Evaluation des élèves: «Supprimer les notes sans réflexion derrière est inutile»

Evaluation des élèves: «Supprimer les notes sans réflexion derrière est inutile»

EDUCATIONUn rapport publié ce mardi compare les systèmes de notations de plusieurs pays de l'OCDE avec la France...
Anissa Boumediene

Propos recueillis par Anissa Boumediene

La bonne vieille note sur 20 connaît peut-être ses dernières heures. Le système d'évaluation des élèves fait en tout cas l'objet du premier bilan du Conseil national d'évaluation du système scolaire (Cnesco), installé en janvier par l'ancien ministre de l'Education nationale Vincent Peillon, publié ce mardi. Nathalie Mons, présidente du Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco), a mené une enquête comparative sur différents pays de l'OCDE pour mieux évaluer le cas français.

Les pays qui ont supprimé les notes ont-ils une appréciation plus fine du niveau des élèves?

On remarque chez ces pays comme le Danemark ou la Suède une réflexion approfondie sur ce qui est attendu pédagogiquement dans les évaluations. Pour ceux qui ont instauré un système d'appréciation de A à F par exemple, chaque lettre attribuée comme une note correspond des attentes très précises, à un niveau de compétences et d'acquis strictement déterminé. La nature même des évaluations a été repensée. A côté des évaluations classiques, comme le devoir sur table en France, il est fortement recommandé aux enseignants d’utiliser l’autoévaluation ou d'appréhender un ensemble de productions des élèves, et de faire davantage d’évaluation individualisée des élèves.

La France n'est-elle pas en retard par rapport à ces pays innovants?

La France est au milieu du gué. Elle est dans un courant réformiste mais avance avec lenteur. Dans les pays dits innovants, les politiques d’évaluation se sont plus particulièrement développées à partir des années 1980. En France, on est encore en train de réfléchir à comment faire en sorte que des évaluations correspondent à des attentes pédagogiques précises.

La France hésite entre deux modèles d'évaluation et les superpose. L'un fondé sur la liberté pédagogique et les programmes scolaires, l'autre moderne, incarné par le nouveau socle commun de connaissances. Cet assemblage hétéroclite d'ancien et de nouveau doit être mis en cohérence à l'avenir. Mais la France n'est pas ce village gaulois qui passerait à côté du raz de marée international des réformes en éducation.

Ne faut-il pas simplement supprimer les notes?

C’est un vrai faux débat: si on supprime les notes pour les remplacer par des couleurs, sans une réflexion pédagogique approfondie sur ce qu’on attend des élèves par rapport aux différents niveaux de performances, et sur le type d’épreuves à mettre en place pour les faire réfléchir, c'est inutile. Il faut cibler ce qu’on attend d'eux, que leur évaluation soit claire pour les enseignants, les parents et les élèves. Notamment avec des bulletins qui détaillent les faiblesses et les forces de l’enfant dans chaque discipline.

L'enseignant doit également porter un jugement sur le développement social et psychologique de l'enfant dans la classe, et dire aussi ce qu’il attend de lui dans le futur et comment il va le faire progresser. Ce qui compte n'est pas tant la suppression de la notation que la réflexion qui l'accompagne. Changer le système d’évaluation implique un travail d'harmonisation, tant entre les enseignants qu'entre établissements, pour qu'un 12 sur 20 veuille dire la même chose partout.