Audit sur la «brigade des stups»: La délicate gestion des scellés de drogue
POLICE•Le vol de cocaïne au «36» révèle la faiblesse du système de conservation et de destruction des substances illicites…William Molinié
Une «défaillance individuelle» mais, tout de même des pistes à explorer pour améliorer la sécurité. C’est en substance le message politiquement correct qu’a délivré ce jeudi matin Marie-France Monéger, patronne de l’inspection générale de la police nationale (IGPN), chargée d’auditer la prestigieuse brigade des stupéfiants (BS) après le vol de 50 kg de cocaïne dans ses locaux, au 36, Quai des Orfèvres.
Sans surprise, la boss des bœuf-carottes a mis hors de cause le chef de la BS, faisant valoir que «le dispositif de gestion [était] de niveau très satisfaisant». En revanche, elle a reconnu que le mode de gestion des scellés de drogue était problématique.
«Forme de vulnérabilité»
Comparé aux années avant 1990, il y a en France aujourd’hui cinq fois plus d’arrestations liées aux stupéfiants. Les saisies ont aussi explosé pour atteindre en 2013 près de six tonnes de cocaïne et dix fois plus de cannabis. Lorsque les policiers réalisent une saisie, ils sont tenus de la conserver tant que la justice n’a pas ordonné sa destruction.
«Il faut faire en sorte que les délais de stockage soient plus courts», soutient Marie-France Monéger. Seulement, à en croire les policiers, la justice, à qui sont facturés les frais d’incinération, tarde parfois à ordonner la destruction de drogue saisie. «Les saisies s’accumulent, ce qui constitue une forme de vulnérabilité pour nous», regrette-elle.
Vers l’externalisation du gardiennage?
Pour les petites saisies, les policiers ont inventé une parade efficace mais qui n’a aucune valeur juridique. «On appelle ça une destruction administrative. Cela consiste à récupérer la barrette de résine de cannabis et de la détruire soi-même, généralement en la jetant dans les toilettes et en tirant la chasse d’eau», explique une source policière.
La «police des polices» entend harmoniser la gestion des saisies de drogue dans les différents services de police judiciaire spécialisés dans le traitement des affaires de stupéfiants. Quitte à «mutualiser le gardiennage». Voire à externaliser le stockage de drogue en attendant l’ordre de destruction.
«Ce n’est pas une proposition. C’est une piste envisagée», précise une source policière. «Il faut mener la réflexion. Mais les entreprises qui seraient embauchées devront faire gage de sérieux et de rigueur, fait remarquer Christophe Crépin, du syndicat Unsa-Police. Quoiqu’il arrive, il faut que le parquet garde autorité.»