Le père du petit Mathis reste muet sur le sort de son fils
JUSTICE•Le père de l'enfant porté disparu depuis 2011 est jugé pour enlèvement et séquestration depuis ce lundi à Caen...20 Minutes avec AFP
Jugé aux assises pour l’enlèvement et la séquestration de son fils disparu à l’âge de 8 ans en 2011, Sylvain Jouanneau a beaucoup parlé de lui ce lundi, au premier jour de son procès à Caen (Calvados). Mais pas du petit Mathis.
Disparition de Mathis: Son père révélera-t-il ce qu'il a fait de son fils?
Pendant plus d’une heure trente, l'accusé a répondu aux questions de la cour d'assises sur son passé professionnel et amoureux. Chemise bleue claire, longue queue de cheval et barbe noires, l'homme, dont le casier judiciaire est vierge, a expliqué être devenu maçon après avoir été cadre dans une entreprise d’électronique, pour avoir du temps à consacrer à son fils. Il s’est dépeint comme quelqu’un de solitaire, mais qui s’est souvent senti « pas à sa place ». Il est revenu sur sa tentative de suicide lorsqu’il était étudiant et sur ses multiples séjours en hôpital psychiatrique.
« Jusqu'au-boutiste »
Sylvain Jouanneau, 41 ans, s’est décrit comme quelqu’un de « perfectionniste », répétant à plusieurs reprises qu’il aimait « aller jusqu’au bout », dans sa vie amoureuse ou professionnelle. Son frère de 32 ans l’a qualifié à la barre de « jusqu’au-boutiste, quitte à ne pas forcément écouter l’avis des autres ». Il a aussi évoqué la « haine », selon lui, de Sylvain Jouanneau vis-à-vis de Nathalie Barré, à qui il fut marié de 2003 à 2007, et une volonté de vengeance.
Le 2 septembre 2011, l'accusé était allé chercher son fils à l’école, conformément à son droit d’hébergement, mais il ne l’avait pas ramené à sa mère, Nathalie Barré, le dimanche 4 au soir comme il l’aurait dû.
Durant l’enquête, l'accusé a déclaré avoir confié Mathis à des personnes dont il affirme ne pas vouloir trahir la confiance en révélant où se trouve l’enfant. Il a évoqué en 2011 « des complices sûrs et puissants » et également (ses) « frères musulmans ». Sylvain Jouanneau s’est converti à l’islam lors d’une relation avec une Marocaine en 2006-2007.
Malgré les nombreuses recherches en France comme à l’étranger, y compris dans les milieux sectaires, l'enfant reste introuvable.
Une affaire « montée en épingle »
« Vous semblez intarissable à votre sujet, est-ce que vous allez parler autant de Mathis ? », a demandé Aline Lebret, l’avocate de Nathalie Barré, venue au procès avec une dizaine de proches. « Je ne suis pas venu ici pour répondre à la question que tous les journalistes ont mis en première page des journaux (…) “Où est Mathis aujourd’hui” », a répondu Sylvain Jouanneau.
« Mathis est victime de quoi ? », a-t-il d'ailleurs lancé à Me Lebret, qui soulignait que Mathis était partie civile via sa mère lors de ce procès. « Trois ans et demi sans ses proches », a rétorqué l’avocate. « Ça vous pose un problème ? », a répliqué Sylvain Jouanneau. Il a aussi expliqué à la cour reconnaître des faits de « soustraction de mineur », mais « nier » l’enlèvement et la séquestration, avant d’affirmer que l’affaire était « montée en épingle ».
Le père de Mathis a été arrêté seul, le 9 décembre 2011, près d’Avignon (Vaucluse). Il est depuis en détention provisoire.
« Percevez-vous la gravité de votre comparution ? », a demandé l’avocat général, Pascal Chaux. L’accusé, qui encourt trente ans de prison, est d'abord resté silencieux, puis a lâché : « Non ». « C’est un des nombreux silences que vous avez eus depuis le début de l’instruction dès que les questions deviennent embarrassantes », a commenté le magistrat. Le procès doit a priori durer quatre jours.