Mariage pour tous: Un an après, les principaux acteurs font le bilan
TEMOIGNAGES•Il y a un an, le Parlement adoptait la loi ouvrant le droit au Mariage pour tous au terme de plusieurs mois de débats. 20 Minutes a retrouvé les principaux protagonistes de ce dossier…Vincent Vanthighem
Certains ont foncé à la mairie de leur village pour convoler en justes noces. D’autres, au contraire, se sont promis de tout faire pour que le gouvernement fasse machine arrière. Le 23 avril 2013, il y a un an tout juste, le Parlement adoptait la loi ouvrant le droit au Mariage pour tous au terme de plusieurs mois de débats houleux. 20 Minutes a retrouvé les principaux protagonistes de ce dossier afin de savoir quel bilan ils tirent du premier anniversaire d’application de cette loi.
Alix Béranger du collectif Oui, oui, oui: «Personne du collectif ne s’est marié pour l’instant!» «J’ai plein d’amis qui se sont mariés et qui en avaient envie depuis longtemps. Je trouve cela chouette. Mais sinon, nous tirons un bilan assez amer de cette première année. Le mariage n’a pas entraîné toute une série de mesures que l’on pouvait espérer comme la Procréation médicalement assistée (PMA) ou les facilités pour le droit à l’adoption par des couples de même sexe. Du coup, aucun membre du collectif ne s’est marié pour l’instant! Cela prouve qu’on ne peut pas se satisfaire d’une mesurette…»
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Emmanuelle, 30 ans, à Pau: «Il y a toujours des cases Mademoiselle et Monsieur sur les formulaires.» «Egoïstement, je suis très contente de me marier avec ma compagne cet été. Mais, nous nous sommes rendu compte que les prestataires ne sont pas du tout à jour. Sur tous les formulaires, il y a des cases Mademoiselle et Monsieur… Surtout, nous avons rencontré certains esprits obtus. Y compris sur le salon du mariage. Un professionnel nous a demandées laquelle de nous deux allait se marier alors que nous sommes arrivées main dans la main. J’attends maintenant de savoir si François Bayrou va nous marier…»
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Alain Escada, président de Civitas: «Nous avons doublé notre nombre d’adhérents.» «Un an après, la mobilisation contre cette loi ne s’est pas éteinte. Il y a désormais une génération attentive qui prend sa part au débat. En 2011, Civitas comptait entre 800 et 900 membres. Nous avons doublé notre nombre d’adhérents puisque nous sommes autour de 1.700 aujourd’hui. Et nous sommes inquiets. Beaucoup disent que nous fabulons mais nous assistons au développement de la théorie du genre, notamment au travers des ‘’A, B, C, D de l’Egalité’’ dans les écoles qui banalisent, selon nous, les mœurs propres à la communauté Lesbienne, gay, bi et transsexuelle.»
Tony, 33 ans, à Tours: «Cela n’a rien changé à ma vie…» «Je n’étais pas forcément favorable au mariage homosexuel. J’estime qu’un Pacs amélioré aurait suffi. Aujourd’hui, j’ai l’impression que les gens se sont faits à l’idée. C’est sûr, on pourrait approfondir sur l’égalité mais je considère que le droit à l’adoption simple est déjà suffisant dans le Pacs. En fait, cela n’a rien changé à ma vie. Mais c’est aussi parce qu’avec mon compagnon, nous ne nous plaignions de rien. Il faut savoir vivre comme Monsieur et Madame Tout-le-Monde…»
Franck Meyer, président du Collectif des maires pour l’enfance: «Tout ce que l’on redoutait a été mis en œuvre.» «Le Collectif est en train de se mettre à jour après les élections municipales. Avant ce scrutin, nous comptions 20.150 maires et adjoints opposés à la loi ouvrant le droit au mariage pour tous. Moi, j’ai vécu cette année comme la mise en œuvre de tout ce que nous redoutions. Par exemple? Les mots ‘’père’’ et ‘’mère’’ ont bien été remplacés dans le Code civil par celui de ‘’parent’’ (uniquement dans un article, en fait). Dans ma mairie, je n’ai reçu qu’une seule demande d’un homosexuel. Je lui ai expliqué pourquoi je ne voulais pas le marier et il n’a finalement pas déposé de dossier. Mais j’ai un couple de lesbiennes que je considère comme n’importe quels autres de mes administrés…»
Yohann Roszéwitch, président de SOS Homophobie: «Ça a libéré la parole homophobe» «Bien sûr il y a plus d’égalité pour les lesbiennes et les gays mais cela n’a pas tout résolu. Ainsi, nous avons assisté à une explosion des témoignages de victimes d’homophobie en 2013. Nous en avons enregistré 3.500, soit une hausse de 80 % par rapport à 2012. Toutes les sphères de la société ont été touchées. La parole homophobe s’est libérée sur la place publique, elle s’est donc libérée aussi à la machine à café et le dimanche, dans les repas de famille. C’est regrettable.»