Sanctions, profils des auteurs, cimetières visés: Les profanations de cimetières décryptées
CIMETIERES•«20 Minutes» fait le tour de la question en cinq points...Céline Boff
Et de cinq. En moins d’une semaine, cinq cimetières ont été profanés: ceux de Sarre-Union (Bas-Rhin) et de Tracy-sur-Mer (Calvados), mais aussi ceux de Saint-Béat (Haute-Garonne), de Challans (Vendée) et d’Issoudun (Indre). Face à cette poussée, 20 Minutes fait le point sur toutes les questions que vous pouvez vous poser.
Le nombre de profanations progresse-t-il?
Difficile de répondre dans la mesure où ces faits ne sont pas toujours suivis d’un dépôt de plainte et qu’ils ne sont pas présentés de manière isolée dans les statistiques des services de police et de justice. Ceci dit, d’après un rapport remis en novembre 2011 par l’ex-député UMP Claude Bodin, la réponse serait plutôt positive. En tout cas, entre 2008 et 2010, les profanations dans les cimetières sont passées de 151 à 233 actes. Sur les dix premiers mois de 2011 toutefois, ces faits diminuaient (181 actes). Malgré tout, au regard de l’ensemble des délits, les profanations sont marginales et elles portent surtout sur les biens plus que sur les corps des défunts.
Quels sont les cimetières les plus touchés?
D’après le rapport parlementaire, en 2010, sur les 233 cimetières profanés, 214 étaient chrétiens, 12 israélites et 7 musulmans. En valeur absolue, les sites chrétiens étaient donc les plus touchés, mais en pourcentage, les sites musulmans sont les plus frappés (2,85% des cimetières), devant les sites israélites (2,8%) et chrétiens (1,30%). «Notre rapport démontrait qu’il y avait une progression des actes contre les cimetières musulmans et surtout, juifs», insiste Claude Bodin. Côté régions, les profanations sont surtout réalisées dans les cimetières ruraux du Nord-Pas-de-Calais, de la Picardie, de la Lorraine et de l’Ile-de-France.
Quel est le profil des profanateurs?
«Nous avons affaire à trois sortes d’auteurs», répond Claude Bodin. Primo, les «satanistes» –ils sont clairement les moins nombreux. Secundo, les «politiques», dont les profanations ont un caractère raciste. Tertio, et ils sont les plus nombreux, les «désœuvrés», qui agissent pour des motifs plus troubles. D’une manière générale, «ces personnes passent à l’acte le plus souvent en groupe et suite à une consommation excessive d’alcool», décrypte Claude Bodin. Et la majorité des auteurs sont des mineurs.
Que risque un profanateur?
En théorie, un an de prison et 15.000 euros d'amende. Si la profanation s’accompagne d’atteinte à l’intégrité du cadavre, la peine est portée à deux ans de prison et 30.000 euros d’amende. Enfin, si la profanation a été commise «en raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, des personnes décédées à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée», la peine est de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende. En pratique, sur les 26 condamnations prononcées en 2009, 10 étaient des jugements d’emprisonnement (dont deux cas de prison ferme), un jugement avait prononcé une mesure de substitution, quatre, une dispense de peine et 11, des mesures et sanctions éducatives.
Pourquoi les profanations choquent tant?
«Elles choquent en tout cas plus qu’autrefois, d’abord parce qu’elles sont souvent beaucoup violentes, comme à Sarre-Union, où elles ont atteint une échelle quasi industrielle», répond Maxime Cumunel, délégué général de l’Observatoire du patrimoine religieux. D’après lui, «nous vivons dans une époque troublée par les conflits religieux. L’opinion est donc plus sensible à ce qu’elle considère être une atteinte à un élément qui relève de l’identité. Sans compter que, s’en prendre aux morts, c’est s’en prendre au symbole du passé». Si le caractère antisémite est prouvé dans les profanations de Sarre-Union, Maxime Cumunel pense toutefois que ces actes sont le plus souvent commis par «des jeunes qui souhaitent faire parler d’eux. Ces profanations relèvent davantage d’une attaque contre le sens civique que contre l’appartenance religieuse».