Libéré pour une erreur de fax, un meurtrier présumé clame son innocence

Libéré pour une erreur de fax, un meurtrier présumé clame son innocence

Soulagement pour les proches de Claudy Elisor, DJ antillais lynché au Nouvel An 2011: le principal accusé s'est bien présenté vendredi à l'ouverture de son procès, après avoir été libéré à la faveur d'une erreur de fax au tribunal.
© 2014 AFP

© 2014 AFP

Soulagement pour les proches de Claudy Elisor, DJ antillais lynché au Nouvel An 2011: le principal accusé s'est bien présenté vendredi à l'ouverture de son procès, après avoir été libéré à la faveur d'une erreur de fax au tribunal.

«C'était important de venir. Si je serais pas venu, ça aurait prouvé ma culpabilité», a déclaré Amadou Fall à voix basse mais sans fuir les caméras, à l'issue de la première demi-journée d'audience à Bobigny. «Je suis venu pour prouver mon innocence», a ajouté le jeune homme de 25 ans accusé de meurtre qui, fait exceptionnel, comparaît libre à son procès.

Il est arrivé tôt au tribunal de Bobigny, où plusieurs dizaines de proches et de membres de la famille de Claudy Elisor, originaires des Antilles où l'affaire a suscité une vive émotion, avaient aussi fait le déplacement.

«S'il est là pour ne rien dire, c'est pas la peine», prévient Fabienne Elisor, la veuve de la victime. «J'attends qu'il réponde à nos questions: pourquoi il a fait tout ça?», ajoute cette mère de deux enfants. «Je vais le regarder droit dans les yeux pour qu'il voie ce qu'il a fait».

Trois mois après avoir quitté sa cellule à la faveur d'un fax jamais reçu par un juge des libertés et de la détention (JLD) à cause d'un problème d'encre, Amadou Fall risque, si l'accusation et les parties civiles parviennent à convaincre les jurés de sa culpabilité, d'y retourner pour un maximum de 30 années.

Il doit répondre du tabassage à mort de M. Elisor, tard dans la nuit de la Saint-Sylvestre 2011. Ce soir-là, Claudy Elisor anime bénévolement une soirée pour 60 à 80 amis dans une petite salle du Blanc-Mesnil, que les jeunes de la cité dite «du 212», toute proche, ont l'habitude de fréquenter.

- Une dizaine d'agresseurs -

Vers 04H00 dans la nuit, Amadou est éconduit de la soirée, où il tente de pénétrer, par le videur et Claudy Elisor qui vient lui prêter main forte. Il est soupçonné d'avoir ensuite organisé en quelques minutes, à coup de SMS, une expédition pour laver l'affront dans le sang.

Selon des témoins, une dizaine d'agresseurs fondent sur Claudy, père de famille de 33 ans. Un premier coup à la tête et l'homme s'effondre. Un homme avec un pitbull monte la garde tandis que les autres s'acharnent sur M. Elisor, au sol, le frappant notamment avec une chaise, puis s'enfuient quelques minutes plus tard en dévastant les lieux et en volant des bouteilles de champagne.

Plongé dans un coma profond, Claudy Elisor succombe quelques jours plus tard d'un œdème cérébral, soulevant une forte émotion en parmi les Français d'Outre-Mer, dont certains représentants accusent alors la police de ne pas être intervenue assez rapidement parce que la victime était d'origine antillaise.

Doudoune sombre sur les épaules, Amadou Fall a assuré vendredi que ses premiers aveux, passés quelques jours après les faits et sur lesquels il est depuis largement revenu, avaient été obtenus «sous la contrainte». M. Fall s'était rendu de lui-même au commissariat, après s'être teint en blond, dans l'espoir selon les enquêteurs de ne pas être reconnu.

Parties civiles comme défense dénoncent les carences de l'enquête, confiée à plusieurs juges d'instruction successifs et qui a permis à l'autre accusé, Alassane Diop, d'abord placé sous le simple statut de témoin assisté, de faire des allers-retour pendant plusieurs mois entre la France et le Sénégal sans être inquiété.

Sur la dizaine de personnes qui auraient participé à l'expédition punitive, seuls deux se retrouvent aux assises. «Les vrais coupables ne sont pas là», regrette Me Amèle Bentahar, l'avocat de M. Diop.

L'enquête se fonde principalement, faute de traces ADN probantes, sur des analyses d'échanges téléphoniques et les déclarations des témoins, dont les auditions devraient s'échelonner sur l'ensemble de la semaine prochaine. Verdict prévu le 23 mai.

Cet article est réalisé par Journal du Net et hébergé par 20 Minutes.