Encadrement des stages: Les entreprises accueilleront-elles moins de jeunes?
JEUNES – Une proposition de loi (PPL) socialiste qui sera examinée ce mercredi à l'Assemblée imposera, si elle est adoptée, de nouvelles obligations aux entreprises concernant l’accueil des stagiaires…Delphine Bancaud
Mieux encadrer les stages et améliorer le statut des stagiaires. C’est l’objectif d’une proposition de loi (PPL) socialiste qui sera examinée ce mercredi à l'Assemblée. Un texte qui fait déjà débat dans les entreprises. Mardi, le président du Medef Pierre Gattaz a demandé mardi un «moratoire» sur une quinzaine de projets de lois qui «stressent» les entreprises, évoquant notamment la PPL sur les stages. Il a regretté qu' «au lieu de traiter des problèmes ponctuels, on (fasse) une loi» sur le sujet».
Force est de constater que les mesures prévues par la PPL ne font pas l’unanimité chez les DRH. Concernant la limitation du nombre de stagiaires en fonction des effectifs de l’entreprise, Jean-Christophe Scibberras, président de l’ANDRH (Association nationale des directeurs des ressources humaines) estime que cette mesure, si elle est adoptée, «ne répond pas à la question posée par les abus. Car le principal problème est que certaines entreprises utilisent des stagiaires pour remplacer des salariés», soutient-il. « Or, on peut très bien avoir une entreprise qui dépassera le quota et qui est parfaitement respectueuse des stagiaires et une autre en dessous du quota qui en abusera ».
Un avis que ne partage pas Cédric Méjean, DRH du Pôle Industrie chez SGS France: «Cela va remettre certaines entreprises dans le droit chemin. Car dans certains secteurs, on constate des abus dans le recours aux stagiaires», affirme-t-il. Et si le seuil de stagiaires est finalement fixé à 10% de l’effectif dans le futur décret d’application de la loi, cela ne posera pas de souci à SGS, assure-t-il: «L’an dernier, nous avons accueilli 3% de stagiaires. Ce plafond ne sera donc pas une contrainte pour nous».
Des formalités administratives supplémentaires
Les entreprises devront aussi inscrire leurs stagiaires au registre unique du personnel. Une bonne mesure selon les DRH «mais qui nécessitera une consolidation nationale des statistiques concernant les stagiaires pour les entreprises comme la nôtre qui sont comptent plusieurs établissements», souligne Cédric Méjean. «Il faudra les comptabiliser à la semaine près», explique-t-il. Des formalités administratives supplémentaires pour les équipes RH.
La PPL prévoit aussi l’obligation de mieux définir les missions du stagiaire et qu’il soit obligatoirement encadré par un tuteur. «C’est une bonne chose, car les entreprises seront plus vigilantes sur les missions confiées aux stagiaires et cela limitera les stages photocopies», souligne Jean-Christophe Scibberras. «Beaucoup d’entreprises comme la nôtre ont déjà mis en place des tuteurs de stages, mais insister sur son rôle ne peut être que positif. Et cela permettra de renforcer le lien entre l’entreprise et le centre de formation du jeune», observe de son côté Cédric Méjean.
Un effet psychologique redouté
Quant aux avantages sociaux qui pourraient être octroyés aux jeunes si certains amendements à la PPL passent (titre restaurant, remboursement d’une partie des frais de transport…) Cédric Méjean estime qu’ils ne renchériront pas beaucoup le «coût» des stagiaires: «en termes de charges et d’Urssaf, ce n’est pas énorme», souligne-t-il. Mais selon Jean-Christophe Scibberras «cela pourrait poser problème à certaines PME».
Au final, Jean-Christophe Scibberras craint surtout que ces nouvelles règles concernant les stages finissent par décourager certaines entreprises d’accueillir des jeunes. «Souvent elles le font par sens des responsabilités, pour former des jeunes. Et elles se comportent la plupart du temps de manière tout à fait vertueuse à leur égard. Si on leur impose trop de contraintes, certaines risquent de rechigner à le faire. Et les premiers perdants dans l’affaire seront les jeunes», affirme-t-il.