40 ans de l'IVG: Comment on a tenté de décourager ces femmes d'avorter
VOUS TÉMOIGNEZ•Trois femmes racontent l'hostilité du corps médical face à l'avortement...Christine Laemmel
L'IVG a 40 ans. Sur le papier, toute femme peut gratuitement choisir, dans un délai de 12 semaines, de mettre un terme à sa grossesse. Dans les faits, la démarche est semée d'embûches. Administratives comme placées volontairement par certains membres du corps médical. Marisol Touraine a annoncé ce vendredi plusieurs mesures pour faciliter l'avortement. A en juger par les témoignages de nos internautes étant passées par cette épreuve, il y avait de quoi.
M.: «Le médecin m'a dit d'un ton glacial que je devais assumer mes conneries»
«J'ai fait une interruption volontaire de grossesse quand j'avais 16 ans, après un accident de contraception. Avant l'IVG, il faut deux rendez-vous, avec une semaine minimum d'écart, pour la réflexion. Quand je suis arrivée dans le bureau du médecin, il m'a examinée, puis m'a dit d'un ton glacial que ce n'était pas une intervention de loisir et qu'en gros, je devrais assumer mes conneries. Désemparée, je n'ai pas su répondre et il a continué, embrayant sur le fait que je devais prendre mes responsabilités et que ce n'était pas quelque chose à faire à la légère, que c'était ôter la vie d'un être vivant. L'entretien s'est très mal passé, mais il m'a quand même donné les renseignements nécessaires. Tout s'est bien passé au final, mais j'ai longtemps été choquée par l'amertume de ce médecin.»
Christelle: «Le gynéco m'a tendu des prospectus sur les modes de gardes d'enfants»
«Enceinte de huit semaines en décembre dernier, je prends rendez-vous chez un médecin. Je lui explique que je ne souhaite pas le garder parce que j'ai 25 ans et je trouve cela jeune, que je ne suis pas en couple depuis suffisamment longtemps pour vouloir garder cet enfant, que je n'ai pas les moyens financiers ni le temps de m'en occuper. Son réflexe a été de me tendre plusieurs prospectus proposant des aides financières pour les femmes ayant des soucis financiers, m'expliquant que des méthodes de garde peuvent être trouvées lorsque je suis au travail. A la fin, presque sourire en coin, il a cru bon de me dire que beaucoup de femmes présentent les signes d'une dépression après une IVG. Il est allé jusqu'à prétendre qu'avorter pourrait entacher ma fertilité. Je suis repartie dépitée du cabinet. Heureusement, l'équipe de l'hôpital (conseillère conjugale, infirmière et gynécologue) a été d'un soutien sans faille.»
Henriette: «On nous redemande sans cesse si c'est vraiment ce que l'on souhaite»
«J'ai subi une IVG il y a trois ans, ce fut un parcours du combattant. Administrativement déjà. J'ai eu quatre rendez-vous avant de connaître la date de l'intervention, j'ai eu peur de dépasser le délai légal. Avec sans cesse, chaque personne qui demande si c'est vraiment ce que l'on souhaite. Mais ce qui m a le plus choquée, c'est l'hostilité du personnel hospitalier. Du "ça va, elle va s'en remettre" quand j'ai fait une chute de tension à l'enlèvement brusque de la perfusion à ma sortie. J'ai eu beaucoup de mal à comprendre pourquoi. Ce choix, je ne l'ai pas fait de gaîté de cœur. J'ai mis quelques années à m'en remettre. Résultat, je me suis sentie coupable alors qu'à la base, j'étais en paix avec ma décision.»