Accident de Puisseguin: Le transport en car est-il dangereux?
TRANSPORT•Après la collision mortelle entre un camion et un autocar sur la route départementale 17, la question de la sécurité de ce type de transports se pose…Céline Boff
A Puisseguin, en Gironde, les épaves de l’autocar et du camion ont été évacuées de la RD-17. Reste la douleur pour les familles des 43 personnes décédées dans l’accident. Alors qu’Emmanuel Macron, le ministre de l’Economie, a libéralisé le transport en autocar, faut-il s’inquiéter d’une recrudescence de ces drames ? 20 Minutes fait le point.
Plutôt sûr pour les passagers…
En Europe, pour un milliard de kilomètres parcourus, 0,06 passagers se tuent lorsqu’ils empruntent l’avion, 0,13 lorsqu’ils choisissent le train, 0,20 lorsqu’ils optent pour le car, 3,14 quand ils se déplacent en voiture et 48,94 quand ils voyagent en deux roues motorisés, révèle l’Agence ferroviaire européenne. Si l’on se focalise sur la France, les autocars sont chaque année impliqués dans environ 200 accidents graves de la route, c’est-à-dire ayant blessé au moins une personne, selon l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière. Ils sont donc à l’origine de « seulement » 0,3 % des accidents corporels.
… Moins pour les autres usagers
L’an dernier, 33 personnes sont décédées dans un accident impliquant un car, mais « seulement » six d’entre elles étaient à bord de ces cars – les autres étaient donc des piétons ou voyageaient dans d’autres types de véhicules (deux roues, voitures, etc.). Plus généralement, un accident impliquant un car fait 1,9 blessé ou tué contre 1,3 pour les autres accidents de la route. Autrement dit, si les cars font peu de victimes parmi leurs utilisateurs, ils font plus de dégâts dans leur environnement.
Des véhicules de plus en plus équipés
Les cars sont équipés de matériaux incombustibles, d’un limiteur de vitesse, d’un système de coupe-circuit pour limiter les incendies, d’un extincteur, d’un chrono-tachygraphe – une sorte de boîte noire enregistrant notamment la vitesse et le temps de conduite – et même, depuis le 1er septembre dernier, d’un éthylotest antidémarrage. Certains intègrent également des systèmes de rectification de trajectoire en cas de franchissement de lignes. Quant au contrôle, il est fréquent : les cars passent des visites techniques tous les six mois.
Des conducteurs plutôt bien encadrés
Ils ont une formation initiale de 140 heures minimum. Outre la conduite, ils sont formés aux gestes de secours et aux procédures d’urgence. Depuis 2006, ces conducteurs ne peuvent pas rouler plus de 4h30 d’affilée et neuf heures par jour. Ils ne peuvent pas non plus dépasser les 100 km/h sur autoroutes. Ces mesures semblent porter leurs fruits : les chauffeurs d’autocars sont présumés responsables de 25 % des accidents graves, contre 59 % pour les conducteurs de voitures.
Des passagers à sensibiliser
Depuis 2003, les passagers doivent obligatoirement boucler leur ceinture de sécurité… à condition que leur siège soit pourvu d’un tel équipement. Ce qui est normalement le cas depuis le 1er septembre dernier. Reste que l’obligation du port de la ceinture n’est pas suffisamment respectée : l’an dernier, pas moins de 190.885 infractions ont été relevées. Elles donnent lieu à une amende salée : 135 euros, ramenée à 90 si le règlement s’effectue dans les trois jours. A noter que le conducteur d’autocar n’écopera d’aucune amende si un passager ne boucle pas sa ceinture, même s’il s’agit d’un enfant. Le port de la ceinture semble vital : sur les cinq dernières années, la moitié des passagers d’autocars tués n’en portaient pas.
La qualité des routes en question
« A force d’avoir mené des politiques qui visent à multiplier les autoroutes et les grands projets, on a petit à petit abandonné l’entretien et la qualité des routes secondaires », estime le député écologiste Noël Mamère. Et d’ajouter : « Si on accepte la multiplication des circulations par autocar sur des routes qui sont en mauvais état, on aura d’autres drames ». Si l’autocar de Puisseguin n’était pas un des « cars Macron », qui roulent surtout sur les autoroutes et sur les routes nationales, Dominique Bussereau, président de l’Assemblée des départements de France, s’inquiète lui aussi de la dégradation du réseau routier secondaire : « Lors de notre dernier congrès, plusieurs départements nous ont dit qu’ils allaient fortement baisser leur budget routier parce qu’ils doivent faire face à une baisse des dotations de l’Etat et qu’ils sont asphyxiés par leurs dépenses sociales du fait de la crise ».