JUSTICEAffaire Marc Machin: L’État sera-t-il condamné à lui verser deux millions d'euros?

Affaire Marc Machin: L’État sera-t-il condamné à lui verser deux millions d'euros?

JUSTICEVictime d'une erreur judiciaire, il a passé 2.126 jours derrière les barreaux...
Marc Machin, acquitté en décembre après avoir passé près de sept ans en prison pour un meurtre qu'il n'avait pas commis, doit être jugé lundi en comparution immédiate pour "faits de vol avec violence" d'un téléphone, a-t-on appris dimanche de source judiciaire.
Marc Machin, acquitté en décembre après avoir passé près de sept ans en prison pour un meurtre qu'il n'avait pas commis, doit être jugé lundi en comparution immédiate pour "faits de vol avec violence" d'un téléphone, a-t-on appris dimanche de source judiciaire. - Pierre Verdy afp.com
Vincent Vanthighem

Vincent Vanthighem

Il a fait les comptes. D’abord celui des 2.126 jours qu’il a passés derrière les barreaux. Ensuite, le montant qu’il estime correspondre à ce préjudice. Victime d’une erreur judiciaire dans l’affaire dite du Pont de Neuilly (Hauts-de-Seine), Marc Machin doit être fixé vendredi sur sa demande d’indemnisation.

Lors de l’audience, lundi 16 juin, il a réclamé 1,997 million d’euros à la Cour d’appel de Paris chargée d’examiner sa requête. De son côté, le représentant du ministère public a plaidé pour que le montant de cette réparation soit limité à 150.000 euros.

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«Les indemnisations liées à la détention indue, c’est souvent au petit bonheur la chance», décrypte pour 20 Minutes, Frédéric Berna, avocat qui a plaidé plusieurs affaires de ce type. De fait, l’article 149 du Code de procédure pénale qui régit ces affaires est pour le moins sibyllin. «La personne (qui a fait l’objet d’une détention indue) a droit à une réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé sa détention», indique ainsi le droit français sans proposer pour autant de méthode de calcul.

En moyenne, entre 1.000 et 1.200 euros le mois de prison

«L’estimation du préjudice moral varie donc d’un cas à l’autre, poursuit Frédéric Berna. On a l’impression que la cour d’appel apprécie le degré d’innocence et indemnise en conséquence.» Ainsi, l’un de ses clients, incarcéré à la place d’un homonyme, a eu droit à 5.700 euros par mois passé derrière les barreaux. «Mais une autre cliente, innocentée par la procédure, n’a eu le droit qu’à 2.000 euros par mois.» En moyenne, selon lui, l’indemnisation oscille entre 1.000 et 1.200 euros par mois.

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Si le préjudice moral est difficilement estimable, le préjudice matériel est plus précis. Il vise à réparer la perte financière liée à la détention. «Un médecin qui gagne 50.000 euros par mois touchera donc plus qu’une serveuse qui travaille au noir dans un restaurant», explique l’avocat.

Le record de la mère du petit Grégory

Et puis, il existe des cas exceptionnels dans lesquels l’affaire Marc Machin peut entrer. Le plus célèbre d’entre eux n’est autre que Patrick Dils innocenté après quinze ans passés en prison pour le meurtre des deux enfants de Montigny-lès-Metz (Moselle). Le jeune homme avait alors touché 700.000 euros. Sa famille, 300.000 euros.

Plus récemment, Loïc Sécher a obtenu, lui, 800.000 euros après avoir été blanchi des accusations de viols qui l’avaient envoyé derrière les barreaux. Enfin, Christine Villemin, la maman du petit Grégory détient toujours le record avec 410.000 francs (62.500 euros) de réparation perçus pour avoir passé onze jours en détention provisoire.

«Même les juges peuvent se tromper»

«Pour ce type d’affaires, l’Etat est accusé de faute lourde, conclut Frédéric Berna. Le montant des indemnités est gonflé par le fait que la détention a pourri une bonne partie de l’existence.» C’est le cas de Marc Machin.


Libéré, le jeune homme a ensuite été inquiété dans des affaires de vol et d’agressions sexuelles. Interrogé à l’époque par 20 Minutes, son père mettait justement ces problèmes sur le dos de son passage en prison. «Je n’en veux pas aux juges. Tout le monde peut se tromper, confiait-il alors. Je regrette juste que mon fils n’ait pas bénéficié d’un suivi psychologique. Même sa détention n’a pas servi à ça…»