Swissleaks: Qui est Hervé Falciani, par qui le scandale est arrivé?
PORTRAIT•Décrit tantôt comme le Snowden de la fraude fiscale, tantôt comme un séducteur qui aime l'argent, Hervé Falciani rejoint le parti espagnol Podemos...A.B. avec AFP
L'informaticien Hervé Falciani, dont les fichiers de la banque HSBC ont permis à un consortium de journalistes mené par Le Monde de dévoiler un immense système d'évasion fiscale européen, est un héros chez les lanceurs d'alerte de la finance mondialisée.
«Il est courageux. Nous pensons le plus grand bien du travail d’Hervé Falciani, quelles qu'aient pu être ses motivations, il a servi le bien public», a déclaré le vice-président de l'association française Anticor, Eric Alt, qui lutte contre la corruption et l'évasion fiscale.
«L'homme qui fait trembler les riches»
Feu follet du «SwissLeaks», poursuivi par la Suisse, protégé par la France et l'Espagne, cet élégant franco-italien de 42 ans qui vit entre la France et l'Espagne, a commencé comme employé de casino à Monaco au début des années 90, puis est devenu informaticien de la banque HSBC en 2000, d'abord à Monaco, puis à Genève en 2005.
Le parcours rocambolesque de celui que la presse française surnomme le «Snowden de la fraude fiscale» ou «l'homme qui fait trembler les riches» est digne d'un roman d'espionnage tel que raconté par l'un des journalistes du Monde, Gérard Davet, coauteur de l'enquête publiée lundi.
«Il avait obtenu l'accès à des données cryptées qui n'ont plus été cryptées pendant un court moment. Il se les procure puis essaie de partir avec sa maîtresse pour les vendre au Liban, ça ne marche pas. Il revient en Suisse, qui veut l'arrêter, le met sur écoutes, il s'en rend compte, mais au même moment il est en relation avec les services secrets français, il se réfugie en France et décide de se transformer en lanceur d'alerte. Il transmet ses fichiers au fisc français», a expliqué Gérard Davet sur France Inter lundi.
Le lanceur d'alerte a même fait quelques mois de prison en Espagne à la demande de la justice suisse, avant de finalement collaborer avec les autorités espagnoles qui lui accordent une protection policière ainsi qu'avec la France. Les deux pays refusent de l'extrader vers la Suisse qui le recherche pour «soustraction de données» et «violation du secret bancaire et du secret commercial».
Pour la Suisse, Falciani est «séducteur et pragmatique»
La presse suisse met, elle, en avant «les bisbilles» d'Hervé Falciani avec son employeur «au sujet de son salaire», certains articles s'attachant à le décrire comme «séducteur» et «pragmatique», en récusant le portrait «idéaliste» fait de lui en France.
En France, en échange d'un salaire de 3.500 euros par mois, l'informaticien aide depuis quelques mois à «transmettre l'innovation» entre l'administration fiscale et l'Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique) où il a travaillé comme chercheur pendant des années.
Lors de son audition devant le Sénat français le 16 juillet 2013, Hervé Falciani estime qu'il représente «une menace pour le bien le plus précieux des banques privées: leur réputation» et se déclare «menacé», en réclamant un soutien «étatique» à son combat.
Hervé Falciani estime que «la fraude fiscale est le résultat d'une volonté, pas d'un hasard». «C'est une organisation, une industrie» ajoute-t-il dans L'Obs en juin 2014.
Embauché par le parti espagnol Podemos
Son combat solitaire contre la finance mondialisée lui a donné le goût de l'action collective et de la politique. Il alterne entre «Nouvelle Donne», le mouvement souverainiste de Nicolas Dupont-Aignan et la gauche radicale tendance Podemos en Espagne et ne cache pas sa «sympathie» pour la sénatrice PS Marie-Noëlle Lienemann ou encore le député PS Yann Galut.
Lors des dernières Européennes, il est même tête de liste en Espagne sous les couleurs de Partito X, une formation née du mouvement des «Indignés», mais n'est pas élu.
Ce lundi, le parti anti libéral Podemos a annoncé qu'il allait lui commander un rapport sur la lutte contre la fraude fiscale.