EDUCATIONPourquoi le redoublement est-il remis en cause?

Pourquoi le redoublement est-il remis en cause?

EDUCATIONLa Conférence de consensus sur le redoublement aura lieu ce mardi pour faire le point sur cette pratique pédagogique et ses alternatives...
Delphine Bancaud

Delphine Bancaud

C'est mardi qu'aura lieu la Conférence de consensus sur le redoublement et ses alternatives, avant que celle-ci remette ses recommandations à la communauté éducative le 4 février. En septembre, la ministre de l'Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, avait déjà annoncé son intention de limiter le redoublement à «des cas exceptionnels». 20 Minutes fait le point sur ce qui est reproché à cette pratique pédagogique et sur les solutions qui pourraient être trouvées pour la remplacer.

Quel est l'état des lieux du redoublement en France?

Environ 30% des élèves Français âgés de 15 ans redoublent au moins une fois lors de leur scolarité. La France se classe ainsi au 5e rang des pays de l'OCDE qui font le plus redoubler leurs élèves. Seuls l'Espagne, le Portugal, le Luxembourg et la Belgique francophone présentent des taux de redoublement plus élevés. Le redoublement est utilisé soit pour lutter contre les difficultés scolaires rencontrées par un élève, soit dans le cadre de stratégies familiales pour contrer une orientation.

Quels sont les effets néfastes du redoublement?

«Lorsqu'il est utilisé pour venir en aide à un élève en difficulté, il est souvent inefficace sur le moyen terme. Car si l'élève progresse généralement lors de sa deuxième année dans la même classe, l'année d'aprè,s on ne constate pas souvent de bénéfice», explique à 20 Minutes Nathalie Mons, professeure de sociologie à l’université de Cergy-Pontoise et présidente du Conseil national d’évaluation du système scolaire. «Si les méthodes pédagogiques n'ont pas marché avec cet élève, elles ont peu de chances de mieux fonctionner ensuite», renchérit Paul Raoult, président FCPE. Autre reproche: les élèves ne seraient pas tous égaux face à cette pratique. «Le redoublement est socialement biaisé. A notes identiques, les élèves qui sont issus de milieux défavorisés et les garçons redoublent davantage», observe Nathalie Mons. Cette pratique aurait aussi des conséquences psychologiques pour l'élève: «Il aura tendance ensuite à se déprécier et ce manque de confiance peut nuire à la poursuite de sa scolarité.» Enfin, les experts s'accordent à dire que cette pratique est trop coûteuse pour l'Education nationale, puisqu'elle est évaluée à deux milliards par an.

Le doublement est-il efficace dans certaines situations?

Certains élèves choisissent de redoubler leur 3e pour pouvoir aller en lycée général ou en 1re afin d'obtenir de meilleures notes dans le but de s'orienter par exemple en classe préparatoire. «Dans ces cas-là, c'est plutôt une bonne chose si l'élève parvient à son but», estime Paul Raoult. «Lorsqu'un élève a refait une année en raison des problèmes de santé qu'il a pu rencontrer l'année précédente, cela peut aussi être bénéfique», souligne-t-il.

Existe-il des alternatives?

«Oui, bien sûr. Certains pays ont ainsi mis en place des écoles d'été qui représentent des sortes de sessions de rattrapage pour les élèves en difficultés. D'autres ont mis en place ce qu'ils appellent "une promotion conditionnelle", c’est-à-dire que l'élève qui a des lacunes dans une discipline va passer dans la classe supérieure à condition de suivre un programme personnalisé pour rattraper son retard dans la matière où ses résultats sont insuffisants. Enfin, il existe aussi des ateliers d'apprentissages différenciés qui permettent aux élèves dans une même classe d'avancer à leur rythme», explique Nathalie Mons. Pour Paul Raoult, il est urgent de développer le dispositif «Plus de maîtres que de classes» en primaire, afin de permettre une personnalisation de l'enseignement. «Au collège et au lycée, on peut aussi organiser des groupes de compétences, où un élève bon en maths fera bénéficier de ses connaissances à un autre, fort en français, qui l'épaulera à son tour», suggère-t-il.