Contrôles au faciès: les Français sceptiques sur l'action du gouvernement

Contrôles au faciès: les Français sceptiques sur l'action du gouvernement

Candidat, François Hollande avait promis de lutter contre les ...
© 2014 AFP

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Candidat, François Hollande avait promis de lutter contre les contrôles au faciès. Deux ans après son élection, les Français sont sévères sur son action, et les contrôles à répétition continuent de viser d'abord les minorités visibles, selon une étude publiée vendredi.

Près de deux tiers des Français jugent que «les gendarmes et les policiers se livrent à des contrôles au faciès», selon un sondage Opinion Way pour Human Rights Watch (HRW), Graines de France et Open Society Justice Initiative.

67% estiment «nécessaires» des mesures contre ces pratiques qui tendent les relations avec la police, surtout dans les zones sensibles, mais 60% pensent que le gouvernement n'a rien fait de «concret» en la matière.

«Je lutterai contre le +délit de faciès+ dans les contrôles d'identité par une procédure respectueuse des citoyens», promettait pourtant le candidat Hollande pendant sa campagne présidentielle (engagement n°30).

Un temps évoqués, le gouvernement a renoncé à imposer des récépissés après chaque contrôle et opté pour d'autres mesures: retour du matricule sur les uniformes, nouveau code de déontologie dans la police, possibilité de saisir directement par internet la «police des polices».

Malgré tout, des écarts importants subsistent selon les origines, d'après un second volet de l'étude qui s'est concentré sur un échantillon de personnes ayant été contrôlées au moins une fois dans l'année.

Il en ressort que 9,7% de Français sans ascendance étrangère ont été contrôlés sur les douze derniers mois, en moyenne 1,85 fois, contre 17,4% parmi les personnes ayant des ascendants originaires d'Afrique du Nord, avec une moyenne de 8,18 contrôles sur l'année.

Cette répétition des contrôles crée un fort «sentiment d'humiliation», notamment chez les jeunes qui vivent leurs premiers contacts avec une institution, regrette Jean-Marie Fardeau, directeur France de HRW.

- Palpés, fouillés, tutoyés -

De plus, les personnes d'ascendance maghrébine ont, selon leurs réponses, davantage été soumises à des palpations (36% contre 7% des contrôlés n'ayant pas d'origine étrangère), à des fouilles (33% contre 7%), à la force physique (12% contre 2%) et au tutoiement (17% contre 6%).

Ces résultats «confortent» une étude de terrain menée en 2009, selon laquelle un Noir ou un Maghrébin a entre 2 et 15 fois plus de chances d'être contrôlé par la police qu'un Blanc, a souligné Lana Hollo, représentante en France d'Open Society Justice Initiative qui avait dirigé l'enquête avec le CNRS.

«Les pratiques discriminatoires restent flagrantes», en concluent les trois organisations commanditaires du sondage. «Rien ne peut justifier un écart de un à cinq sur le nombre des contrôles (...) et dans la pratique des palpations et des fouilles.»

Mais pour Synergie, deuxième syndicat d’officiers de police, «l'accusation de discrimination ne tient pas».

«C'est le lieu plus ou moins criminogène» comme la Gare du Nord à Paris, lieu de nombreux trafics, «et certaines attitudes qui peuvent déclencher un contrôle», argumente son secrétaire général Patrice Ribeiro, pour lequel les contrôles d'identité sont «nécessaires à la recherche d'infractions».

Les associations ne souhaitent pas l'interdiction de ces contrôles, mais plaident pour la mise en place de récépissés - dont les forces de l'ordre ne veulent pas - et pour une réforme du code de procédure pénale afin de mieux les encadrer.

Son article 78-2 donne, dans sa forme actuelle, «toute latitude aux forces de sécurité pour faire ce qu'elles veulent», regrette Jean-Marie Fardeau.

Il relève tout de même «une bonne nouvelle» dans le sondage: 87% des sondés disent avoir été traités «avec respect» lors du contrôle, une proportion qui reste à 83% parmi les descendants d'étrangers.

Cet article est réalisé par Journal du Net et hébergé par 20 Minutes.