JUSTICEProcès du Carlton: DSK était-il le «roi de la fête» ou le plus grand des «naïfs»?

Procès du Carlton: DSK était-il le «roi de la fête» ou le plus grand des «naïfs»?

JUSTICEJugé, à partir de lundi, pour «proxénétisme aggravé», l’ancien patron du FMI a toujours prétendu qu’il ignorait que les filles avec qui il couchait étaient des prostituées…
Vincent Vanthighem

Vincent Vanthighem

Lors de son audition, l’une des prostituées l’a qualifié de «roi de la fête». Dominique Strauss-Kahn va, au contraire, tenter de faire croire qu’il n’était que le «roi des naïfs» au procès de l’affaire dite du «Carlton» qui doit s’ouvrir, ce lundi matin, devant le tribunal correctionnel de Lille (Nord).

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Renvoyé avec treize autres personnes pour «proxénétisme aggravé», l’ancien patron du Fonds monétaire international (FMI) a toujours prétendu, lors de l’enquête, qu’il ne savait pas que les filles avec qui il couchait, lors de ces «après-midi récréatives», étaient rémunérées pour cela, se retranchant derrière son attrait pour «le libertinage».

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Les juges d’instruction Stéphanie Ausbart et Mathieu Vigneau ont rédigé une ordonnance de renvoi de plus de 200 pages pour tenter de démontrer le contraire. «Il ne paraît pas envisageable» que DSK ne se soit pas rendu compte que «l’activité prostitutionnelle [mise au jour par l’enquête] lui était dédiée», écrivent-ils ainsi.

Des filles jeunes, bien faites et destinées à le satisfaire

Les deux juges en veulent pour preuve les témoignages des prostituées, versés au dossier, qui retracent, avec un sens du détail très cru, les parties fines. «Toutes ces filles bien faites de leur personne, jeunes, complètement destinées à le satisfaire, il croyait quoi?, a ainsi lâché Jade*, l’une des participantes lors de son audition. Si ce monsieur considère qu’il ne pouvait pas savoir la qualité des filles présentes, c’est vraiment (…) nous prendre pour des cons!»

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Il y avait «des centaines, peut-être des milliers de personnes qui me suivaient, m’aidaient, me parlaient, me conseillaient, s’est défendu l’ancien ministre de l’Economie. Mes comportements sexuels ne [nécessitaient] en rien la présence de jeunes femmes prostituées…»

C’est la ligne de défense que vont adopter ses avocats lors de cette audience prévue pour durer jusqu’au 20 février. S’ils refusent de s’exprimer ces derniers jours, ils n’avaient pas hésité à livrer le fond de leur pensée au début de l’enquête. «Dans ces soirées, on n’est pas forcément habillés, avait ainsi lâché Henri Leclerc, l’un des avocats de DSK. Et je vous défie de distinguer une prostituée nue d’une femme du monde nue…»

«En y réfléchissant, j’ai été naïf», concède DSK

Pour convaincre, les avocats de l’ancien patron du FMI s’appuieront autant sur le non-lieu qui avait été requis par le parquet à la fin de l’instruction que par la façon dont les filles étaient rémunérées, selon l’enquête. Tous les participants ont, en effet, expliqué que des trésors d’ingéniosité avaient été déployés pour que les prostituées ne soient jamais payées sous les yeux du «roi de la fête».

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«Il fallait surtout ne pas dire à DSK que nous étions payées, a ainsi raconté Estelle*. Il fallait dire que nous étions des amies, c’était ridicule… Il se rendait bien compte qu’on ne venait pas à Paris pour ses beaux yeux, même si je l’aimais bien…»

Accusé d’avoir «aidé», «assisté» ou «protégé la prostitution d’autrui» selon la définition même que fait le Code pénal du «proxénétisme aggravé», DSK a fini par reconnaître, lors de son audition, «qu’en y réfléchissant», il avait été «naïf». Il aura trois jours d’interrogatoires par le tribunal, du 10 ou 12 février, pour l’expliquer. Il encourt une peine de dix de prison et 1,5 million d’euros d’amende.

* 20 Minutes a changé les prénoms des prostituées, parties civiles dans le procès, à la demande de leur avocat.

L’appartement de la rue d’Iéna

Malgré un montage financier pour le moins complexe, les deux juges d’instruction sont parvenus à la conclusion que Dominique Strauss-Kahn était bien le locataire d’un appartement de 45m² situé, rue d’Iéna à Paris (16e arrondissement) dans lequel plusieurs soirées ont été organisées. Cela conforte, pour eux, l’idée que l’ancien patron du FMI a bien «aidé», «assisté» ou «protégé la prostitution d’autrui».