Deux «filles Distilbène» bientôt fixées dans leur procès contre un laboratoire
Deux "filles Distilbène", exposées pendant la grossesse de leur mère à cette molécule nocive, sauront jeudi si la justice leur donne raison face au laboratoire UCB Pharma qui a commercialisé ce médicament, interdit depuis 1977 aux femmes enceintes.© 2014 AFP
Deux «filles Distilbène», exposées pendant la grossesse de leur mère à cette molécule nocive, sauront jeudi si la justice leur donne raison face au laboratoire UCB Pharma qui a commercialisé ce médicament, interdit depuis 1977 aux femmes enceintes.
Sylvie Le Cossec, 45 ans, a subi une ablation de l'utérus et deux grossesses pathologiques. Son fils Julien, polyhandicapé, souffre de graves lésions neurologiques et du système moteur.
«Le lien entre l'exposition de ma cliente à la molécule diéthylstilboestrol (DES) et ses pathologies est indéniable», avait plaidé à l'audience du 16 janvier son avocate, Me Martine Verdier.
En ce qui concerne Julien, 15 ans, «les présomptions de causalité sont fortes, mais plus difficiles à établir. C'est pourquoi nous demandons au tribunal, s'il le souhaite, d'ordonner un complément d'expertise», avait-elle ajouté.
Me Verdier demande au total plus de 650.000 euros de dommages et intérêts.
Barbara Régent a pour sa part assigné le laboratoire pour des problèmes de stérilité. Son conseil, Me Julie Bonnier, a demandé 60.000 euros au titre du préjudice moral.
Dans un arrêt rendu le 24 septembre 2009, la Cour de cassation a inversé la charge de la preuve dans ces dossiers: à partir du moment où une femme prouve qu'elle a été exposée au DES, il appartient désormais au laboratoire attaqué de démontrer que son produit n'était pas en cause.
Pour Me Ivan Terel, avocat du groupe pharmaceutique, la responsabilité d'UBC Pharma, qui commercialisait le médicament avec Novartis, «doit s'apprécier au regard des connaissances de l'époque».
«Dans les années 60, quand on a prescrit du DES à la mère de la plaignante, personne n'avait conscience de sa nocivité. Il n'y a donc pas eu de faute du laboratoire du point de vue de la responsabilité civile», selon lui.
En mars 2006, la Cour de cassation a toutefois estimé qu'UBC Pharma avait «manqué à son obligation de vigilance», constatant que des doutes sur la nocivité du DES «existaient avant 1971 et dès les années 1953-54».
Le Distilbène est le nom commercial d'une hormone de synthèse prescrite en France entre 1950 et 1977 aux femmes enceintes pour prévenir les fausses couches, les risques de prématurité et traiter les hémorragies de la grossesse.
Selon le réseau DES France, qui soutient les victimes de ce médicament, au moins 160.000 enfants nés pour la plupart dans les années 1970 auraient été exposés au produit. C'est entre 1964 et 1975 qu'il a été le plus prescrit.