Des policiers chinois à Paris? Pas si sûr...

Des policiers chinois à Paris? Pas si sûr...

Des policiers chinois patrouilleront-ils à Paris cet été? Plusieurs semaines après l'annonce de ce projet visant à rassurer les touristes chinois, le flou persiste sur la mise en œuvre de cette mesure symbolique qui suscite plusieurs critiques.
© 2014 AFP

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Des policiers chinois patrouilleront-ils à Paris cet été? Plusieurs semaines après l'annonce de ce projet visant à rassurer les touristes chinois, le flou persiste sur la mise en œuvre de cette mesure symbolique qui suscite plusieurs critiques.

L'embarras est difficile à masquer. «C'est assez sensible comme sujet, il ne faut pas froisser les autorités chinoises. Il y a eu sans doute un peu de précipitation dans l'annonce de ce projet, et surtout un manque d'anticipation des réactions qu'il allait engendrer», résume une source proche du dossier.

Pour l'instant, officiellement, des «discussions sur les détails techniques d'une coopération sont toujours en cours», selon la préfecture de police de Paris. Mais une source diplomatique assure que le projet est tout simplement «abandonné».

Au ministère de l'Intérieur, on refuse de confirmer un éventuel rétro-pédalage sur une mesure qui devait figurer dans le plan de sécurisation des touristes que présentera jeudi le préfet de police de la capitale Bernard Boucault. Bref, il est difficile d'y voir clair.

L'idée avait été lancée au début du mois de mai par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, cité dans un article du journal chinois Le Quotidien du peuple.

Il y évoquait le projet d'accueillir des policiers chinois parlant le français cet été à Paris pour y effectuer des patrouilles aux côtés de leurs homologues français. Un peu moins d'une dizaine de policiers chinois, en uniforme mais non armés, seraient concernés, et leur rôle serait cantonné «à faire de la prévention» au bénéfice de leurs compatriotes face aux pickpockets, selon l’Intérieur.

Cette mesure a été pensée pour rassurer les autorités chinoises, «préoccupées depuis plusieurs mois» par la sécurité de leurs ressortissants dans la capitale, selon une source policière.

En 2013, plusieurs vols visant ces touristes, réputés pour se promener avec de fortes sommes d'argent liquide sur eux, les avaient en effet alertées.

Le sujet avait même été évoqué lors du déplacement de François Hollande en Chine en avril 2013 et quelques semaines après, Manuel Valls, alors ministre de l'Intérieur, avait présenté le plan de sécurisation des touristes à Paris accompagné de... l'ambassadeur de Chine.

- Standards et dissidents -

Mais le projet est très loin de faire l'unanimité, notamment du côté d'élus parisiens.

«Ce n'est pas la bonne solution. Cela fait ridicule. Cela donne l'impression que la police française ne peut pas assurer la sécurité des touristes», estime la maire du VIIIe arrondissement Jeanne d'Hauteserre (UMP).

«C'est un tel aveu d'impuissance (...) C'est un peu dérangeant, non ?» s'interroge Philippe Goujon, député-maire (UMP) du XVe arrondissement. Selon lui, la police chinoise a «une autre méthode, une autre culture, une autre conception de l'action policière», et des patrouilles en uniforme, celui lui semble «décalé».

Depuis 2008, des patrouilles mixtes avec des policiers de pays de l'Union européenne sont régulièrement mises en place l'été dans la capitale. Des policiers allemands, belges, portugais, italiens ou roumains sont déjà venus patrouiller avec leurs homologues français sans que cela ne soulève le moindre problème.

Mais jamais des policiers d'un pays hors Union européenne n'ont été autorisés à patrouiller en France. «Et surtout, la Chine est loin de posséder les standards d'un pays européen», souffle diplomatiquement une source proche du dossier.

«Il faut protester contre cette idée. Au-delà de l'inutilité de la présence de ces policiers chinois, c'est aussi un déshonneur pour la France», estime Marie Holzman, présidente de l'association Solidarité Chine, qui pense que ces policiers chinois «pourraient profiter de leur présence en France pour surveiller l'activité de certains dissidents» résidant à Paris. «Il suffit de placer quelques sinophones à des endroits touristiques stratégiques, et cela suffira», ajoute-t-elle.

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