Les ministres rassurent les milieux agricoles face à la recrudescence des vols
Les ministres de l'Agriculture et de l'Intérieur se sont déplacés ...© 2014 AFP
Les ministres de l'Agriculture et de l'Intérieur se sont déplacés dans la Bresse lundi pour rassurer les agriculteurs victimes de vols de matériels et d'animaux et garantir la présence et une réponse «rapide» de l'Etat face à un phénomène qui prend de l'ampleur.
Le jeune éleveur de Saint-Cyr-sur-Menthon désigne sa cour: sans un bruit une nuit à quelques jours de Noël, on lui a dérobé 52 chapons et 12 poulardes, des volailles de concours à plus de 45 euros le kilo. Montant du préjudice: 7.000 euros, plus 1.700 euros de dégâts sur les portes de la chambre-froide, explique Cyril Degluaire aux ministres.
Depuis 2010 dans ce département de l'Ain, les vols ont augmenté de 81%. Sur l'ensemble du territoire pour les quatre premiers mois de 2014, plus de 3.000 vols ont été enregistrés, en hausse de 8,4% par rapport à l'an dernier, selon le ministère de l'Intérieur.
En 2013, ils avaient atteint 10.600, un doublement en six ans.
«On est sur des filières organisées, avec des vols qui ciblent les animaux comme le matériel agricole, les tracteurs et autres, parfois désossés et exploités hors de France, en pièces détachées», indique le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve évoquant les réseaux roumains, kosovars et albanais.
Loin du chapardage de poules, le crime qui conduit parfois au dépeçage en plein champ de bovins vivants, est «mondialisé, internationalisé», insiste-t-il. Ce qui a justifié un plan d'action depuis septembre 2013, grâce auquel le gouvernement veut déployer une «réponse rapide et de proximité», insiste le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll.
Ce plan repose sur les gendarmes qui mènent aussi des actions de prévention: sensibilisation des exploitants, simplification des procédures d'alerte par SMS, diffusion de conseils et audits de sécurité.
Après sa mésaventure, Cyril Degluaire a reçu la visite du «gendarme référent» de sa région (il y en a deux par département), l'adjudant de gendarmerie Etienne Roux qui a fait avec lui le tour de la propriété, désigné les points faibles et suggéré quelques aménagements simples comme des éclairages puissants, une caméra qui photographie l'intrus au premier passage, des alarmes silencieuses et des clôtures électriques...
Depuis janvier, il a effectué ainsi une vingtaine de visites de fermes et tenté de convaincre les paysans de s'équiper.
-'Culture de la sécurité'-
Chez Cyril, avec ses volailles en liberté dans l'herbe et des bâtiments disséminés de petite taille, conformément au cahier des charges de l'appellation «de Bresse», l'affaire va coûter près de 7.000 euros.
«C'est difficile de convaincre les agriculteurs de dégager 5 à 10.000 euros pour des investissements non productifs», confie Michel Joux, président de la fédération départementale du syndicat des exploitants agricoles (FDSEA) de l'Ain et éleveur de moutons. «Jusqu'à maintenant, on n'avait pas cette culture de la sécurité mais les méfaits se multiplient et on commence à s'inquiéter».
L'adjudant Roux anime aussi avec sa hiérarchie un réseau «d'agriculteurs vigilants», des référents (121 dans le département) volontaires pour servir de relais.
Depuis septembre, le plan, renforcé par Manuel Valls en février, a permis d'augmenter le taux d'élucidation de 2%, selon M. Cazeneuve.
Désormais, les enquêteurs pourront aussi compter sur les services techniques et scientifiques de la gendarmerie et de la police: l'objectif est d'amener autant que possible les coupables devant les tribunaux en pouvant les relier à la totalité de leurs délits. Et ainsi «garantir une réponse judiciaire à la hauteur», expliquent-il.
En outre, un policier roumain a été détaché auprès de l'Office central de lutte contre la délinquance itinérante.
Car les deux ministres ont bien compris que dans les campagnes, comme dans certains territoires urbains, «il existe une peur de l'abandon et de la relégation», note M. Cazeneuve.
Et même si le déplacement était prévu «depuis plusieurs semaines» jurent les ministres, il tombe à pic au lendemain du scrutin européen qui a montré une progression du vote Front National dans les campagnes.