Siemens monte au front pour convaincre Alstom, l'Etat et l'opinion

Siemens monte au front pour convaincre Alstom, l'Etat et l'opinion

Siemens s'est lancé dans la bataille pour conquérir Alstom ...
© 2014 AFP

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Siemens s'est lancé dans la bataille pour conquérir Alstom et ne négligeait aucun moyen mardi pour tenter de rallier l'Etat, les administrateurs et salariés de l'industriel français et mettre hors jeu General Electric, qui n'a pas dit son dernier mot.


«Nous avons bâti avec Mitsubishi une grande alliance industrielle qui offrira un nouvel avenir à Alstom, au lieu de consacrer son démantèlement», a ainsi affirmé le président du conseil de surveillance du groupe munichois, Gerhard Cromme, sur le perron de l'Elysée.

«Nous pensons que le projet proposé à Alstom est supérieur aux autres», a renchéri dans la foulée Joe Kaeser, le patron de Siemens, lors d'une conférence de presse à Paris, tandis que son alter ego de Mitsubishi Heavy Industries (MHI), Shunichi Miyanaga, a estimé avoir remis «une offre particulièrement intéressante».

Après avoir rencontré les organisations syndicales d'Alstom, les deux dirigeants ont été reçus, à leur demande, par le président Hollande. En fin d'après-midi, ils iront défendre leur projet devant la commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale.

Longtemps attendue, l'offre du groupe munichois et de son acolyte japonais s'adresse autant au conseil d'administration d'Alstom, qui a affiché sa préférence pour la proposition concurrente avancée par le géant américain GE, qu'au pouvoir politique.

- Sans l'Etat -

Le Premier ministre Manuel Valls affirme que le gouvernement n'a «aucune préférence», mais le ministre de l'Economie Arnaud Montebourg semble privilégier depuis le début un partenariat préservant l'intégrité du fabricant du TGV. Siemens et MHI ont donc opté pour un modèle d'alliances.

GE propose de racheter la totalité du pôle énergie d'Alstom (70% de son chiffre d'affaires) pour 12,35 milliards d'euros, mais Siemens ne reprendrait que l'activité de turbine à gaz, pour 3,9 milliards d'euros, avec garantie de l'emploi.

MHI propose de son côté la création de plusieurs co-entreprises, où Alstom resterait majoritaire, par exemple dans les turbines à vapeur, utilisées dans les centrales nucléaires d'EDF: en en rachetant seulement 40%, MHI répond à une inquiétude des autorités sur le contrôle des activités nucléaires.

Sortant leurs calculettes, Siemens et MHI ont avancé mardi que leur offre valorisait l'énergie d'Alstom à 14,2 milliards d'euros. Cette offre n'inclut finalement pas de financement public, alors que la participation de l'Etat, via Bpi France, avait un temps été envisagée, de source proche du dossier.

«Nous avons le financement disponible» chez Siemens et MHI, a déclaré M. Kaeser, confirmant «aucune implication d'autres acteurs, ni des banques publiques en France ou en Allemagne».

- Un Airbus du rail? -

Sur l'emploi, question hautement sensible, le tandem germano-nippon a promis de créer plus de 1.000 postes en France, s'alignant sur une promesse de.... General Electric. Il veut aussi fournir un millier de places d'apprentis dans l'Hexagone. Enfin, Alstom resterait un groupe français coté à Paris.

Mardi le groupe allemand a remis au centre du jeu la question des activités ferroviaires, semble-t-il pour répondre aux attentes du gouvernement, surtout de M. Montebourg, chaud partisan d'un Airbus du rail ou de l'énergie.

«Dans les transports, nous sommes absolument déterminés à créer un champion européen du ferroviaire. Pour cela, Siemens est disposé à apporter à Alstom l’ensemble de ses activités ferroviaires», a ainsi affirmé M. Cromme, semblant revenir sur la condition posée la veille: on discutera du transport seulement si on s'entend sur l'énergie.

«Tant qu'il sera possible, nous souhaitons que les offres puissent être améliorées», indiquait-on à l'Elysée.

General Electric a d'ores et déjà affirmé qu'il n'allait pas s'engager dans une guerre des prix. Toutefois, selon une source proche du dossier, GE travaille bien à rendre sa proposition plus attractive, même s'il n'est pas question pour lui de renchérir. Le groupe américain étudierait notamment la possibilité de créer une co-entreprise dans le transport avec Alstom et, comme le propose MHI, une alliance industrielle dans les turbines à vapeur.

Le dernier mot reviendra à Alstom: il a indiqué que la proposition de Siemens-MHI serait examinée par le comité d'administrateurs indépendants du groupe, présidé par Jean-Martin Folz, «puis soumise au conseil d'administration dans les jours qui viennent».

Le temps presse, car l'offre de GE expire lundi.

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