Ce qu'a raconté le fils de Maurice Agnelet au tribunal
JUSTICE•Guillaume Agnelet a accusé lundi son père Maurice d'avoir tué sa maîtresse Agnès Le Roux en 1977...20 Minutes avec AFP
«Ce témoignage va sceller la rupture avec ma famille»: pour éviter des «regrets jusqu'à la fin de sa vie», Guillaume Agnelet a accusé lundi son père Maurice d'avoir tué sa maîtresse Agnès Le Roux, lors d'une visioconférence à la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine.
Sous le regard impassible de son père, dans le box des accusés, cet informaticien de 45 ans, cheveux courts et chemise bleue foncée, apparaît peu avant 11h30 sur l'écran. La gorge nouée, il entame alors un récit. Celui «des trois fois où j'ai reçu de mon père ou de ma mère ce que je considère être des aveux» de l'assassinat de l'héritière d'un casino niçois, mystérieusement disparue en 1977, raconte-t-il.
« Moi, je sais où est le corps »
Années 1980. Guillaume, 16 ans, passe les vacances avec son père à Paris. Il «ressassait le dossier comme je l'avais vu faire des centaines de fois», se souvient Guillaume. «A un moment, il précise que, tant que le corps ne serait pas retrouvé, il ne risquait rien. Et il rajoute : ''Moi, je sais où est le corps''», avec un «regard sans équivoque», poursuit le fils. «Ce n'était pas une information que j'avais demandé à recevoir, donc je n'ai pas demandé pourquoi. C'est alors que j'ai commencé à me réveiller tous les matins avec la même idée», ajoute-t-il.
Début des années 1990. Guillaume est étudiant et chez sa mère, à Cantaron (Alpes-Maritimes). Cette dernière « me dit: ''Assieds-toi, je vais te parler de ton père.'' Il me semble bien que ça a commencé par: ''Ton père a tué Agnès.'' Elle dit le tenir directement de lui», affirme Guillaume.
«Elle me donne un certain nombre de précisions sur le modus operandi. Ils sont partis en camping tous les deux en Italie, dans la région du Monte Cassino, et se sont trouvés un coin tranquille. Ils ont passé la nuit dans la voiture et Maurice aurait pendant son sommeil tiré sur Agnès. Juste derrière, il aurait hurlé pour demander du secours, c'était une couverture pour savoir si quelqu'un avait entendu la détonation», auquel cas «il aurait invoqué la tentative de suicide».
«Lever le voile»
Maurice Agnelet aurait «parcouru quelques centaines de mètres pour déposer le corps en contrebas de la route (...), dénudé et à même le sol» avant de garer le Range Rover d'Agnès, clé sur le tableau de bord, sur le parking d'une gare et de regagner Nice en train.
Pendant les années 2000, Guillaume et son frère Thomas accueillent Maurice, de retour d'un séjour au Panama, à l'aéroport de Genève. Tous trois s'attablent autour d'un café et, au cours de la conversation, Maurice «dit ''Il faudrait pas qu'ils retrouvent le corps.'' J'ai commencé à avoir le coeur qui bat et à me demander si je n'étais pas dans un cauchemar», se rappelle Guillaume. La discussion s'oriente «sur les chances qu'un corps puisse être reconnu après un certain temps passé dans la nature». «Moi, je suis dans une situation où ça fait des dizaines d'années que je me réveille tous les matins avec la même idée»; donc, «je me dis qu'il faut que je lève complètement le voile ».
Profitant d'une courte absence de son frère, il dit à son père: « ''Thomas n'est peut-être pas aussi conscient des choses que moi: est-ce que tu te rends compte d'avoir avoué avoir tué Agnès?'' Il me regarde, me sourit et dit ''Thomas est intelligent, il a déjà compris.''» «Ça me méduse», dit Guillaume, qui n'insiste pas.
Interrogé, après son témoignage, par le président de la cour au sujet de la nature de Maurice Agnelet, il répond: «En un mot, perverse.»