Affaire Karachi: La justice valide le renvoi en procès de six personnes
AFFAIRE•Parmi les personnes renvoyées figure l'intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine...20 Minutes avec AFP
La cour d'appel de Paris a rejeté jeudi des recours de la défense et validé le renvoi en correctionnelle de six personnes dans l'affaire du financement de la campagne d'Édouard Balladur en 1995, dont son directeur de campagne Nicolas Bazire.
L'affaire dite de Karachi porte sur des soupçons de rétrocommissions sur des contrats d'armement avec le Pakistan et l'Arabie Saoudite ayant servi à financer la campagne de l'ancien locataire de Matignon. La décision de la cour d'appel peut encore être contestée par un pourvoi en cassation avant la tenue d'un procès.
Parmi les personnes renvoyées figurent l'intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine, Nicolas Bazire, aujourd'hui un des dirigeants de LVMH, Renaud Donnedieu de Vabres, qui était conseiller du ministre de la Défense François Léotard et Thierry Gaubert, alors membre du cabinet du ministre du Budget Nicolas Sarkozy.
La Cour de justice de la République) a aussi ouvert une enquête
Après trois ans d'investigations internationales, les juges Renaud van Ruymbeke et Roger Le Loire avaient acquis la conviction que 327 millions d'euros de commissions indues sur les contrats d'armement avaient été versés à un réseau d'intermédiaires qui n'avait pas eu d'utilité dans l'obtention des contrats.
Selon l'enquête, ce réseau a été imposé à la fin du processus, pour enrichir ses membres et financer la campagne d'Édouard Balladur par des rétrocommissions. Ziad Takieddine avait fini par concéder qu'il avait financé la campagne Balladur pour 6,2 millions de francs (moins d'un million d'euros), affirmant avoir été sollicité par Nicolas Bazire via Thierry Gaubert, ce que les deux hommes contestent.
En juin 2014, les juges avaient renvoyé les six personnes au tribunal. En parallèle, la Cour de justice de la République (CJR) a ouvert une enquête sur les responsabilités éventuelles d'Édouard Balladur et du ministre de la Défense de l'époque François Léotard.
Deux des personnes renvoyées, Nicolas Bazire et Dominique Castellan, patron au moment des faits de la branche internationale de la Direction des constructions navales (DCNI), avaient fait appel de leur renvoi en procès.
L'un des recours contestait la recevabilité dans ce dossier en tant que parties civiles des familles de victimes de l'attentat de Karachi, où 15 personnes avaient été tuées, dont onze ouvriers français de la Direction des constructions navales, le 8 mai 2002 dans l'explosion d'une voiture piégée.
«Les familles des victimes sont bien évidemment ravies de la décision rendue»
L'une des thèses envisagées, mais non démontrée, dans le volet terroriste est que l'attentat a eu pour cause l'arrêt du versement des commissions au Pakistan. Selon plusieurs sources proches du dossier, l'irrecevabilité des parties civiles a été rejetée par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris.
«Les familles des victimes que je représente, qui sont à l'origine de l'ouverture du volet financier, sont bien évidemment ravies de la décision rendue et dénoncent une stratégie de la défense qui n'a servi qu'à retarder l'ouverture du procès», a réagi Me Olivier Morice, l'un des avocats des familles.
«La question de la recevabilité» des victimes de l'attentat de Karachi »se posera devant le tribunal correctionnel. L'important, c'est que toutes les victimes puissent être présentes au procès», a de son côté commenté Me Marie Dosé, avocate de plusieurs parties civiles.
«Nous prenons acte de cette décision. La chambre de l'instruction n'a pas souhaité se plonger dans ce dossier et a préféré échapper à ses responsabilités. Nous ne pouvons que le déplorer», a réagi l'avocat de Dominique Castellan, Me Alexis Gublin. Il n'a pas indiqué si son client allait se pourvoir en cassation.