Sarkozy mis en examen: Que risque-t-il si les faits sont avérés?
JUSTICE•Nicolas Sarkozy a été mis en examen pour corruption active, trafic d’influence actif et recel de violation du secret professionnel...William Molinié
Au terme de quinze heures de garde à vue dans les locaux de la police judiciaire à Nanterre (Hauts-de-Seine), Nicolas Sarkozy a été mis en examen pour corruption active, trafic d’influence actif et recel de violation du secret professionnel.
Il lui est reproché d’avoir cherché, avec l’appui de son avocat, à obtenir des informations auprès du haut magistrat Gilbert Azibert sur une décision judiciaire le concernant en échange de la promesse d’un poste de prestige.
Des faits qui, s’ils étaient avérés, pourraient lui coûter cher. Jusqu’à dix ans de prison. 20 Minutes détaille point par point ces trois chefs d’accusation.
- Le trafic d’influence
Il s’agit, pour une personne dépositaire de l’autorité publique, de solliciter ou d’accepter un avantage en échange d’un acte que lui permet sa fonction, ou en échange de son influence, «réelle ou supposée», sur une décision. Ou, pour un particulier, de faire cette proposition à une personne dépositaire de l’autorité publique.
Il est nullement nécessaire que l’échange ait eu lieu. Ainsi, même si Gilbert Azibert n’a pas obtenu le poste éventuellement réclamé à Monaco ou même s'il n'a pas d'influence réelle dans l’affaire Bettencourt, le délit peut être établi. Le trafic d’influence est réprimé par les articles 432-11, 433-1 et 433-2 du code pénal. Les peines, durcies fin 2013, peuvent aller jusqu’à dix ans de prison et 1 million d'euros d’amende.
Mais les faits reprochés sont antérieurs à ces nouvelles dispositions. Dans cette affaire, les peines qui s'appliqueraient seraient donc celles en date du 19 mai 2011, à savoir 150.000 euros d'amende. Ces peines sont très théoriques et rarement appliquées à leur maximum dans ce type de dossier. D’autres peines complémentaires peuvent être prononcées comme l’interdiction des droits civiques.
- La corruption active
De la même façon, la corruption est le fait de proposer directement ou indirectement «des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques à une personne dépositaire de l’autorité publique». Le code pénal, à l’article 433-1 précise qu’il n’y aucunement besoin que «les personnes sollicitées aient été l’objet de proposition verbales ou écrites».
«Le délit est consommé dès que le prévenu a usé des moyens énoncés par la loi, en vue du but qu’elle définit; ainsi, l’offre d’une somme d’argent constitue, non une tentative […] mais le délit même de corruption active», rappelle le code pénal à l’alinéa 5.
Comme le trafic d’influence, le délit de corruption active est désormais puni de 1 million d'euros d’amende et de dix ans de prison. A l'époque des faits, l'amende s'élevait à 150.000 euros. Le code pénal fait la distinction entre la corruption active et passive mais prévoit la même peine. «Chacun des deux agents qui concourent à l’infraction, l’un en corrompant, l’autre en se laissant corrompre, y joue un rôle égal et séparément qualifié», rappelle le code pénal, précisant que «l’un ne saurait être considéré comme l’accessoire de l’autre». Autrement dit, si les faits dans l’affaire des écoutes étaient avérés, le magistrat Gilbert Azibert risquerait autant que son corrupteur présumé, Nicolas Sarkozy.
- Le recel de violation du secret professionnel
Le recel, définit par l’article 321-1 du code pénal est «le fait de dissimuler, détenir ou transmettre une chose ou de faire office d’intermédiaire afin de la transmettre tout en sachant que cette chose provient d’un crime ou d’un délit». Ce délit est puni de cinq ans de prison et de 375.000 euros d’amende.
Il est donc reproché à Nicolas Sarkozy d’avoir fait recel de la violation du secret professionnel. Autrement dit d’avoir tenté d’obtenir des informations couvertes par le secret auprès du haut magistrat à la Cour de cassation, Gilbert Azibert. «Décidemment, ce secret d’instruction est à géométrie variable. Tout le monde à accès à tout. Il suffit que quelqu’un ait accès à des données pour qu’on fasse renaître cette infraction alors que ce secret est bafoué tous les jours», a déclaré José Allegrini, l’avocat de Gilbert Azibert sur BFM TV, ajoutant: «Et vous sur ma liste vous êtes les premiers actionnaires de toutes les divulgations.»