TERRORISMELutte contre les candidats au djihad: «Toc, toc, toc, c’est la DGSI…»

Lutte contre les candidats au djihad: «Toc, toc, toc, c’est la DGSI…»

TERRORISMELes policiers se rendent chez les aspirants au djihad pour les dissuader de partir combattre…
William Molinié

William Molinié

Ils n’ont encore rien fait. En tout cas, rien de pénalement répréhensible. Mais un beau matin, on frappe à leur porte ou celle de leurs parents. Deux ou trois agents de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) investissent le logement et posent alors la question à leurs jeunes interlocuteurs qui n’ont pas encore pris la route du djihad. «Pourquoi voulez-vous partir en Syrie?»

Les services de renseignement français, renforcés juridiquement par l’adoption définitive ce mardi par le Parlement du projet de loi de «lutte contre le terrorisme», s’inspirent de méthodes anglo-saxonnes pour dissuader les candidats à la «guerre sainte». Prévenus par leurs proches ou au terme de surveillances administratives, ils leur rendent visite pour les dissuader de partir. Au cours de ces «entretiens préalables», les policiers les mettent en garde et leur détaillent les risques encourus. Selon nos informations, cette pratique qui existait déjà auparavant, s’est systématisée dans les filières syriennes.

Procédé utilisé 200 fois

«Ces auditions à la sauce DGSI sont de plus en plus nombreuses. Elles se font principalement avec les parents ou les proches. Mais il est arrivé que des candidats soient eux-mêmes entendus dans le cadre de ces entretiens», explique à 20 Minutes une source bien informée, au contact des services de renseignements.

«Le procédé a déjà été utilisé plus de deux cents fois en France», écrivent les journalistes de M6, François Vignolle et Azzeddine Ahmed-Chaouch, dans La France du Djihad*, une enquête fouillée récemment parue aux éditions du Moment. Cette pratique a été tenue à l’écart de toute communication car, rapportent-ils, elle serait juridiquement «borderline».

1.089 Français impliqués

Aucun avocat, spécialisé dans la défense de candidats au djihad, n’a confirmé à 20 Minutes l’existence de ce type d’interrogatoire mené avant toute infraction. «Le contenu et la retranscription des propos ne sont pas versés au dossier judiciaire», explique l’un d’entre eux.

A notre connaissance, aucune procédure n’a été jusqu’à présent retoquée par un juge en raison de ces «entretiens préalables». Une source policière justifie l’existence de ce procédé par l’obligation de «dissuasion et d’évaluation de la dangerosité des individus souhaitant se rendre sur zone». «Rien n'oblige un individu à s'entretenir avec un policier de la DGSI. Toutes les personnes entendues dans ce cadre sont volontaires», poursuit notre source.

Aux derniers décomptes, 1.089 Français ont été ou sont impliqués dans des filières vers la Syrie et l'Irak à la date du 23 octobre. 368 y combattent actuellement, 212 en sont revenus et 205 ont des velléités de départ, les autres étant en transit ou morts pour 46 d'entre eux.