Alstom: le patron de GE à Paris dimanche, Siemens entre dans la course
•Le PDG du géant américain General Electric (GE) était attendu ...© 2014 AFP
Le PDG du géant américain General Electric (GE) était attendu dimanche à Paris pour discuter au plus haut niveau d'une éventuelle acquisition de la division énergie d'Alstom, un des fleurons industriels français qui pourrait intéresser aussi l'allemand Siemens.
Jeffrey Immelt et ses collaborateurs devraient rencontrer le ministre de l'Economie, Arnaud Montebourg, selon des sources concordantes sans préciser les lieu et heure de l'entrevue. Une rencontre avec le Premier ministre, Manuel Valls, n'était en revanche plus à l'ordre du jour samedi soir.
GE compte acheter les actifs du groupe français liés à l'énergie (équipements pour centrales thermiques, lignes à haute tension, énergies renouvelables, soit les divisions «Power» et «Grid»), qui représentent plus de 70% de l'activité d'Alstom et un chiffre d'affaires de 14 milliards d'euros. La transaction est estimée à quelque 10 milliards d'euros, selon la presse.
La branche transport, qui fabrique les célèbres trains à grande vitesse (TGV), ne serait pas concernée par cette acquisition.
«Les discussions sont à un stade avancé mais elles ne sont pas encore exclusives», ont indiqué plusieurs sources proches du dossier.
«Une offre de Siemens se prépare», a en outre annoncé une autre source proche du dossier, créant la confusion.
Alstom, Siemens et GE ont refusé de faire le moindre commentaire.
Bien que l'Etat ne soit plus actionnaire de l'entreprise depuis 2006, Arnaud Montebourg s'est invité dans le dossier, justifiant son interventionnisme par la nécessité de prémunir la France du risque de perdre un centre de décision et d'éventuels emplois.
Vendredi soir, il a reçu Clara Gaymard, la dirigeante de GE en France, selon des sources proches du dossier. Pour s'assurer qu'a minima l'emploi serait préservé.
De son côté, le PDG d'Alstom, Patrick Kron, a simplement confirmé aux organisations syndicales que le groupe était en discussions «pour une opération industrielle».
La rencontre de dimanche entre les différentes parties sera sans doute un tournant pour Alstom, qui pâtit depuis un an d'un coup de frein sur son marché principal des centrales électriques.
Le gouvernement entend obtenir des garanties sur trois points «l'emploi, la localisation des activités et l'indépendance énergétique», a-t-on expliqué dans l'entourage du président François Hollande.
Alstom devrait tenir dimanche un conseil d'administration, selon la presse. D'autant que le temps presse. Le cours du titre Alstom (à 27 euros) a été suspendu vendredi à la Bourse de Paris et la cotation ne pourra reprendre lundi que si le groupe publie un communiqué pour éclaircir la situation et éviter les spéculations boursières.
- Opération amicale -
«GE est dans une position très amicale», assurait samedi une source proche du dossier. «Si GE souhaite faire cette opération, c'est parce qu'ils sont sensibles aux arguments d'Alstom et de son principal actionnaire Bouygues», qui détient 29,4% du capital, notamment sur la complémentarité entre les deux groupes.
Bouygues, qui a besoin de liquidités, ne cache pas son souhait de se désengager du capital d'Alstom. L'industriel souhaite se recentrer sur le ferroviaire, a précisé la même source.
«On a une belle histoire à construire en terme d'offres à travers le monde. On veut écouter le gouvernement, sachant que l'on veut construire un projet industriel et non un projet politique», a-t-on souligné dans l'entourage de GE.
GE, qui a décidé de se recentrer sur son activité industrielle au détriment de sa branche financière (GE Capital), pourra faire valoir dimanche auprès du gouvernement sa présence de longue date en France et ses partenariats avec d'autres industriels français.
GE France, ce sont en effet 11.000 employés et un siège européen à Belfort. L'entreprise est présente dans une vingtaine de villes de l'Hexagone, précise-t-elle sur son site internet.
L'industriel américain dispose en outre depuis plus de 35 ans d'une filiale commune avec Snecma (Safran) qui fabrique le CFM56, le moteur d'avion le plus vendu de l'histoire.
«C'est dans l'ADN de GE d'être un partenaire industriel avec la France. Sur l'aspect social, on est très à l'aise (...) GE est très respecté en terme de politique sociale», souligne-t-on dans l'entourage de l'entreprise.
Si le gouvernement français peut faire pression sur d'éventuelles garanties, il lui sera difficile de faire obstruction à une opération de cessions d'actifs, faute de véritables alternatives pour garantir l'avenir d'Alstom.
Lors du sauvetage d'Alstom alors au bord de la faillite, en 2003-2004, l'Etat français s'était opposé à un rachat par Siemens. Patrick Kron est en outre viscéralement opposé à un rapprochement avec l'Allemand.
«Une offre de Siemens a l'intérêt d'être européenne», observe un proche du dossier. «Mais cette solution préserverait-elle plus les intérêts français que celle de GE ? C'est la réponse qui déterminera le choix de l'offre», dit-il.
Une acquisition par GE donnerait naissance à un mastodonte industriel. General Electric est déjà une des plus grandes entreprises américaines et mondiales, avec un chiffre d'affaires de 146 milliards de dollars l'an passé et quelque 305.000 employés.
Alstom emploie 93.000 personnes dans le monde, dont 18.000 en France, et a réalisé sur l'exercice 2012-2013 un chiffre d'affaires de 20,3 milliards d'euros. Il doit publier ses résultats annuels le 7 mai.
Dimanche, des salariés pourraient manifester devant le siège du groupe près de Paris.