VIDEO. Fronde contre les rythmes scolaires: «C’est scandaleux de mettre des cadenas sur les écoles»
REPORTAGE•Ce mercredi matin, les partisans de la réforme des rythmes scolaires ont affronté le maire de Yerres (Essonne), Nicolas Dupont-Aignan, devant une école qu’il avait refusé d’ouvrir…Delphine Bancaud
Dans les rues de Yerres (Essonne) ce mercredi matin, l’air semble électrique. Et pour cause: la maire de la ville, Nicolas Dupont-Aignan (et président de Débout la République), a mis sa menace à exécution, en faisant cadenasser les portes des écoles pour protester contre la réforme des rythmes scolaires. Prévenus en amont, les parents n’ont pas amené leurs enfants à l’école ce matin.
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Se posant en fer de lance de la contestation des nouveaux rythmes scolaires, Nicolas Dupont-Aignan avait prévu une grand-messe médiatique devant l’école maternelle Beauregard. A 9 heures, le parvis de l’école se transforme donc en champs de bataille, les pro-réformes faisant face aux antis, devant une flopée de journalistes. Des policiers sont en faction pour protéger les lieux, sous les yeux médusés des enseignants de l’école.
«Je suis fier de parler au nom de milliers de maires»
Pas de quoi déstabiliser Nicolas Dupont-Aignan, teint halé et costume impeccable: «Je suis fier de parler au nom de milliers de maires. Avec cette réforme, 10 % du temps scolaire est transféré aux communes. Mais nous n’avons pas les moyens financiers d’assumer cette nouvelle charge et nous ne pouvons pas recruter autant d’animateurs. Notre seule solution est d’augmenter les impôts locaux. Nous demandons à la ministre du temps et des compensations», affirme-t-il devant une nuée de cameras et de micros.
«C’est scandaleux de mettre des cadenas sur les écoles sous les yeux de nos enfants. Ça fait des mois que ça dure. Il faut que le maire rentre dans sa mairie et qu’il bosse», hurle une mère de famille, avant de quitter les lieux, visiblement excédée.
«En France l’éducation est nationale, pas communale»
«Nous demanderons à la ministre de nous recevoir et nous déciderons ce que nous ferons la semaine prochaine», poursuit Nicolas Dupont-Aignan. «Et nos enfants, vous y avez pensé? Comment vont-ils rattraper les trois heures de classe perdues ce mercredi?», interroge un père de famille. «Il y a eu des grèves l’an dernier qui ont dépassé trois heures, sans que ça pose problème», répond l’édile, aussitôt hué.
Fendant la foule, Fabrice Sabban, ancien directeur de l’école Beauregard, engage ensuite une joute verbale avec le maire de Yerres: «C’est votre université d’été? Vous instrumentalisez l’école», déplore-t-il. «J’ai été élu à 77 % des voix et l’opposition à cette réforme faisait partie de mon programme», répond Dupont-Aignan. «Mais vous ne pouvez pas contester les bienfaits de cinq matinées d’école par semaine», rétorque Fabrice Sabban. «Libre à l’Education nationale de modifier ses horaires, mais il ne faut pas se défausser sur les communes. En France l’éducation est nationale, pas communale», insiste le maire, se pressant à côté d’une mère d’élève en gilet jaune, pour bien montrer qu’il n’est pas seul dans ce combat.
«La révolte du maire est purement politique»
Venue soutenir les opposants au maire, Jocelyne, une ancienne institutrice n’en démord pas «Le maire a eu deux ans pour mettre en place la réforme. Et étant donné les impôts locaux que nous payons, il a vraiment les moyens de la financer». A ses côtés, Jérôme, un parent d’élève, tient symboliquement une pince, comme s’il allait briser la chaîne qui encercle le cadenas sur la porte de l’école: «nous ne sommes pas dupes, nous savons très bien que la révolte du maire est purement politique, c’est une manière de faire vivre son parti».
A quelques mètres devant lui, Nicolas Dupont-Aignan pose encore devant les caméras, avant d’inviter les journalistes à le suivre. «80 % des parents d’élèves sont contre la réforme. Venez avec moi, vous allez voir tous ceux qui m’accompagnent à la manifestation devant la préfecture d’Evry ce matin». «Qu’il en profite, ça ne va pas durer, la justice est saisie et la semaine prochaine tout rentrera dans l’ordre», espère Jérôme en regardant son maire tourner les talons.