Où en est le débat sur la fin de vie de Vincent Lambert?
EUTHANASIE•Le débat est relancé alors que le médecin qui s’occupe de lui depuis six ans a décidé de quitter ses fonctions en raison des menaces de mort qu’il a reçues…Vincent Vanthighem
De notre envoyé spécial à Reims (Marne)
Dans ce creux du mois d’août, l’hôpital Sébastopol de Reims (Marne) semble bien calme. Quelques patients en fauteuil roulant fument une cigarette tranquillement devant l’entrée. Les couloirs de l’établissement sont vides. Au quatrième étage, Vincent Lambert occupe, lui, toujours la même chambre depuis plus de six ans.
«Sacrifié pour une cause qui le dépasse»
Victime d’un accident de moto en 2008, il est dans un coma dit «pauci-relationnel». Il est toujours aussi au cœur d’un conflit familial entre ses parents et certains de ses frères et sœurs, partagés sur la question de sa fin de vie. «Vincent est sacrifié pour une cause qui le dépasse», lâche, amer, Eric Kariger.
>> Portrait: Menacé de mort, Eric Kariger quitte le CHU de Reims
Bien malgré lui, ce praticien a dû prendre partie. Chef du service de Soins palliatifs de Vincent Lambert, cet homme de 49 ans a lancé l’affaire en avril 2013 en décidant d’arrêter d’alimenter artificiellement son patient, afin de le laisser mourir. Les parents du jeune homme de 37 ans étant contre cette décision, ils ont, depuis, multiplié les recours afin que leur enfant soit maintenu en vie.
Le dossier entre les mains de la CEDH
En première ligne sur ce dossier depuis un an, Eric Kariger suivra désormais les nouvelles évolutions au calme. Victime de menaces de mort, il a décidé de quitter ses fonctions ce lundi, rincé par les «attaques odieuses» dont lui et sa famille ont été destinataires. Mais, nul doute, que le praticien continuera à suivre l’affaire.
Elle est aujourd’hui entre les mains de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Alors que le Conseil d’Etat avait le 24 mai validé la légitimité de l’initiative de l’équipe médicale qui souhaitait arrêter les traitements, les parents du jeune homme ont saisi en urgence l’instance européenne. En attendant qu’elle étudie le dossier, la décision française a donc été suspendue.
Une première pour l’instance européenne
Dans un premier temps, la CEDH va déjà devoir dire si le recours des parents de Vincent Lambert est «recevable». S’il ne l’est pas, la décision du Conseil d’Etat devrait s’appliquer. Dans le cas contraire, la CEDH prendra quelques mois pour trancher la question. Si l’instance européenne a déjà eu affaire à des demandes d’euthanasie, c’est la première fois qu’elle a à se prononcer sur le cas d’un homme inconscient dont les proches souhaitent qu’il parte. Les autres patients ayant déposé ce genre de requête étaient, en effet, tous lucides.
«Cela m’ennuie pour Vincent que ce dossier prenne encore du temps, confie Eric Kariger. Mais si cette décision peut servir de base et venir au secours de la communauté médicale à l’avenir, alors c’est une bonne chose.»