Procès Xynthia: Les victimes veulent «des réponses pour réussir à faire notre deuil»
JUSTICE•«On veut que la vérité sorte au grand jour», demande Renaud Pinoit, président de l’association des victimes d’inondation de La Faute-sur-Mer…Propos recueillis par Frédéric Brenon
Quatre ans et demi que la commune de La Faute-sur-Mer (Vendée) est meurtrie par le drame causé par la tempête Xynthia. Quatre ans et demi que les familles de victimes attendent un procès. Celui-ci s’ouvre ce lundi aux Sables d’Olonne. L’association des victimes d’inondation de La Faute-sur-mer (Avif) et son président, Renaud Pinoit, seront du côté des parties civiles.
Comment se sentent les familles avant l’ouverture de ce procès exceptionnel?
Les derniers jours ont été un peu durs car on commence à se replonger dans le drame. Il y aura forcément encore beaucoup d’émotions mais, en même temps, on est bien préparé. On a travaillé avec des psys, des avocats. On est prêt. Et le fait d’être ensemble, en groupe, c’est rassurant.
Qu’attendez-vous du procès?
D’avoir des réponses à des questions essentielles pour réussir à faire notre deuil. Pourquoi y-a-t-il eu 2,80m d’eau dans certaines maisons? Pourquoi n’a-t-on pas été prévenu correctement? Pourquoi 29 morts sur un si petit secteur? Pourquoi n’y a-t-il pas eu de plan d’évacuation? On veut que la vérité sorte au grand jour, que les choses soient dites clairement. On attend que ce procès fasse date, qu’il serve de leçons pour que ça ne se reproduise plus. Ça ne fera jamais revenir les 29 décédés, c’est évident. Mais si ce drame permet d’éviter d’autres morts dans le futur, ce serait déjà une belle avancée.
«Il a fallu se battre pour avoir un mémorial, on nous disait qu'il fallait oublier»
Les leçons n’ont-elles pas déjà été tirées par les pouvoirs publics ces dernières années?
Je ne crois pas. Il reste énormément de travail. Quand on habite derrière des digues qui n’ont pas encore été refaites après un drame, on peut se poser des questions… Les procédures d’alertes sont également strictement identiques, à quelques détails près. C’est choquant. C’est dû à la lenteur de l’administration, mais aussi à une prise de conscience qui ne s’est pas faite à 100%. Même localement: quand on se déplace de quelques kilomètres sur le littoral en Vendée, les gens disent que ça ne les concerne pas.
Redoutez-vous la confrontation avec les prévenus?
Non, on les regardera la tête haute. Les élus qui seront en face de nous n’ont toujours pas reconnu les victimes comme telles. On a entendu des choses atroces à certains conseils municipaux. Par exemple que La Faute-sur-mer n’était quand même pas Oradour-sur-Glane. Il a fallu se battre pour avoir un mémorial, on nous disait qu’il fallait oublier. Des excuses, on n’en espère pas. Des regrets éventuellement.
Souhaitez-vous des sanctions exemplaires?
Pour que ça serve de leçon, il faut un message fort. Un non-lieu serait par exemple inacceptable. Après, le degré de condamnation est accessoire pour nous, ça regarde la justice. A la limite un euro symbolique nous suffirait. Le principal, c’est la reconnaissance qu’il y a eu des erreurs humaines.
Où vivent les victimes et leurs familles aujourd’hui?
Certaines sont restées à La Faute, d’autres non. Le marché de l’immobilier ici est restreint donc quand on rase 600 maisons, forcément, il y en a beaucoup qui sont parties.