sur BFMTV. 20 Minutes fait le point.
Le gouvernement propose-t-il la même chose que Nicolas Sarkozy dans son « plan Sécurité » ?
Les propositions gouvernementales ne vont pas dans le même sens que celles présentée par Nicolas Sarkozy le 2 novembre dans Le Parisien. Le président du parti Les Républicains « souhaite que les concessionnaires d’autoroutes aient la charge de la sécurité ». Le délégué interministériel à la sécurité routière, Emmanuel Barbe, et le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, n’évoquent, eux, que la question des radars embarqués, présents majoritairement en dehors des autoroutes. Leurs déclarations font suite à un vote du Comité interministériel de la sécurité routière le 2 octobre, mettant en place un nouveau dispositif.
Quel est le dispositif voté par le Comité interministériel de la sécurité routière ?
Aujourd’hui, deux agents de la gendarmerie ou de la police sont présents à bord des véhicules contenant les radars embarqués. Les résultats des infractions qu’ils constatent sont envoyés au Centre automatisé de constatation des infractions routières, basé à Rennes, où un agent de la police judiciaire dresse les procès-verbaux.
Les deux agents présents à bord du véhiculent sont « surqualifiés » pour la tâche qui leur est attribuée, explique Emmanuel Barbe. Le nouveau dispositif vise à les remplacer par des réservistes de la gendarmerie, qualifiés et dont le parcours est connu mais aussi, « à terme » selon Bernard Cazeneuve, par des entreprises privées. Le délégué précise que la détermination de la vitesse maximale autorisée à un point donné de la route, aujourd’hui manuelle, sera automatisée. Le reste du processus restera lui inchangé.
Quel est l’intérêt du dispositif ?
Les contrôles à bord des véhicules avec radars embarqués sont chronophages, selon Bernard Cazeneuve. La délégation à la sécurité et à la circulation routières parle de son côté de « pertes », des agents expérimentés ne pouvant pas travailler sur des enquêtes du fait de leur présence sur les routes. Emmanuel Barbe rappelle également que les véhicules, très onéreux, ne roulent pas assez pour réaliser un nombre suffisant de contrôles, mais aussi pour être rentables.
Le ministre de l’Intérieur explique avoir aujourd’hui besoin des agents de police et de gendarmerie pour d’autres missions et insiste sur la nécessité « de concentrer les forces de sécurité sur le renseignement, la lutte contre le terrorisme, la maîtrise des flux migratoires et la sécurité publique ». La délégation, de son côté, affirme que les agents déchargés de ces patrouilles pourront être assermentés à d’autres missions de sécurité routière.
Le délégué interministériel à la sécurité routière, Emmanuel Barbe. - M/Libert/20 Minutes
Quand entrera-t-il en vigueur et combien de véhicules concerne-t-il ?
Une phase de test va être menée au 2e semestre 2016, rapporte Emmanuel Barbe, puis le dispositif sera mis en place progressivement dans toute la France à partir de début 2017. Il concerne 545 véhicules et les agents qui roulent en binôme, actuellement à hauteur de 2 heures par jour. Il n’a pas encore été décidé si une ou deux personnes rouleront désormais à bord, même si le délégué interministériel confie être pour le nombre de deux.
Quel dispositif d’encadrement est envisagé pour les sous-traitants ?
Emmanuel Barbe explique qu’il va falloir « créer une nouvelle profession pour encadrer le dispositif » : s’assurer « de l’honorabilité » des nouveaux personnels, du fait qu’ils ont tous leurs points sur leur permis, qu’ils sont en capacité d’assurer la mission… Un dispositif légal est aussi à prévoir. Mais il ne s’agit en aucun cas de « déléguer une attribution de la police judiciaire », insiste Emmanuel Barbe.
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Les syndicats ont néanmoins réagi vivement. Unité SGP-FO affirme par exemple que « la force publique ne peut être que la prérogative de l’Etat » et s’inquiète : « Si on ouvre la voie aux sociétés privées, se posera la question de leur pouvoir de coercition, de leur armement et d’un éventuel risque social voire démocratique ». Le syndicat se déclare « opposé au fait que soit externalisée l’exploitation des radars embarqués » car « au-delà du simple contrôle de la vitesse, d’autres paramètres comme la conduite dangereuse peuvent amener les agents à intervenir et seuls des policiers sont en mesure de le faire ».