Affectation des profs: «Mère de trois enfants, je suis nommée à 90 km de chez moi»
RENTREE DES ENSEIGNANTS•Comme chaque année, des enseignants se plaignent de leur affectation tardive ou d’être nommés loin de chez eux…Delphine Bancaud
Enseignants affectés loin de chez eux, profs qui ne savent pas encore où ils exerceront, néotitulaires nommés profs remplaçants sur plusieurs établissements éloignés les uns des autres… Ce lundi, 839.700 enseignants regagneront le chemin des établissements. Mais pour certains, ce jour de prérentrée aura un goût amer en raison des problèmes d’affectation qu’ils rencontrent. Des soucis qui concernent le plus souvent les premiers postes, surtout dans le second degré.
Parmi eux, William, professeur d’anglais depuis quatre ans, qui cette année encore sera TZR (titulaire sur zone de remplacement). «Aujourd’hui, je sais que j’aurai 3 heures dans un établissement, 4 heures dans un autre: le rectorat doit donc m’affecter encore 11 heures, certainement dans un troisième établissement, mais pour l’instant je n’ai pas de nouvelles. Ce retard risque de me poser des difficultés d’emploi du temps», explique-t-il. Une situation que William a déjà traversée: «L’an dernier, j’ai été averti le lendemain de la rentrée et il y a deux ans, j’ai connu mes lieux d’exercices le 14 septembre!».
Du Sud… au Nord
Pour Céline, prof d’anglais, la rentrée ne se présente pas non plus sous les meilleurs auspices. «Habitant à Aix en Provence, je suis affectée dans le Val-d’Oise. Une très mauvaise surprise pour moi». Célibataire et sans enfant, Céline savait qu’il serait difficile pour elle d’obtenir la région Paca pour sa première année d’exercice en tant que titulaire. «Mais j’ai fait des vœux d’affectation en ciblant des villes qui restait sur l’axe d’une ligne TGV. Et je n’avais pas du tout demandé l’académie de Versailles!», déplore-t-elle. «Je ne vis pas bien cette situation. Je ne suis déjà pas fan de la région parisienne, mais être loin de ma famille et de mes amis, cela risque d’être pesant. Sans compter que j’en prends pour quelques années, car je ne serais pas mutée ailleurs avant longtemps», déplore-t-elle.
Dur pour la vie de famille
Cette situation, Mathieu, professeur de SVT l’a bien connue: «Je suis Toulousain et l’an dernier, j’ai été envoyé à Marseille alors que ma femme était enceinte. La douche froide. D’autant que je n’avais pas demandé cette académie». Pour tenter de changer la donne, Mathieu a contacté les syndicats: «Mais le système d’affectation reposant sur un barème de points, on ne peut pas faire grand-chose pour les débutants», explique-t-il. Cette affectation a généré des dépenses non prévues dans son budget initial: «J’ai dû prendre une chambre chez l’habitant sur place, tout en continuant à financer mon logement à Toulouse. Du coup, pour amortir mes allers et retours, je faisais du covoiturage». Cette rentrée sera un peu plus facile pour lui: «Je suis nommée à 1h30 de chez moi en train. C’est déjà mieux», soupire-t-il.
Un emploi du temps harassant
Mais les répercussions sur sa vie de famille d’une affectation loin de chez soi peuvent être encore plus pénibles, comme en témoigne Marie, professeur des écoles, tout juste titularisée «Mère de trois enfants (de 5, 8 et 10 ans), je suis nommée à 90 km de chez moi, dans un autre département. Pour voir mes enfants, je vais devoir faire les allers et retours, soit 3 heures de voiture dans la journée!», déplore-t-elle. Avec à la clé un emploi du temps harassant: «Je partirai le matin à 6h30 et je ne serai pas de retour avant 18 heures-18h30. Et le soir, ce sera la course pour m’occuper des petits, préparer mes cours, gérer la maison… Sans l’aide de mon mari, je n’y arriverai pas», affirme-t-elle. Et pour Marie, l’espoir de se rapprocher de sa tribu est encore loin: «Il faudra 4 ou 5 ans pour que je sois mutée dans mon département. J’espère tenir jusque-là et ne pas être obligée de me reconvertir de guerre lasse…».