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Rentrée scolaire: Les élèves régressent-ils pendant les vacances?
EDUCATION•Certaines connaissances s'évaporent l'été, surtout lorsque les enfants ne sont pas suffisamment stimulés par leur entourage...
Delphine Bancaud
«Vacances, j’oublie tout». On connaît la chanson, mais qu’en-est-il réellement pour les écoliers français?
A chaque rentrée, beaucoup d’élèves ont du mal à reprendre le chemin de l’école après un break de deux ou trois mois (pour les collégiens et les lycéens dont l’établissement est devenu centre d’examen au mois de juin pour le brevet ou le bac). «Ils passent à autre chose et se mettent jachère», résume Patrick Rayou, professeur en sciences de l’éducation à l’université Paris VIII. Et certains d’eux semblent avoir oublié des notions apprises au cours de l’année scolaire précédente, notamment celles qui s’assimilent grâce à des exercices répétés, comme l’orthographe de certains mots, les tables de multiplication, les conjugaisons…
«Après six semaines sans révision, certains élèves ne parviennent plus accorder un adjectif ou faire une division avec retenue, alors qu’ils savaient le faire en fin d’année scolaire. Ce dont sont parfaitement conscients les parents, puisque les Français sont les plus grands consommateurs de cahiers de vacances en Europe», souligne Edwige Antier, pédiatre et spécialiste des questions d’éducation*. «En revanche, les apprentissages qui s’appuient sur la compréhension et la réflexion ne subissent généralement pas d’impact négatif des vacances», indique Bruno Suchaut, professeur en sciences de l’éducation à l’Institut de recherche sur l’éducation.
Le rôle décisif de l’environnement familial
Mais tous les enfants ne seraient pas égaux face à ces oublis estivaux, selon Patrick Rayou: «Les écarts scolaires se creusent pendant l’été. Tout d’abord parce que tous les enfants n’entretiennent pas leurs connaissances à l’aide des devoirs de vacances, en s’entraînant à l’écriture ou en lisant régulièrement. On constate d’ailleurs que ce sont souvent les meilleurs élèves qui parviennent à terminer leurs devoirs de vacances. A contrario, les plus en difficultés négligent les révisions alors qu’ils auraient besoin de maintenir le réflexe du travail et d’entretenir leurs connaissances». Selon Edwige Antier, le fait de travailler un peu permettrait même, dans certains cas, de combler ses lacunes «à condition d’être aidé par ses parents». «Or, certains parents qui ont eu une scolarité difficile ont un blocage vis-à-vis des devoirs de vacances et ont du mal à aider leurs enfants», poursuit-elle.
«Les écarts scolaires augmentent aussi l’été car les élèves de milieux les plus favorisés continuent à apprendre via les activités que leur proposent leurs parents: lecture, jeux de société, visites de monuments… Des occupations qui leur ouvrent l’esprit et boostent leur culture générale. Ils sont stimulés intellectuellement, enrichissent leur vocabulaire… Sans compter les démarches de certains parents qui payent à leurs enfants des séjours linguistiques ou des cours de remise à niveau avant la rentrée», ajoute Bruno Suchaut. Un avis partagé par Evelyne Antier qui estime que «l’été aggrave la fracture sociale».
Se rattraper les dernières semaines
Pour autant, «il n’existe aucune fatalité dans le domaine», souligne-t-elle. «Certaines pertes passagères peuvent se rattraper, même quinze jours avant la rentrée, à condition de se remettre au travail avec sérieux», indique Patrick Rayou. Des séances de révision tardives sur les principales notions du programme peuvent ainsi permettre aux élèves de se remettre à flot avant la rentrée. De leur côté, les enseignants font leur possible pour faciliter la soudure entre l’été et la rentrée: «Les premières semaines, on évite d’aborder bille en tête un nouvel apprentissage et on revoit des notions qui ont été abordées à la fin de l’année précédente. Cela permet à chacun de s’adapter en douceur à sa nouvelle classe et de reprendre de bonnes habitudes scolaires», souligne Alice, une enseignante du premier degré.